Travail du dimanche : Castorama condamnée pour avoir ouvert illégalement ses magasins

InFO militante par Chloé Bouvier, L’inFO militante

© Laurent GRANDGUILLOT/REA

Le tribunal de Lille a condamné Castorama à verser des dommages et intérêts au titre du préjudice causé à l’intérêt collectif de la profession. Après le confinement du printemps 2020, l’enseigne avait ouvert ses magasins hors Île-de-France tout le week-end, sans respecter l’accord d’entreprises qui limitait ces ouvertures à 5 dimanches par an.

Après avoir promis, puis menti, Castorama est désormais punie se réjouit la section FO du Commerce et VRP de la FEC-FO. La condamnation de l’enseigne du bricolage mi-janvier par le tribunal de Lille résonne comme une victoire pour Force Ouvrière qui s’est toujours opposée au travail le dimanche. Au printemps 2020, Castorama avait décidé d’ouvrir la totalité de ses magasins le dimanche, arguant de la nécessité d’être concurrentiel dans un contexte post-confinement.

Cette décision d’une ouverture étendue, souligne le syndicat FO de Castorama, entrait en contradiction avec l’accord d’entreprise signée en 2014 sur les contreparties octroyées dans le cadre du travail dominical. Cet accord limitait les ouvertures permanentes aux magasins franciliens et à la zone commerciale Plan-de-Campagne (Bouches-du-Rhône) et, dans les autres, limitait les ouvertures exceptionnelles à 5 dimanches par an.

Une série de premières victoires judiciaires

À l’initiative de FO, cette question a été portée devant la justice en avril 2021, retrace Jean-Paul Gathier, le délégué syndical central FO au sein de l’entreprise. Une première victoire puisque Castorama avait dû fermer le dimanche son magasin de Bondues, sous peine d’une astreinte de 25 000 euros par ouverture dominicale. Ni une, ni deux, l’enseigne a dénoncé son accord d’entreprise de 2014 mais sans réussir à le négocier. Elle a alors sorti de son chapeau un nouvel accord, signé par une seule organisation syndicale. Ce texte prévoit notamment une majoration de 150 % pour travail le dimanche et une demi-journée de récupération pour 10 dimanches travaillés !, souligne le délégué syndical. Pour faire accepter ce nouvel accord, l’entreprise a opté pour un référendum en faisant pression sur les employés.

Qu’importe, le tribunal de Lille a condamné Castorama à verser des dommages et intérêts  au titre du préjudice causé à l’intérêt collectif de la profession pour ouverture illégale de ses magasins le dimanche en 2020. Malgré le nouvel accord passé en douce, le texte initial, même une fois dénoncé, courrait sur 15 mois. Le calendrier judiciaire est très long, mais nous continuerons. Nous allons attaquer en justice le référendum de l’entreprise, poursuit Jean-Paul Gathier.

Aucune preuve du caractère bénéfique de ces ouvertures

Plus de sept années après l’autorisation du travail dominical, nous attendons toujours la preuve du caractère bénéfique de ces ouvertures pour les salariés et l’entreprise, indique Audrey Rosellini, secrétaire adjointe de la section fédérale du Commerce & VRP. Concernant le travail du dimanche le patronat prenait pour argument la création d’emplois, l’enseigne ayant promis de pérenniser 250 CDD équivalents temps-plein et de transformer ces postes en CDI, d’ici fin janvier 2022. Or, Castorama a présenté à son CSE central des prévisions d’emploi notifiant une baisse des effectifs en 2022 et 2023. Il n’y a pas de nouvelles embauches avec l’ouverture des magasins le dimanche. De fait, les effectifs sont lissés sur 7 jours au lieu de 6 et cela impacte aussi la charge de travail, explique la militante.

Le travail dominical a également un impact sur les salaires. Pas sur les salariés qui travaillent le dimanche, puisque leurs salaires sont majorés. Mais cette majoration est prise sur l’enveloppe des augmentations. Or, cette enveloppe ne grossissant pas, les augmentations salariales sont moindres, souligne Jean-Paul Gathier. Lorsque l’on gagne un Smic par mois, travailler un dimanche permet d’obtenir 10 % de salaire en plus, ce n’est pas rien. Toutefois, le travail du dimanche ne sert pas l’intérêt collectif puisque les salaires n’évolueront pas ou trop peu. Et lorsqu’un salarié est volontaire, il demeure soumis à la volonté du patron qui sélectionne ceux qui travailleront le dimanche, s’il y a plus de volontaire que de postes nécessaires. Pour Force Ouvrière, le combat concernant le travail du dimanche demeure. L’objectif du patronat est de faire du dimanche un jour comme les autres constate Audrey Rosellini, notant avec humour : Lorsque l’on interroge ceux qui dans l’opinion se disent en faveur de cette mesure, ils ne se voient jamais travailler le dimanche....

Chloé Bouvier

L’inFO militante Le bimensuel de la Confédération

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