Surpopulation carcérale : FO Justice préconise d’écouter la parole pénitentiaire

InFO militante par Chloé Bouvier, L’inFO militante

© Christian Liewig/pool-REA

Plusieurs mobilisations syndicales se sont tenues récemment dans des maisons d’arrêt où la surpopulation carcérale dépasse les 200 %, ce qui affecte tant les conditions de vie des personnes détenues que les conditions de travail des agents de surveillance. Sur l’ensemble des prisons françaises, le taux d’occupation dépasse les 136% en novembre. Face à ce problème, chronique, FO Justice convie les organisations syndicales à une rencontre pour échanger sur la situation et examiner la possibilité d’élaborer une plateforme revendicative commune.

La banderole déployée sur les murs de la prison du Puy-en-Velay (Haute-Loire), le 17 novembre, affichait un message clair. Complet. Danger. Une vingtaine d’agents s’étaient ainsi réunis dès le matin devant la maison d’arrêt, à l’appel d’une intersyndicale à laquelle participe FO. Nous avons assuré un service minimum et remplacé les agents de nuit, indiquait Didier Lui-Hin-Tsan, secrétaire régional FO justice. Seuls, le personnel médical, la direction et les magistrats pouvaient entrer dans la prison.

Les agents qui se sont mobilisés dénoncent une surpopulation record au sein de la maison d’arrêt avec 96 détenus pour 36 places. Cette surpopulation, nous la subissons de plein fouet. Tout est désorganisé, nous ne parvenons pas à faire des activités et les tensions augmentent. Les détenus sont trois par cellule, les conflits deviennent monnaie courante et les agents pénitentiaires sont en première ligne. Lorsqu’une bagarre éclate, c’est le surveillant pénitentiaire le premier à ouvrir la porte, explique le militant.

Dernièrement, le 16 octobre, une prise d’otage a eu lieu dans la maison d’arrêt. Ce qui devait arriver arriva, analyse FO Justice. Un détenu connu de la maison d’arrêt pour ces sautes d’humeur multiples et des passages en hôpital, a pris un autre détenu en otage pendant une séance de sport. Le gradé présent et les agents ont fait preuve d’un grand sang froid pour éviter le pire, souligne le syndicat.

Les personnels d’autres maisons d’arrêt de la région se mobilisent également à l’appel de FO. Le 13 novembre, les agents de la prison de Saint-Quentin-Fallavier, située à l’est de Lyon, organisaient ainsi une action, en bloquant notamment les visites. Ils protestent eux aussi contre la surpopulation carcérale. Elle atteint sur le site 231 %.

Des transferts qui ne font que déplacer le problème

Parmi les revendications des agents mobilisés, le transfert d’un certain nombre de détenus pour désencombrer les cellules. Ce que l’administration a accepté mais au vu de la généralisation du phénomène, cela n’a fait que déplacer le problème sans apporter de solution, indique Didier Lui-Hin-Tsan. Les détenus qui ont été déplacés l’ont été dans des établissements où la surpopulation est aussi une réalité.

Pour le secrétaire régional, l’enjeu de la mobilisation est aussi de sensibiliser les tribunaux et leurs magistrats, notamment les présidents de chambre, quant aux décisions prises d’incarcérations dans un contexte d’absence de places dans les établissements pénitentiaires. De telles décisions peuvent mettre en danger personnels et détenus souligne FO Justice notant que Des alternatives existent mais elles sont trop peu utilisées.

Les agents demeurent déterminés à se faire entendre. « Si rien ne change, cela se transformera en mouvement national », précise Didier Lui-Hin-Tsan. Car la surpopulation est la réalité de l’ensemble des prisons en France : le nombre de détenus s’élevait à 85 373 au 1er novembre 2025 pour seulement 62668 places opérationnelles, avec une densité carcérale qui atteint 136,2%.

FO invite à une réflexion intersyndicale

FO Justice est plus que jamais mobilisé sur le sujet. Emmanuel Baudouin, secrétaire général FO national, a ainsi envoyé une lettre ouverte à l’ensemble des organisations syndicales du ministère de la Justice afin de leur proposer une rencontre intersyndicale, afin d’échanger sur la situation actuelle et d’examiner ensemble la possibilité d’élaborer une plateforme revendicative commune, centrée sur une exigence simple : que l’administration pénitentiaire retrouve, demain, une place centrale dans l’application des peines, pleinement alignée avec les réalités du terrain et les impératifs de sécurité collective..

Le syndicat évoque un constat désormais largement partagé : le système ne peut plus fonctionner durablement si ceux qui gèrent la population pénale, évaluent les situations, interviennent auprès des personnes détenues et alertent sur les risques demeurent écartés des décisions les plus structurantes. Dans ce contexte, il devient nécessaire de poser lucidement la question du rôle réel de l’administration pénitentiaire dans la politique d’exécution des peines.

Chloé Bouvier

L’inFO militante Le bimensuel de la Confédération

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