Au fil de divers rapports ces dernières années (Igas, Sénat, Cour des comptes…), le recours par la sphère publique aux partenariats public-privé (PPP) est de plus en plus critiqué. Le système PPP, qui consiste à faire financer, construire, entretenir et exploiter un ouvrage public par un opérateur privé, est mis en cause, notamment pour son coût. Si les pouvoirs publics cherchent via les PPP à alléger le poids de leurs investissements, les loyers élevés qu’ils doivent verser pendant des années à l’opérateur privé constituent un gouffre financier. Un récent rapport de la Cour des comptes européenne (CCE, reconnue institution de l’Union européenne-UE depuis 1993) éreinte les PPP cofinancés par l’Europe. Ce rapport a étudié douze des 84 PPP (en France, Grèce, Espagne, Irlande…) cofinancés entre 2000 et 2014. L’UE a participé à hauteur de 5,6 milliards d’euros à ces 84 PPP dont le montant total atteint 29,2 milliards d’euros. Pour la Cour, ces contrats permettent d’alléger les strictes contraintes budgétaires auxquelles sont soumises les dépenses publiques
dans l’Union. Depuis les années 1990, quelque 1 749 PPP ont été financés dans l’UE, cela pour un montant total de 336 milliards d’euros. Beaucoup de ces contrats portent sur la construction de routes ou des techniques d’information et communication (TIC).
Un système aux loyers exorbitants
La Commission européenne encourage depuis quelques années le recours aux PPP
, remarque la Cour qui de son côté les étrille. Les PPP présentent de multiples insuffisances et des avantages limités
, et ils ne peuvent être considérés comme une option économiquement viable pour la fourniture d’infrastructures publiques
. Elle juge que sur le montant total des douze PPP étudiés, 1,5 milliard d’euros (dont 422 millions apportés par l’UE) ont été dépensés de manière inefficiente et inefficace
. Dans la plupart des cas, le PPP est une solution de facilité dangereuse pour l’intérêt public
puisque les conditions de concurrence équitable entre les PPP et les procédures de marché traditionnelles
ne sont pas réalisées. Passations de marchés PPP très longues (parfois des années), manque d’efficacité des analyses initiales des besoins (ce qui accroît les retards de construction), scénarios trop optimistes
à travers une surévaluation des prévisions d’utilisation des infrastructures (jusqu’à 69 % pour les TIC et jusqu’à 35 % pour les autoroutes). Tout cela augmente le coût des PPP et conduit à des loyers prohibitifs, constate la Cour.
La répartition des risques entre partenaires est souvent
inappropriée, incohérente et inefficace, cela au détriment du partenaire public, note la CCE. Quant à la
rémunération élevéedu risque pris par l’opérateur privé, elle ne
reflète pas toujoursla réalité de ce risque. La Grèce, qui a reçu ces dernières années 59 % des fonds européens PPP, a vu le coût au kilomètre de trois autoroutes construites via des PPP augmenter jusqu’à 69 %.
Dans le même temps, le pays a dû rabattre ses projets PPP, parfois en les réduisant de 55 %. Un état de fait dû
en grande partieà la crise financière, constate la Cour.