Suez-Veolia : FO vigilante sur l’application effective des engagements sociaux

InFO militante par Elie Hiesse, L’inFO militante

© Laurent GRANDGUILLOT/REA

Le 30 juin, l’assemblée générale du groupe Suez doit confirmer le rapprochement avec Veolia, son rival de toujours sur les marchés de l’eau et des déchets. Elle marque l’entrée dans une période de transition pour les 80 000 salariés du groupe. D’ici la fin de l’année, 45 000 doivent intégrer Veolia et 35 000 rejoindre le Nouveau Suez, recentré sur la France.

Plus que quelques jours. Le 30 juin, l’assemblée générale du groupe Suez, qui se tiendra au siège parisien, doit confirmer le rapprochement avec Veolia, son rival de toujours sur les marchés de l’eau et des déchets. Elle marque l’entrée dans une période de transition pour les 80 000 salariés de Suez jusqu’à la finalisation des procédures européennes antitrust, attendues en octobre.

Celle-ci donnera le coup d’envoi de la réalisation effective de l’OPA (offre publique d’achat) de Veolia sur Suez, qui va en absorber environ 60 %, par échange d’actions, et de la cession simultanée des actifs restants au consortium constitué des fonds français Meridiam et américain GIP, de la Caisse des dépôts et consignations (CDC) et de CNP Assurances, pour créer un Nouveau Suez.

D’ici la fin de l’année, 45 000 salariés de Suez (majoritairement dans les entités internationales) rejoindront donc un Veolia augmenté pesant 37 milliards d’euros tandis que 35 000 salariés intégreront le Nouveau Suez, réduit de plus de moitié comparé au groupe initial et recentré pour l’essentiel sur ses activités françaises (dans l’eau municipale et le déchet solide), avec une surface d’environ 7 milliards d’euros de chiffre d’affaires.

Les RPS au maximum

A l’orée de cette transition, l’inquiétude règne parmi les salariés de Suez. Actuellement, nous sommes dans un entre-deux très anxiogène pour les salariés. Les RPS (risques psycho-sociaux) sont au maximum. Les salariés dont les activités sont rachetées par Veolia se demandent comment ils vont être accompagnés dans leur nouveau poste. Les salariés appelés à rester dans le Nouveau Suez s’interrogent sur la pérennité économique de la nouvelle entité. Surtout, il y a tous les salariés dans les fonctions support et transverses, travaillant à la fois pour la France et l’international, qui sont dans la plus complète incertitude. Ils ignorent toujours quel sera demain leur employeur. Et on ne sait toujours pas comment les choix seront faits entre ceux qui iront chez Veolia et ceux qui resteront chez Suez, commente Noui Bourahli, coordinateur FO du groupe Suez, également délégué syndical central FO de Suez Eau France (une filiale de 11 000 salariés où FO est majoritaire).

Dans une lettre adressée le 15 juin aux salariés de Suez, par les patrons acteurs de l’opération, Philippe Camus, actuel directeur général de Suez (qui a annoncé son départ d’ici la fin 2021, NDLR), appelait à la patience, alors que la répartition précise de certaines activités faisait toujours l’objet d’ultimes négociations entre Veolia et le consortium actionnaire du Nouveau Suez. Nous travaillons pour que l’incertitude dure le moins possible et que chacun sache en septembre quel sera son groupe, y assure-t-il. Le patron de Veolia, Antoine Frérot, y affirme lui que chacun aura sa place dans son groupe.

FO appelle à une transition sereine par la nomination d’un directeur général issu de Suez

Alors que se prépare la gouvernance du Nouveau Suez, la volonté d’un des investisseurs, le fonds américain GIP, de nommer, au poste de directeur général, un candidat externe au groupe ajoute à l’inquiétude, explique Noui Bourahli.

Dans l’intérêt de tous les salariés, FO revendique un accompagnement apaisé vers le nouveau Suez. Il passe par la nomination d’un nouveau directeur général issu des équipes internes. Ce sera la marque d’une connaissance de nos métiers, de notre groupe et d’une continuité opérationnelle. Les salariés ont vécu assez de déstabilisations et de difficultés depuis le 30 août 2020, date de l’annonce de l’OPA. La nomination d’un candidat externe serait un très mauvais signal, martèle le militant FO.

FO vigilant sur l’application effective des engagements sociaux

Pour le coordinateur FO du groupe Suez, un directeur général issu du groupe Suez sera un meilleur garant du respect des engagements sociaux pris dans l’accord Veolia-Suez du 14 mai. Après neuf mois de batailles sur tous les fronts entre les deux groupes, cet accord a posé les bases définitives du rapprochement, avec des garanties sociales pour accompagner les transferts des milliers de salariés.

Elles seront officiellement présentées aux différentes instances représentatives du personnel (IRP) à partir de juillet. Nous serons très vigilants sur l’application effective de tous les engagements sociaux, prévient Noui Bourahli.

FO a joué un rôle actif dans les décisions prises sur la garantie d’emploi. Contrairement à d’autres organisations, le syndicat a décidé, en amont de l’accord du 14 mai, de rencontrer les investisseurs du Nouveau Suez afin de revendiquer des lignes rouges protectrices pour les salariés. Un choix pertinent. De fait, le fonds français Meridiam s’est engagé à maintenir l’emploi pendant cinq ans minimum (contre quatre ans initialement annoncés en avril), à compter de la date effective de réalisation de l’OPA, avec préservation des acquis sociaux et de tous les accords d’entreprise. Les futurs salariés du Nouveau Suez ont donc une garantie d’emploi jusqu’à fin 2026.

Garantie d’emploi : un traitement « inéquitable » entre les salariés de l’actuel Suez

Par contre, dans l’accord du 14 mai, Veolia garantit la préservation de l’emploi uniquement pour quatre ans pour les salariés basés en France de l’actuel Suez. Pour les salariés de Suez basés à l’international, la garantie de l’emploi ne porte que sur un an. Nous avons découvert ce traitement inéquitable entre les salariés après l’accord du 14 mai. Il nous a été confirmé, début juin, lors d’une réunion bilatérale avec le DRH groupe de Veolia. Ce n’est pas acceptable, souligne le coordinateur FO du groupe Suez, déterminé à agir pour obtenir un traitement équitable des salariés de Suez.

Parmi les autres engagements sociaux, le fonds français Meridiam, repreneur des actifs de Suez en France, a promis d’ouvrir l’actionnariat aux salariés avec un objectif initial de 3 %, puis jusqu’à 10 % du capital d’ici 7 ans (2028). En outre, il s’est engagé à conserver la nouvelle entité pour 25 ans, et à investir 860 millions d’euros d’ici à 2028.

Enfin, l’accord du 14 mai prévoit un « observatoire de la transition », dans lequel siégeront les syndicats et l’ensemble des parties prenantes. FO, qui appelait à une éventuelle supervision par une tierce partie —possiblement issue de la représentation nationale— pour s’assurer de l’effectivité des promesses, maintient sa revendication. Il nous faut un juge de paix, commente Noui Bourahli.

Dans la période de transition qui s’ouvre, l’une des priorités de FO est d’obtenir de la nouvelle gouvernance du Nouveau Suez l’ouverture de négociations sur les conditions de départ (PDV, formations, etc) des salariés qui, au moment de la réalisation effective de l’OPA, à l’automne prochain, ne souhaiteront pas intégrer Veolia ou rester dans le Nouveau Suez. Ce sera l’un des premiers dossiers portés par FO auprès de la nouvelle gouvernance de Suez, précise le coordinateur FO du groupe Suez.

Elie Hiesse Journaliste à L’inFO militante

L’inFO militante Le bimensuel de la Confédération