Inégalités : les écarts de salaire restent forts

Economie par Clarisse Josselin

Les revenus des salariés du secteur privé et semi-public se concentrent dans les niveaux de salaire inférieurs à 3 500 euros net par mois. InFOgraphie : F. Blanc (CC BY-NC 2.0)

L’Observatoire des inégalités a publié son rapport annuel le 30 mai. Ce document de 180 pages, basé sur diverses statistiques, dresse un large état des lieux des inégalités en France, notamment en termes de revenus, d’emploi ou de modes de vie. Ces écarts tendent aussi à se transmettre entre générations.

Les niveaux de vie des ouvriers et des cadres supérieurs s’éloignent de plus en plus. C’est ce qui ressort du dernier rapport de l’Observatoire des inégalités, un organisme indépendant fondé en 2003. Compte tenu de la progression du pouvoir d’achat, il fallait, en 2013, en moyenne cent soixante-six ans à un ouvrier pour atteindre le salaire que les cadres touchent actuellement. Dans les années 1970, ce rattrapage se faisait en moins de quarante ans, soit en gros la durée d’une carrière.

Les auteurs du rapport expliquent ce recul par l’effondrement de la hausse annuelle du pouvoir d’achat des ouvriers. Supérieure à 3 % en moyenne jusqu’au milieu des années 1970, elle s’est écroulée à 0,3 % entre 1985 et 1995, pour remonter récemment à 0,7 % par an.

En France, le salaire net médian à temps plein s’élevait à 1 772 euros en 2013, selon l’Insee. Les 10 % les moins bien payés touchaient moins de 1 200 euros par mois, tandis que les 10 % les mieux payés percevaient au moins 3 544 euros par mois. Les classes moyennes se situent dans les revenus entre 1 471 et 2 682 euros net par mois.

La progression des salaires est en effet loin d’être la même pour toutes les catégories socio-professionnelles et les écarts se creusent avec l’âge. En fin de carrière, les ouvriers non qualifiés gagnent en moyenne 500 euros de plus que les débutants à temps plein, avec 2 200 euros à 61-65 ans contre 1 700 euros brut pour les 21-25 ans. Chez les cadres, les plus âgés gagnent 7 900 euros en moyenne contre 3 000 euros pour les plus jeunes, soit un écart de 4 900 euros.

Les 10 % les plus fortunés détiennent près de la moitié du patrimoine

Les auteurs du rapport notent que ces niveaux de rémunération permettent aux cadres d’asseoir la transmission des inégalités dans le temps : ils peuvent plus facilement financer les études de leurs enfants et leur constituer un début de patrimoine.

En matière de patrimoine justement, qui regroupe l’ensemble des biens immobiliers, financiers et professionnels, les inégalités sont encore démultipliées. Les 10 % les plus fortunés détiennent près de la moitié (47 %) du patrimoine total en France. En regard, les 50 % les moins fortunés ne disposent que de 8 % de l’ensemble du patrimoine.

Le patrimoine net médian, dettes déduites, s’élève à 114 000 euros. Celui des ouvriers non qualifiés est de 16 400 euros, celui des ouvriers qualifiés de 42 000 euros, alors que celui des cadres atteint 205 000 euros. Quant aux non-salariés, leur patrimoine net médian est beaucoup plus élevé du fait de la fortune professionnelle. Il se situe autour de 380 000 euros pour les professions libérales et 500 000 euros pour les agriculteurs. La fortune professionnelle de Liliane Bettencourt, la femme la plus riche de France bien qu’elle ne travaille pas, atteint 31,2 milliards d’euros, soit l’équivalent de… 1,8 million d’années de Smic.

 

L’égalité hommes-femmes encore lointaine
Effet d’un demi-siècle de scolarisation « poussée » des filles et de mobilisation des mouvements féministes, la situation des femmes tend à s’améliorer dans le monde du travail, note le rapport. De plus en plus diplômées, elles représentaient 40 % des cadres supérieurs en 2015. C’est deux fois plus qu’en 1982. Les écarts de salaire tendent eux aussi à se réduire même si, à poste équivalent, en 2012, une femme gagnait encore 10,5 % de moins qu’un homme. Mais les femmes sont aussi de plus en plus présentes au bas de l’échelle. Elles occupent désormais 63 % des emplois d’ouvriers et d’employés non qualifiés, contre 50 % en 1982. La grande majorité d’entre elles sont caissières, assistantes maternelles ou vendeuses. Le rapport rappelle aussi que les femmes sont quatre fois plus souvent à temps partiel que les hommes et met en lumière toutes celles, très souvent de milieu populaire, qui n’osent plus chercher du travail, notamment après une maternité.

Clarisse Josselin Journaliste à L’inFO militante

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