Steva-Limousin : pour FO il n’est pas question que l’usine subisse le sort de GM&S

Emploi et Salaires par Valérie Forgeront

Depuis plusieurs semaines le syndicat FO du site Steva à Bessines-sur-Gartempe en Haute-Vienne a pris la tête du combat des salariés cherchant à sauver les 115 emplois de cette usine d’emboutissage, sous-traitante du secteur industriel de la métallurgie. Placée en redressement judiciaire, l’entreprise a deux mois pour trouver des solutions capables de lui apporter les moyens financiers de sa pérennité. Les salariés multiplient les actions, s’élèvent contre les méthodes que les donneurs d’ordre imposent aux sous-traitants et fustigent l’attitude d’un ancien dirigeant de GM&S propriétaire des murs de l’usine. Ils n’ont cessé ces derniers jours d’interpeller les pouvoirs publics. Ils viennent de décrocher la tenue d’une table ronde lundi 16 avril à Limoges. Les salariés visent à faire entendre leurs revendications. L’enjeu est de taille : la survie du site et de la totalité de ses emplois. Il est hors de question que l’usine subisse le sort de GM&S insiste FO.

Pour les 115 salariés de l’entreprise Steva-Limousin basée à Bessines-sur-Gartempe en Haute-Vienne, le temps presse. Depuis quelques semaines ils multiplient les actions (opérations escargots, manifs, organisation de visites de l’usine pour les élus locaux…) et en appellent aux pouvoirs publics afin de sauver le site et d’y maintenir tous ses emplois. En effet, l’usine d’emboutissage et de soudure qui fabrique des pièces pour l’industrie (notamment pour le secteur automobile) a été placée le 5 avril dernier en redressement judiciaire pour deux mois par le tribunal de commerce de Lyon (siège du groupe Steva).

Une administratrice judiciaire a été nommée. Afin d’éviter une liquidation en juin prochain, l’entreprise qui perd des dizaines de milliers d’euros chaque mois doit trouver une solution, financière. Pour l’instant toutefois, cette mise en observation de Steva va permettre aux salariés de percevoir enfin la deuxième moitié de leur salaire du mois de mars.

L’usine qui est un sous-traitant de constructeurs (Volvo, tracteurs Massey-Fergusson, pièces pour les containers de la grande distribution, Peugeot, Renault…) a été rachetée en 2014 par le groupe Steva. Auparavant le site limousin appartenait au groupe Altia… Jusqu’à la liquidation de celui-ci. Depuis ces déboires, Altia (qui employait 3 000 salariés dans le monde dont 1 500 en France) est devenu un nom familier et tristement célèbre dans la région. Et pour cause.

Où l’on reparle d’Altia et de GM&S…

Le nom d’Altia rappelle en effet l’affaire de l’entreprise Gm&S basée dans la Creuse et de la disparition douloureuse de ses emplois. Avant d’appartenir à GM&S puis désormais (depuis septembre 2017) au groupe GMD qui pour ce site rebaptisé LSI (La Souterraine Industrie) n’a gardé que 120 emplois sur 276, le site creusois de La Souterraine appartenait à Altia. Lors de la liquidation de ce groupe, le site avait été repris par GM&S. L’usine d’emboutissage de la Haute-Vienne avait, elle, été rachetée par Steva. Etait-ce toutefois le point final de la triste aventure Altia ? Non semble-t-il.

Après avoir subi neuf changements de propriétaires et plusieurs plans sociaux depuis la création du site en 1989, les salariés du site de Gartempe –désormais 115 personnes– ont dû accepter ces trois dernières années de réaliser de nouveaux efforts, par exemple à travers un recul du nombre de leurs RTT ainsi que de leurs temps de pause. Ces efforts ont-ils suffi ? Non. Alors que la direction de Steva a effectivement réalisé les investissements promis au site et que par ailleurs l’usine a reçu une aide publique conséquente (900 000 euros) pour lancer son projet innovant de container connecté, l’usine limousine est toujours mal en point.

La pression des donneurs d’ordre fait des dégâts

Pour Bruno Grimaux, délégué syndical FO du site de Bessines, cette situation ne doit rien au hasard. Soumise en tant que sous-traitant à la pression constante des donneurs d’ordre, l’entreprise est contrainte à une rentabilité impossible à atteindre. Pour le militant il y a encore dix ou quinze ans, les clients/constructeurs respectaient davantage leurs sous-traitants. Aujourd’hui, la recherche du plus bas coût de production est tellement poussée qu’au moindre problème (de machine, sur une pièce…) une usine de sous-traitance comme nous est contrainte de fabriquer et vendre à perte.

C’est aussi ce contexte qu’avait subi GM&S indique le militant relevant que depuis quelque temps les constructeurs Peugeot et Renault se sont désengagés de Steva… Autant dire qu’à Bessines, les salariés n’ont pas envie de vivre une deuxième affaire GM&S en perdant les emplois du site.

Depuis quelques semaines, seule organisation syndicale du site (qui compte aussi les organisations CFTC et CGC) à prendre la tête du combat pour la défense des emplois, FO-Steva multiplie les actions pour sensibiliser les pouvoirs publics. Opération escargot sur l’A20 entre Bessines et Limoge le 10 avril puis manifestation le même jour dans la capitale de la Haute-Vienne, visite du site organisée ce 13 avril pour des élus locaux, des députés, des représentants du Medef (patronat) ou encore de l’UIMM (patronat du secteur de la métallurgie)… Les salariés de Steva comptent se faire entendre.

Le scandale du loyer…

D’ores et déjà ils ont été reçus le 10 avril à la préfecture et ont obtenu l’organisation d’une table ronde qui se tiendra le lundi 16 avril. Seront présents des représentants de la Région, le sous-préfet de Bellac, des élus locaux, des députés, le P-DG de Steva, M. Philippe Lassablière, des représentants de la Direccte (direction régionale notamment du Travail et de L’Emploi) et bien sûr les représentants des salariés.

Cette rencontre sera probablement l’occasion d’aborder un sujet pour le moins problématique, celui du loyer de 25 000 euros que Steva-Bessines verse chaque mois (soit 250 000 euros par an) à une société civile immobilière (SCI) qui est propriétaire des murs de l’usine. Cette SCI est détenue notamment par un des trois ex-dirigeants d’Altia, M. Patrice Durand.

Les difficultés du site de Haute vienne ne semble pas l’émouvoir puisque celui-ci vient de mettre en demeure Steva de lui payer 75 000 euros. C’est inadmissible. Cela met les salariés hors d’eux fulmine Bruno Grimaux. FO a demandé à l’administratrice judiciaire nommée dans le cadre de la période de mise en observation de Steva de payer ce que doit l’usine mais certainement pas les loyers demandés par M. Durand. Le syndicat FO demande par ailleurs que Steva rachète la SCI… Mais à un prix raisonnable indique Bruno Grimaux.

Les pistes pour « trouver de l’argent »

Des pistes pour sauver Steva et trouver de l’argent devront être bien sûr étudiées au cours de cette table ronde. Pour le syndicat FO il faut que les clients payent la matière première nécessaire à la production, que la Région Aquitaine apporte une aide financière et que les effectifs affectés à la production augmentent. FO propose aussi que M. Alain Martineau, le patron de LSI (ex- GM&S) qui est aussi actionnaire à 20% de Steva mette à profit son statut d’actionnaire pour apporter de nouveau clients au site.

Pour rendre la santé au site limousin il y a aussi la possibilité de renforcer la portée du projet innovant de container connecté actuellement élaboré par Steva. Trouver un actionnaire qui prendrait part au projet permettrait de développer ce secteur dans l’usine explique Bruno Grimaux. La table ronde prévue ce lundi 16 avril est donc des plus importantes pour l’avenir de Steva-Limousin.

Valérie Forgeront Journaliste à L’inFO militante

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