Réforme des retraites dans les IEG : FO à l’offensive pour que le décret s’écrive avec les travailleurs et leurs représentants

Retraites par Elie Hiesse, FNEM FO, L’inFO militante

Fred MARVAUX/REA

Par lettre ministérielle en date du 20 juillet, l’exécutif a accédé à l’une des revendications FO sur l’application de la réforme des retraites dans les industries électriques et gazières. A cette date, autrement dit à six semaines de la mise en extinction du régime spécial du secteur, le décret concernant les IEG n’était toujours pas paru.

Pas question de laisser les pouvoirs publics et les employeurs décider seuls du sort des travailleurs des industries électriques et gazières (IEG) ! Depuis la transmission, le 16 juin, du projet de décret concernant l’application de la réforme des retraites dans le secteur, FO Energie et Mines, si elle continue de contester avec détermination cette réforme brutale et infondée, que ce soient les mesures d’âge ou la suppression du régime spécial, est à la manœuvre pour que le décret s’écrive avec les travailleurs et leurs représentants. Il faut sauvegarder les intérêts des personnels actuels et futurs des IEG, ainsi ceux des pensionnés actuels et futurs, ainsi que leurs ayants-droits, en limitant les effets de cette loi, commente Alain André, secrétaire général de la FNEM FO.

Ses revendications, la fédération FO les a successivement portées au conseil d’administration de la Caisse nationale des IEG (CNIEG) et, sous forme d’amendements, au Conseil supérieur de l’Energie (CSE). Le projet de décret y a été soumis au vote, respectivement les 4 et 6 juillet. Par deux fois, il a été rejeté. Un coup de semonce pour l’exécutif, même si ces avis sont uniquement consultatifs.

Le maintien des conditions d’affiliation au régime spécial précisé

Avoir imposé au CSE le débat sur les amendements syndicaux n’a pas été vain. L’exécutif vient d’accéder – partiellement - à une première revendication essentielle, portée par FO Energie et Mines. Laquelle exigeait depuis des semaines, avec les trois autres fédérations syndicales du secteur, que toute affiliation à la CNIEG avant le 1er septembre 2023 garantisse le retour au régime spécial, quelles que soient les périodes de suspension ou de transfert du contrat de travail connus, au cours de leur carrière, par les salariés statutaires.

Sur le sujet, le moins que l’on puisse dire, est que l’article 1er de la loi pose problème, stipulant que le régime spécial de retraites est applicable aux salariés statutaires embauchés avant le 1er septembre 2023, dès lors qu’ils remplissent, sans aucune interruption à compter de cette date, les conditions d’affiliation à ce régime. Ce qui a eu pour effet, depuis la promulgation de la loi le 14 avril 2023, de plonger dans l’angoisse les salariés dont le contrat de travail est suspendu (dans le cadre d’un détachement dans une entreprise hors IEG ou ne relevant pas du statut, ou dans le cadre de congé parental d’éducation, de congé de proche aidant, de congé création d’entreprise, ...) ou dont le contrat a été transféré, lors d’une mobilité dans une filiale.

Face aux difficultés d’interprétation de cet article, certains salariés en détachement dans une entreprise hors IEG ont préféré mettre fin à leur situation, de peur de perdre le bénéfice du régime spécial, puisque leur réintégration dans leur entreprise d’origine était prévue après le 1er septembre 2023, déplore Sandrine Tellier, secrétaire fédérale chargée des retraites.

Par lettre ministérielle, en date du 20 juillet, l’exécutif apporte enfin des clarifications. Les ministères du Travail et de la Transition énergétique y garantissent, aux salariés ayant cessé ou suspendu leur activité dans une entreprise des IEG avant le 1er septembre 2023, le maintien de l’affiliation au régime spécial de retraite à une condition : que cette cessation ou suspension d’activité soit intervenue au plus tôt à compter du 1er septembre 2013. Autrement dit, cette cessation ou suspension d’activité ne doit pas avoir une durée supérieure à 10 ans.

Pour les salariés dont le contrat de travail a été rompu, ou sera encore suspendu après le 1er septembre 2023, le gouvernement précisera prochainement les règles d’affiliation qui s’appliquent, indique la lettre. Elle précise toutefois, en ce qui concerne les salariés dont le contrat de travail est rompu, que le maintien d’affiliation n’est possible qu’en cas de reprise d’une activité relevant du statut, dans un délai maximum d’un mois (pour les salariés ayant démissionné ou recouru à une rupture conventionnelle) ou d’un an, pour ceux ayant été licenciés.

Ces clarifications des règles, ajoute la lettre ministérielle, seront portées par le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2024.

Augmentation attendue de la période de convergence

Autre revendication à laquelle les pouvoirs publics accéderaient : une extension de la période de convergence avec le régime général concernant la réforme Touraine. Cela a été confirmé, par oral, lors des échanges avec le ministère de la Transition : les pouvoirs publics consentiraient, en ce qui concerne donc l’augmentation de la durée d’assurance requise pour une retraite à taux plein, de passer la période de convergence avec le régime général de 4 ans (selon le projet de décret actuel IEG) à 5 ans. Reste qu’aucune lettre ministérielle n’appuie, pour l’instant, officiellement le propos. La revendication syndicale sur le calendrier de mise en œuvre de la réforme est plus large : reporter au 1er janvier 2028 (et non au 1er janvier 2025 comme prévu pour les IEG par le projet de décret) le report à 64 ans de l’âge légal de départ.

D’autres revendications essentielles, notamment sur le régime spécial de retraite des IEG, restent pour l’instant sans réponse. A commencer par la question cruciale du financement des droits pour les pensionnés, actuels et futurs. Puisque la réforme acte la mise en extinction du régime spécial au 1er septembre 2023, les nouveaux embauchés (et leurs employeurs) ne cotiseront plus à partir de cette date, pour le risque vieillesse, à la CNIEG mais au régime général (CNAV et Agirc-Arrco). Conséquence, cette diminution du nombre de cotisants impactera l’équilibre de la caisse. FO Energie et Mines exige donc de l’exécutif des garanties pour un financement pérenne du régime spécial jusqu’au dernier bénéficiaire, ayants-droits compris. Mais l’exécutif persiste à renvoyer la question du financement du régime spécial au projet de loi de financement de la sécurité sociale 2024 (PLFSS).

Les employeurs interpellés

Auprès des employeurs aussi, pour les sujets relevant de leurs compétences et de la négociation ou concertation de branche, FO Energie et Mines a porté ses revendications. Ainsi, concernant les annulations des demandes de départ en retraite faites avant la réforme, les employeurs ont accepté, mi-juin, le principe d’un droit de rétractation.

Par contre, s’agissant de l’embauche des alternants terminant leurs études en 2023 (embauche que FO réclame effective avant l’entrée en vigueur de la réforme le 1er septembre, afin qu’ils bénéficient du régime spécial de retraite des IEG), les employeurs restent partagés. La plupart s’en remettent à leur engagement de ne pas retarder les embauches après le 1er septembre 2023. Un engagement sans caractère obligatoire...

Elie Hiesse Journaliste à L’inFO militante

FNEM FO Énergie et Mines

L’inFO militante Le bimensuel de la Confédération