Transports : FO appelle à une semaine de mobilisation en octobre 2022

InFO militante par Fanny Darcillon, L’inFO militante

© Nicolas TAVERNIER/REA

Après le constat, lors de la rentrée scolaire, d’un transport urbain peinant à faire face aux besoins, cela par manque de conducteurs de cars, la fédération des Transports et Logistique FO UNCP rappelle ses revendications pour de meilleurs salaires et l’amélioration des conditions de travail. Des éléments essentiels pour que le secteur des transports en général endigue la pénurie de personnels et renoue enfin avec l’attractivité. La fédération FO programme une semaine d’actions du 17 au 23 octobre prochains.

La préparation de la rentrée scolaire n’a pas été de tout repos dans les entreprises de transport interurbain, chargées de l’acheminement de quelque 1,2 million d’élèves des campagnes vers les écoles, collèges et lycées. Selon les chiffres de la fédération Transports et logistique FO-UNCP, il manque en France 15 000 conducteurs de cars, dont 1 700 scolaires. Fin août, les organisations patronales et le gouvernement se félicitaient d’avoir sauvé les meubles en assurant la quasi-totalité des dessertes malgré la pénurie criante, à l’aide de mesures d’urgence, déclarait un communiqué conjoint des ministères du Transport, de l’Education nationale et du Travail.

On a placé des petites rustines un peu partout, en mettant des agents d’exploitation dans les bus pour essayer de pallier le manque et assurer le service minimum du transport scolaire, rapporte Khalid Oughzif, secrétaire fédéral en charge du transport routier de voyageurs à la Fédération FO Transports. Mais il y a aussi eu un travail en amont depuis de longs mois en prévenant les parents que des lignes seraient réduites : ceux-ci ont alors opté pour des solutions alternatives comme le covoiturage.

Un fort turn-over lié aux conditions de travail

Des remèdes temporaires qui n’ont pas de quoi satisfaire la profession. Dans son communiqué, le gouvernement admet de même que le travail doit se poursuivre pour résoudre sur le moyen et long termes les difficultés structurelles de recrutement dans le secteur. En effet, la pénurie de chauffeurs existe depuis longtemps, analyse Khalid Oughzif, et grandit année après année, car le métier n’est pas attractif. Certaines entreprises ont un turn-over de personnel de 20 à 30% par an.

En cause, des conditions de travail souvent difficiles. Les conducteurs ont des services à coupures, parfois longues, et non rémunérées, explique le secrétaire fédéral. L’amplitude horaire peut aller jusqu’à 14 heures. Sans compter le temps de déplacement du domicile au lieu de travail, puisque nombre de chauffeurs habitent en périphérie des pôles urbains où se trouvent les dépôts de cars. De plus, ils travaillent six jours par semaine au moins une semaine sur trois. Une situation qui ne favorise pas un équilibre satisfaisant entre vie privée et vie professionnelle.

Le transport rural de voyageurs n’étant pas le seul secteur des transports à souffrir de difficultés de recrutement liées à une faible attractivité, la fédération FO Transports a souhaité cet été l’organisation d’une rentrée sociale offensive. Elle appelle à une semaine d’actions fortes du 17 au 23 octobre prochains, pour les salaires et contre la dégradation des conditions de travail.

Les salaires, clés de l’attractivité

Le mal-être des salariés du transport interurbain remonte à plusieurs années, mais s’accentue fortement avec la crise actuelle du pouvoir d’achat. Or, face à la pénurie structurelle de chauffeurs, les réactions sont toujours les mêmes, fustige Khalid Oughzif. Le communiqué gouvernemental attribuait cet été trois axes d’amélioration au « plan d’action transports scolaires » : faciliter l’accès à la profession et aux formations, améliorer l’organisation et les conditions de travail des conducteurs, adapter le cas échéant les modalités de passation des marchés de transports scolaires.

Si l’organisation et les conditions de travail sont bien au cœur des préoccupations de FO, une telle liste reste aveugle au principal frein au recrutement de conducteurs, appuie le secrétaire fédéral : Les deux premières envies des salariés, c’est une meilleure rémunération et un travail à plein temps. Certaines Régions votent des budgets supplémentaires, qui servent non pas à rémunérer les salariés mais à payer des formations. Ça ne sert à rien.

45% de temps partiels au Smic

D’abord, la question des salaires : selon la dernière grille, applicable au 1er octobre, un conducteur perçoit à l’embauche 11,08 euros brut de l’heure… soit un centime de plus que le Smic. Et plus largement, la majorité des conducteurs sont à un échelon correspondant à 11,14 euros de l’heure. Pourtant, la grande majorité d’entre eux a une qualification professionnelle, ils ont effectué une formation sur quatre mois. Face à cette situation et qui plus est dans cette période d’augmentation du prix de l’énergie et de l’essence, la question se pose selon Khalid Oughzif : Est-ce que ça vaut le coup de venir travailler pour ce genre de vie ?

Celui-ci est de plus réservé à la part des conducteurs qui ont décroché un contrat à temps plein. Par ailleurs, le transport rural de voyageurs interurbains compte environ 45% de contrats à temps partiels, avance le secrétaire fédéral. Un bon tiers des chauffeurs fait moins de 600 heures par an. On peut presque toucher plus avec le RSA en restant chez soi… Et quand certains parviennent, à conjuguer cette situation avec l’exercice d’un autre emploi cela peut devenir difficile à assurer lorsqu’on est appelé à faire davantage d’heures, ce qui permet à l’entreprise de pallier les difficultés de recrutement.

Si on se donnait les moyens de réaménager les horaires, on pourrait créer du temps-plein, l’activité le permettrait, assure Khalid Oughzif. Au-delà de l’impératif social d’assurer un emploi pérenne et correctement rémunéré aux salariés, il en va selon lui de la survie du secteur : Qui dit pénurie dit planification au jour le jour, ce qui fait que même les passionnés, ceux qui restent derrière leur volant, risquent de changer de métier.

Fanny Darcillon

L’inFO militante Le bimensuel de la Confédération