La Belle Époque des luttes sociales

Livre par Michel Pourcelot

Un livre retrace l’envers de la Belle Époque, qui, de 1890 à 1914, fut particulièrement marquée par de violents conflits sociaux. Le temps des révoltes, livre d’Anne Steiner, les racontent précisément. Par les mots mais aussi par les... cartes postales, grande nouveauté de l’époque, qui permettait de ne pas passer par les grands canaux de l’information.

Le Temps des révoltes. Une histoire en cartes postales des luttes sociales à la Belle Époque , d’Anne Steiner, publié le 14 octobre 2015 aux éditions L’Échappée. 176 pages, environ 19 euros.

Le Belle Époque, expression datant de 1919, ne le fut pas toujours pour tout le monde. Des dernières années du XIXe jusqu’au début de la Grande Guerre, le sang coula pour obtenir des acquis sociaux régulièrement attaqués de nos jours. Le livre Le temps des révoltes s’attache tout particulièrement à la période 1900-1914 qui vit une explosion des conflits sociaux : 830 grèves en 1905 et 1309 l’année suivante, puis 1 000 à 1 500 grèves par an jusqu’en 1913, selon l’auteur, Anne Steiner, maÎtre de conférences en sociologie à l’université de Paris-Nanterre. L’ouvrage, particulièrement précis et documenté, retrace en détails les évènements, qui se déroulèrent entre autres en 1905 à Limoges et en 1907 à Nantes et à Raon-L’Étape, ainsi que les grèves des cheminots de 1910 et les soulèvements des viticulteurs languedociens (1907) et champenois (1911). Parmi les revendications et motifs de grève : la baisse des salaires par des employeurs invoquant celle de la production ou une concurrence accrue, les licenciements pour manque de productivité, l’arbitraire de certains contremaîtres, le harcèlement sexuel envers les femmes, le temps de travail, la reconnaissance syndicale et la dignité. Ce qui ne manque pas d’écho aujourd’hui. Les radicaux et socialistes modérés proches des milieux industriels n’hésitèrent pas à répliquer par une violente répression en faisant donner la troupe. Clémenceau versus Jaurès. L’originalité du livre d’Anne Steiner tient aussi dans le fait qu’il soit abondamment illustré par des... cartes postales. Elles étaient alors un moyen de communication en pleine explosion. À peine prises, les photos étaient éditées en cartes postales et envoyées à un moment où la presse n’utilisait que chichement des clichés plutôt de mauvaise qualité. Ainsi existent des milliers de cartes postales, témoignant des conflits sociaux de l’époque : charges de l’armée, dégâts, victimes, barricades,, ou les soupes de soutien. Une utilisation des nouvelles technologies, doublant les médias traditionnels. Un peu comme les réseaux sociaux d’aujourd’hui...


Michel Pourcelot Journaliste à L’inFO militante