Tout d’abord, sympathisant n’est pas adhérent et encore moins militant. Mais si vous le permettez, renversons la question : de quel syndicat un sympathisant Front National peut-il se sentir proche ?
Certaines confédérations syndicales soutiennent régulièrement l’action ou les candidats de partis politiques – allant jusqu’à donner des consignes de vote –, plusieurs de leurs membres cumulant d’ailleurs responsabilités syndicales et politiques.
De son côté, Force Ouvrière, du fait de son indépendance, n’affiche ni faveur ni proximité envers quelque parti politique que ce soit. On comprend donc mieux comment, avec des valeurs pourtant fondamentalement incompatibles avec l’extrême droite, Force Ouvrière se retrouve parfois citée par des sympathisants frontistes interrogés téléphoniquement sur leurs proximités syndicales, si tant est qu’ils se sentent proche d’un syndicat.
Notre indépendance
Certains reprochent alors à Force Ouvrière de se cacher derrière la Charte d’Amiens pour ne pas prendre position contre le Front National. Pourtant, l’exigence d’indépendance vis-à-vis du politique que pose ce texte fondateur du syndicalisme français est l’unique garantie, pour tous nos adhérents et militants, pour tous ceux qui votent FO, que nos revendications et notre signature ne font l’objet d’aucune collusion, d’aucune entente avec un parti et sont ainsi totalement affranchies du jeu politicien faisant rage entre ces derniers.
En clair, les positions de FO ne seront jamais mises en sourdine sous prétexte que ce seraient des amis qui tiennent le manche. Nous représentons les travailleurs, uniquement les travailleurs, et nous nous imposons de le faire sérieusement. Et pour s’assurer de cela, le règlement de Force Ouvrière va jusqu’à interdire, aux membres du Bureau Confédéral et de la Commission Exécutive, tout cumul de responsabilités politiques et syndicales. C’est une question de potentiel conflit d’intérêts entre mandats, et outrepasser cette règle est synonyme de démission. De même, aucun adhérent FO ne peut se présenter à une élection politique en utilisant le sigle FO. Cette indépendance peut amener des électeurs de tout bord à voter FO aux élections professionnelles lorsqu’ils ne s’abstiennent pas. Et c’est d’ailleurs l’ensemble du mouvement syndical européen qui est confronté à une augmentation du vote extrême droite parmi les sympathisants, comme le connait l’ensemble de la société aujourd’hui, et le milieu travailleur, dans les zones à taux de chômage élevé, en particulier.
L’indépendance : défendre les revendications des travailleurs en toutes circonstances, avoir les mains libres et éviter toute récupération L’extrême droite gagne du terrain électoral. Sa progression montre ainsi l’incapacité croissante des partis dits « classiques » à convaincre les électeurs, voire leurs partisans.
C’est dans ce contexte que plusieurs organisations syndicales autre que FO se sont mobilisées le 5 juin, pour barrer la route à l’extrême droite. Ces syndicats viennent ainsi en renfort de partis politiques qui, en refusant d’écouter et d’entendre les travailleurs, se sont volontairement coupés d’une source d’expression et de représentation du monde salarié. C’est cet isolement, cette fracture, cette déroute idéologique, qui constitue aujourd’hui le principal terreau de l’extrême droite.
Dans ce climat préoccupant, Force Ouvrière refuse d’entrer dans un jeu de communication qui espère régler la question par un simple affichage de bonnes intentions. Le débat politique meure aujourd’hui de ce double-discours permanent : entre le projet vendu et la réalité des décisions politiques, entre la justification de ces décisions et leurs conséquences.
Il ne sert à rien de sermonner les électeurs tentés par le Front National. S’ils sont un quart à l’être, c’est parce qu’aujourd’hui le Front National fait campagne sur des sujets comme le pouvoir d’achat, les conditions de travail, l’emploi et la laïcité pour séduire au-delà de sa base traditionnellement portée sur l’identité nationale et l’immigration. Et si cela fonctionne, c’est que les partis « classiques » n’incarnent plus ces préoccupations, ces idées de progrès social, et surtout n’arrivent plus à convaincre de leur capacité à agir sur ces sujets. Et c’est parce qu’il y a crise, que les gouvernements apparaissent comme impuissants, que les inégalités se développent et que l’austérité est mise en place, que les mouvements de rejet de l’autre progressent.
C’est là que l’action – en toute indépendance – de Force Ouvrière prend tout son sens : incarner encore et toujours, sans blablas, les valeurs de solidarité, de liberté, d’égalité et de laïcité. Donner de la consistance à la lutte contre le racisme et toutes les discriminations en portant des revendications universelles, en revendiquant l’augmentation du Smic et du pouvoir d’achat en général, l’amélioration des conditions de travail, l’égalité entre les hommes et les femmes et la liberté de chacun d’aller vivre où il le souhaite, et d’y trouver un emploi de qualité, dans des conditions décentes, sans restrictions ni quotas. Ce qui implique de lutter contre la politique économique et sociale suivie, tant au plan national qu’européen.
Intérêt général et progrès social contre langue de bois
À l’inverse, nombre de partis politiques, en perte de militants, préfèrent mépriser les citoyens trois fois : une première fois en considérant que des slogans suffisent à convaincre, une seconde en poursuivant des politiques contre l’avis de leurs électeurs et une dernière en tentant de se défendre par l’agitation de la menace « Front National ».
Il est au contraire aujourd’hui important que le gouvernement prenne ses responsabilités et accepte d’entendre, enfin, une population qui travaille toujours plus pour un pouvoir d’achat qui ne cesse de diminuer, et qui assiste au sacrifice de ses conditions de travail et d’emploi pour satisfaire la compétitivité-coût et les marchés financiers. Une croissance faible signifie que le pays a produit autant de richesses que l’année précé- dente. S’il y a dans ce contexte une augmentation du chômage et une baisse des salaires, cela veut simplement dire que les bénéfices sont de moins en moins bien répartis. C’est en s’attaquant à cela que le gouvernement regagnera la confiance des français et éloignera l’extrême droite d’une possible victoire.
Pour conclure donc, FO Jeunes réaffirme avec vigueur que les valeurs qui fondent le syndicalisme Force Ouvrière sont radicalement incompatibles avec l’idéologie de rejet de l’autre. Et FO Jeunes met au défi quiconque de trouver une revendication FO qui relèverait de cette idéologie !