Timbre postal rouge : sa disparition questionne l’égalité entre usagers

InFO militante par Valérie Forgeront, L’inFO militante

© Arnaud HEBERT/REA

Il était le symbole du courrier prioritaire livré le lendemain. Avec la fin du timbre rouge au 1er janvier 2023, le facteur risque de sonner moins souvent...

À partir du 1er janvier prochain, pour un courrier livrable à J+1, il vous faudra un ordinateur, aller sur le site Internet de La Poste, créer un compte, télécharger votre lettre (ou l’écrire en ligne) et payer 1,49 euro, minimum. Voilà l’e-lettre rouge. Les services postaux, qui promettent la confidentialité du système, imprimeront votre lettre et la mettront sous enveloppe. Cette innovation menace d’exclure une partie de la population peu à l’aise avec le numérique ou n’y ayant pas accès, s’indigne Jean-Philippe Lacout, coordonnateur national de la branche courrier-colis pour FO-Com La Poste. Et de rappeler qu’actuellement, les lettres recommandées dématérialisées représentent moins de 5 % de la totalité de ce type de courrier. La fin du timbre rouge imprimé (à 1,46 euro, son tarif ayant plus que doublé en dix ans) fait craindre plus largement  la fin de l’acheminement du courrier à J+1, ainsi que l’annonce de nouvelles restructurations à La Poste, avec réduction de voilure, autant dire d’emplois. On risque de perdre 40 % à 50 % de l’effectif des facteurs, soit autour de 20 000, dont des contrats précaires. Par ailleurs,  la pyramide des âges à La Poste est élevée, avec des agents autour de 53 à 60 ans... Et lorsque l’on sait que les départs en retraite ne sont pas remplacés...

 L’indispensable rôle de l’État

Alors que La Poste cherche à diversifier ses activités face à la baisse de volume de l’activité courrier-colis (-7,3%, chiffres du premier semestre 2022), cela ne peut se faire par une rupture d’égalité dans le traitement des usagers quant à leur accès au service universel du courrier, lequel relève d’une mission de service public, insiste la secrétaire générale de FO-Com. Sans compter, alerte Christine Besseyre, que moins d’obligation à acheminer à J+1 signifie que le facteur pourrait ne passer qu’un jour sur deux, voire un jour sur trois. Au risque donc d’aggraver encore aussi les conséquences, déjà patentes, de la désertification des services publics sur le territoire. Alors que pour la militante, cette décision de suppression du timbre rouge ne vise pour La Poste qu’à réorganiser le réseau de distribution via des fusions/acquisitions d’établissements, elle rappelle l’indispensable rôle de l’État qui, par ses compensations, doit “ porter ” le service public postal. Au 30 juin 2022, celles-ci étaient, sur six mois, de 152 millions d’euros. Pas suffisamment à l’évidence.

 

Le timbre à J+1 : 173 ans de bons et loyaux services
Le premier timbre préoblitéré voit le jour en France le 1er janvier 1849, après un vote de l’Assemblée le 24 août 1848. C’est le Cérès noir, à 20 centimes, à l’image de la déesse antique de l’agriculture, de la fécondité et des moissons, rappelle La Poste, évoquant cette petite vignette devenue un objet incontournable du quotidien. Créé par le graveur de la Monnaie de Paris Jacques-Jean Barre, le Cérès introduit le système du port payé et non plus d’un port dû à réception d’un courrier. Le timbre rouge naît lui aussi en 1849, en avril. Il est dans un premier temps destiné à la livraison à J+1 des colis les plus lourds (puis au courrier prioritaire à partir de 1969). Il est alors couleur vermillon et coûte un franc. Après cent soixante-treize ans de service, il tire sa révérence, dans sa version imprimée, au profit, dès le 1er janvier 2023, du système numérique de « l’e-lettre rouge ». Encore faut-il avoir un ordinateur...

Valérie Forgeront Journaliste à L’inFO militante

L’inFO militante Le bimensuel de la Confédération

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