FO réaffirme son opposition au projet de démantèlement d’EDF

InFO militante par Clarisse Josselin, L’inFO militante

© F. Blanc

Le 8 avril, jour-anniversaire des 75 ans des nationalisations d’EDF et GDF, une interfédérale, comptant FO, a appelé les agents à se mobiliser sur tout le territoire pour dénoncer l’ensemble des projets qui menacent le service public de l’énergie. Depuis des mois, la fédération FO énergie et mines exige notamment l’abandon du projet Hercule, qui pourrait aboutir à un « démantèlement » d’EDF et ouvrir la voie à sa privatisation. Si le projet ne porte plus ce nom, ses fondamentaux restent inchangés soulignent les syndicats.

La date n’a pas été choisie au hasard. En effet c’est le 8 avril 1946 qu’a été votée la loi nationalisant le gaz et l’électricité. Soixante-quinze ans plus tard, jour pour jour, les quatre fédérations syndicales du secteur, dont la fédération FNEM-FO Energie et Mines, a appelé les agents à une journée de grève et d’actions pour s’opposer à tous les projets menaçant le service public de l’énergie. Ils étaient invités à s’habiller de bleu, couleur historique d’EDF-GDF.

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Près de 400 personnes se sont rassemblées dès 14 heures devant le ministère de l’Economie à Paris. D’autres actions ont été organisées sur tout le territoire. On comptait une mobilisation de 37,7% parmi les salariés de la division production nucléaire. Il s’agissait de la sixième journée de grève depuis fin novembre contre le projet Hercule, qui prévoit de scinder EDF en trois entités. Un projet qui ouvrirait la voie à la privatisation alors que l’État possède 84% d’EDF.

Il trouve son origine dans a la volonté de la France d’augmenter le prix de vente garanti de l’électricité nucléaire. Or explique Alain André, secrétaire fédéral à la FNEM-FO La loi Nome, qui s’applique jusqu’en 2025, oblige EDF à vendre 25% de la production nucléaire à prix régulé, c’est l’Arenh. Mais le prix du mégawattheure, bloqué à 42 euros depuis des années, peut évoluer tous les ans par simple décret. Il faudrait l’augmenter au moins à 48 euros.

Pour augmenter le prix de vente garanti de l’électricité nucléaire, le gouvernement français attend pour sa part d’obtenir le feu vert de la direction générale de la concurrence à la Commission européenne. Mais en échange, Bruxelles exige une séparation des activités d’EDF. La commission souhaite aussi la mise en concurrence des centrales hydroélectriques. Selon le gouvernement, le projet Hercule, ancienne ou nouvelle version, serait censé apporter une solution.

Grande opacité autour du projet

Une grande opacité entoure ce projet. L’interfédérale dénonce notamment l’absence de dialogue social avec les représentants du personnel. Le gouvernement affirmait début mars qu’un accord était sur le point d’être trouvé avec la Commission européenne. Il évoquait un projet de loi susceptible d’être présenté au Parlement avant l’été prochain.

L’interfédérale redoute le vote précipité d’une loi dont on peut imaginer les contours mais en aucun cas les détails, et dont l’effrayante simplicité pourrait avoir des conséquences catastrophiques pour l’avenir d’EDF. Pour les syndicats, ce calendrier pourrait déboucher sur un débat tronqué. Ils redoutent une procédure par ordonnances.

Selon Le Monde, cet agenda serait compromis, les discussions étant désormais au point mort à l’échelle européenne. En effet, Bruxelles exigerait une nette séparation entre la production et la fourniture d’électricité. Or le gouvernement se défend de tout démantèlement d’EDF…

Une survalorisation dans le rachat aux actionnaires d’une partie du capital

Le 6 avril, plusieurs mois après qu’elles aient interpellé le gouvernement, les fédérations ont enfin été reçues (en visioconférence) par la ministre de la Transition écologique, Barbara Pompili, et le ministre de l’Économie, Bruno Le Maire, avec la participation du P-DG d’EDF. Rien de nouveau, sauf sur la forme, a réagi l’interfédérale à l’issue de la rencontre. Mais sur le fond, le projet de réforme présenté est bel et bien un copié/collé du projet initial Hercule qui ouvre la voie au démantèlement d’EDF.

En effet, les ministres ont présenté aux représentants du personnel la future structure juridique d’EDF. Exit le projet Hercule et les trois entités d’EDF Bleu, Azur et Vert. Selon l’interfédérale, la maison mère, EDF SA, serait à 100% publique et renationalisée (nucléaire et fonctions support). Une filiale, EDF hydro, regroupant l’activité hydraulique, serait une quasi-régie 100 % publique et nationalisée. Une société, EDF énergies renouvelables et réseaux, serait également créée, et son capital pourrait être ouvert jusqu’à 30%.

Les ministres n’ont apporté aucune précision aux interrogations exprimées par les fédérations syndicales depuis des mois sur les zones d’ombre qui existent, ajoute l’interfédérale. Pour les représentants du personnel, ce projet est tout autant destructeur pour l’avenir d’EDF qu’Hercule.

Par ailleurs, il suppose la renationalisation d’EDF, dont près de 17% du capital est entre les mains d’actionnaires minoritaires. Les ministres ont annoncé au cours de cette réunion que l’État allait injecter 10 milliards d’euros dans le projet pour racheter le capital flottant d’EDF aux actionnaires, explique Alain André. Or selon la valeur boursière d’EDF, ces 17% représentent plutôt entre 5 et 7 milliards d’euros. C’est une survalorisation d’environ 40%. Et les représentants du personnel de s’interroger sur le sens et les motifs de cette survalorisation…

© F. Blanc

Clarisse Josselin Journaliste à L’inFO militante

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