[Théâtre] Un démocrate : le grand manipulateur

La propagande est à la démocratie ce que la violence est aux régimes totalitaires écrivait Noam Chomsky cité par Julie Timmerman, à qui l’on doit l’écriture et la mise en scène de la pièce Un démocrate. Cette dernière retrace la vie d’Edward Louis James Bernays (1891-1995). Débutant d’abord comme journaliste, il participe à l’action de la fameuse commission Creel chargée de retourner l’opinion publique américaine hostile à l’engament des États-Unis dans la Première Guerre mondiale. Bernays devient ensuite un publicitaire efficace qui passa de la promotion d’artistes et de sculptures en savon aux relations publiques à haut niveau. À très haut niveau. Il gomme l’image austère du président Coleridge et participe à la préparation d’un coup d’état au Guatemala. En 1928, il publie Propaganda, ouvrage de référence. Neveu de Freud, Bernays pousse un peu plus loin les réflexions de Maurice Joly (1829-1878) et de Gustave Le Bon (1841-1931) sur la psychologie des foules et des individus, trouvant écho jusque chez les managers d’entreprises d’aujourd’hui.

Idiomécanic théâtre

On y chante et on y danse dans cette pièce dont le sujet pourrait paraître austère. On entend les chose sur scène mieux qu’ailleurs, souligne Julie Timmerman, dont la compagnie, Idiomécanic Théâtre, a toujours dans ses thèmes de création la place de l’individu dans la société, comment il est manipulé, aliéné et comment il tente de se libérer. Pour cette comédienne, auteur et metteur en scène, ce spectacle prétend participer à la révolution des choses. Il est ouvertement à charge contre Bernays et son héritage. Les spins doctors et autres manipulateurs d’opinions doivent beaucoup à ce dernier. Les démocraties, elles, en ont souffert.