Nouvelle Aquitaine : les agents de la grande Région en grève

Service Public par Valérie Forgeront

Manifestation à Bordeaux, le 18 décembre 2017, devant le Conseil Régional.

Près de 400 agents de la région Nouvelle Aquitaine se sont rassemblés devant le conseil régional à Bordeaux ce lundi 18 décembre date d’une assemblée plénière de la collectivité territoriale, laquelle devait adopter un certain nombre de mesures. Parmi celles-ci, certaines relatives au temps de travail, aux régimes indemnitaires ou encore à l’action sociale. Appelés à la grève par six syndicats dont FO, les agents, dont ceux des lycées, ont effectué de nombreux débrayages. Un rassemblement réunissant plus d’une centaine de personnels a eu lieu par ailleurs à Limoges.

Depuis près d’un an, les 8 500 agents de la région géante Nouvelle Aquitaine (regroupant depuis la réforme territoriale du 1er janvier 2016 les ex-régions Aquitaine, Limousin et Poitou-Charentes) demandent que l’administration de la nouvelle collectivité territoriale entende leurs revendications. En vain.

Ce lundi 18 décembre, près de 400 agents de la région se sont rassemblés à Bordeaux devant le conseil régional à l’initiative de six syndicats dont FO. Appelés à la grève, les agents, dont ceux des lycées, ont effectué des débrayages. Un rassemblement réunissant plus d’une centaine d’agents a eu lieu aussi à Limoges.

Ce même jour se tenait une assemblée plénière de la collectivité territoriale régionale laquelle devait se prononcer sur plusieurs mesures dont celle sur temps de travail mais aussi les régimes indemnitaires ou encore l’action sociale.

Bilan de la fusion : la déception

Les fonctionnaires territoriaux de Nouvelle Aquitaine demandent ainsi un alignement par le haut des régimes indemnitaires afin d’aboutir à une véritable égalité entre agents des trois anciens sites. Ils demandent aussi le maintien des acquis en matière de jours de congé ainsi que le libre choix des amplitudes hebdomadaires de travail. Enfin ils demandent le déploiement de prestations sociales au moins équivalentes à celles qui existaient dans chacune des anciennes régions.

Or sur ces différents dossiers, l’harmonisation par le haut demandée par les agents est loin d’être acquise. Ce qui avait été semble-t-il obtenu après quatorze mois de négociations a été remis en question indique Christophe Pelé Trésorier su syndicat FO des personnels de l’ancienne région Aquitaine.

Signe de l’ambiance tendue entre l’administration et les syndicats, ces derniers avaient demandé à être reçus ce 18 décembre en amont du vote de l’Assemblée sur les dossiers temps de travail, action sociale et régime indemnitaire… Les syndicats se sont heurtés à un refus. Une délégation n’a été reçue qu’après le vote de l’assemblée territoriale.

Malgré cette journée d’actions succédant d’ailleurs à d’autres ces derniers mois, l’Assemblée a donc adopté des mesures qui sont loin de satisfaire les agents. Dans le document expliquant le bien-fondé de leurs revendications, les six syndicats dont FO résument la situation sociale au sein de la grande région. Bilan de deux années depuis la fusion [de régions, Ndlr] en Région Nouvelle Aquitaine : désintérêt [de l’administration territoriale, Ndlr] pour la qualité du service public rendu, gaspillage, indifférence, reniement des promesses, créations d’inégalités salariales et maltraitance.

Du temps de travail fantôme

En matière de temps de travail, les agents de la grande région demandent que toutes les heures travaillées au-delà des obligations légales soient comptées et payées ou récupérées. Tel n’est pas le cas actuellement.

Pour 2016 on a comptabilisé 85 000 heures non payées ou non récupérées dans l’ex-région Aquitaine. Environ 200 000 heures sur l’ensemble de la région Nouvelle Aquitaine indique Christophe Pelé. Ces heures –en quelques sortes des heures supplémentaires– analysent les syndicats relèvent des heures comptées (par pointage) mais aussi des « heures censurées » (heures supprimées par le logiciel de comptage) ou encore des « heures fantômes ».

Ces dernières sont non reconnues s’insurgent les syndicats qui expliquent que la plupart des collègues des sièges se retrouvent régulièrement confrontés à la nécessité de répondre à des appels ou des courriels le soir, la nuit, pendant les jours de temps partiels, les week-ends et les congés. Ces heures-là sont totalement ignorées.

L’action sociale réduite de moitié

Quant aux heures « censurées » par le logiciel de comptage, soit toutes les heures qui se situent au-delà des limites légales elles sont particulièrement nombreuses depuis la fusion. A travers un exemple, les syndicats soulignent ainsi les abus. Un agent de Limoges qui se rend à Bordeaux pour une réunion ou plusieurs réunions quitte Limoges à 7h, déjeune pendant 45 minutes et rentre à 21h. L’amplitude de sa journée est de 14 heures. Sa durée réelle de travail est de 13h15. Sur le logiciel cependant, la durée de travail validée et donc comptée est de seulement 10h. De nombreux agents se voient ainsi dépouillés d’heures de travail réalisées.

Malgré les revendications des agents, la collectivité a opté pour des mesures sur le temps de travail qui induiront fatalement des suppressions de jours de congé s’insurgent les personnels. Ils évaluent ces suppressions à cinq jours voire dix jours pour certains personnels de lycées.

Au plan de l’Action sociale ? Alors que les syndicats demandaient le maintien des prestations actuelles et soulignaient la qualité importante de la politique sociale de l’ex-région Limousin, la région Nouvelle Aquitaine semble s’orienter vers une autre politique et argue en quelque sorte de la nécessité de réaliser des économies pour répondre à l’augmentation du régime indemnitaire. Ainsi, s’indignent les syndicats la collectivité versera à la nouvelle structure chargée de mettre en œuvre la politique d’action sociale [dans la grande région, Ndlr] une subvention moitié moindre que celle qui était versée en Limousin.

Régime indemnitaire : les agents y perdront des plumes

En matière de régime indemnitaire justement et contrairement à ses affirmations les décisions de la nouvelle région ne sont pas si généreuses que là. Loin s’en faut. Les syndicats rappellent qu’ils demandaient depuis le début [lors de la fusion des trois régions, Ndlr] l’alignement des régimes indemnitaires sur le plus haut montant qui peut, selon les grades, prendre son origine dans chacune des trois anciennes régions.

Pour les syndicats, l’alignement par le haut est le seul moyen d’éviter de créer et perpétuer pendant de longues années des inégalités profondes consistant à verser un salaire différent pour un même travail selon le lieu géographique du poste de l’agent. La Nouvelle Aquitaine n’a pas répondu à ces revendications. L’enveloppe prévue pour les revalorisations indemnitaires s’élève à 13,8 millions mais sur quatre ans indique Christophe Pelé précisant que la collectivité territoriale prévoit par ailleurs de réaliser des économies à hauteur de deux millions par an. Cela va se traduire par des suppressions de postes notamment regrette-t-il.

Les régimes indemnitaires ne seront pas alignés vers le haut. Ainsi Par le rapprochement des filières administratives et techniques en catégorie A, seuls les ingénieurs seront gagnants. Les agents des autres grades perdront jusqu’à 40% du régime indemnitaire existant.

Dans la seule filière administrative et pour les agents de catégorie A, B et C, l’alignement sur le régime indemnitaire de l’Aquitaine créera jusqu’à 28% d’écart avec celui du Poitou-Charentes qui était plus avantageux. Pour certains agents de la filière technique, l’alignement du régime indemnitaire sur l’Aquitaine signifie qu’ils perdront des dizaines d’euros par mois par rapport à ce qui avait été promis initialement par l’administration de la Région ou par rapport à ce qu’ils percevaient dans leur région d’origine… De quoi nourrir la contestation des agents de Nouvelle Aquitaine.

Valérie Forgeront Journaliste à L’inFO militante