(Extraits de l’interview d’Yves Veyrier sur LCI le 30 novembre dans l’émission « Ça donne le ton », présentée par Marie-Aline Meliyi)
Marie-Aline Meliyi : Que répondez-vous à Bruno Lemaire, qui estime que la réforme des retraites est indispensable pour compenser les milliards d’euros dépensés à cause de la crise du Covid-19 ?
Yves Veyrier : C’est choquant car, encore une fois, le sentiment est qu’on veut faire payer le coût des dispositifs de la crise sanitaire aux salariés, sur leurs droits à la retraite. Et aux générations à venir, pour le coup ! On nous dit
c’est dur d’avoir 20 ans en ce moment, mais en ajoutant c’est vous qui paierez plus tard parce que vos droits à la retraite seront plus difficiles à acquérir et seront de moins bon niveau… Nous n’avons cessé de réclamer que les aides publiques soient mises sous condition, qu’elles soient contrôlées et quand les conditions ne sont pas respectées, que soient sanctionnées les entreprises fautives. L’un d’entre vous a dit :On risque de faire venir enMais c’est la réforme systémique qui faisait venir en « loucedé » le recul de l’âge pour bénéficier d’une retraite correcte. Avec cet âge pivot, qui devait passer de 63 ans à 64, puis 65 ans. Alors que l’on nous avait assuré que cette réforme systémique n’avait pour objectif ni de faire des économies, ni de toucher à l’âge !loucedéla réforme systémique.
M.-A. M. : Oui, mais Bruno Lemaire affiche la couleur :
Est-ce qu’on a le choix ?
Y. V. : Un des procès que nous faisions à ce projet de réforme systémique était que l’État aurait le dernier mot sur le pilotage du système de retraite. Il a déjà mis la main sur la Sécurité sociale en matière de santé. Il veut mettre la main sur l’Assurance chômage. Il voudrait mettre la main sur Action Logement. Les gouvernements, de plus en plus, se rabattent sur la gestion de la protection sociale. Or Il faut agir sur une économie qui produise de l’emploi, qui garantisse un emploi aux jeunes dès l’entrée dans la vie active jusqu’au moment du départ à la retraite. Avec de véritables emplois ! Les emplois de la deuxième ligne, par exemple, mériteraient d’être revalorisés, d’être mis au centre de la relance économique. Si on parvenait à faire en sorte que tout un chacun ait droit à un véritable emploi, le problème du financement des régimes de sécurité sociale, et des retraites en particulier, se résoudrait grandement.
M.-A. M. : Quand vous entendez cette cacophonie au sein du gouvernement, Élisabeth Borne qui tient un discours et Bruno Lemaire un autre, vous vous dites quoi ?
Y. V. : Je l’avais dit au mois de juillet, au Premier ministre, sur les retraites notre détermination est intacte. Si ce projet devait revenir à l’ordre du jour, il redonnerait lieu à un conflit social. Il faut qu’à un moment donné la sagesse, la raison l’emportent et que le président de la République, le gouvernement considèrent qu’effectivement la situation créée par la crise sanitaire, le fait que pendant deux ans et demi de concertations sur ce dossier ils n’aient su ni expliquer ni a fortiori convaincre, les amènent à mettre définitivement de côté ce projet et à faire en sorte qu’on revienne à une capacité de discuter sur les questions sociales autrement que dans le conflit.