Télécoms : FO Métaux se battra jusqu’au bout pour sauver Scopelec

InFO militante par Clarisse Josselin, L’inFO militante

© Ramon Costa / SOPA Images/ZUMA/REA

Quelques 3 600 emplois sont menacés chez Scopelec, sous-traitant d’Orange pour l’installation et la maintenance des réseaux télécoms. En novembre dernier, à l’issue d’une série d’appels d’offres, le groupe coopératif a perdu les deux tiers des contrats qui le liaient à l’opérateur historique, pour un montant global représentant environ la moitié de son chiffre d’affaires. La direction et le CSE de Scopelec ont saisi la justice pour rupture brutale de relation commerciale. Le tribunal de commerce de Paris a demandé le maintien provisoire des contrats jusqu’au 8 avril, date de l’audience en référé.

Si rien ne bouge, ce sera l’un des plus gros PSE en France de ces dernières années, alerte Frédéric Mazars, délégué FO, syndicat majoritaire chez Scopelec SA. Ce groupe coopératif basé dans le Tarn est, depuis 1973, le premier sous-traitant d’Orange pour l’installation et la maintenance des réseaux télécoms. C’est aussi la première Scop de France avec 3 600 salariés et un chiffre d’affaires estimé à 475 millions d’euros en 2021. Mais en novembre dernier, à l’issue d’une série d’appels d’offres, l’opérateur historique a décidé de ne pas renouveler 65% des contrats qui le liaient à l’entreprise, cela prenant effet au 1er avril 2022.

Perdre un appel d’offres n’est pas un problème, mais perdre plusieurs appels d’offres partout en France à la même échéance, pour un montant total qui représente près de la moitié de notre chiffre d’affaires, ce n’est pas possible, on ne peut plus vivre sans ces marchés, explique Frédéric Mazars. Nous travaillons ensemble depuis 50 ans, Orange représente l’essentiel de notre activité, il ne peut pas nous lâcher du jour au lendemain.

Depuis novembre, la fédération FO Métaux, soucieuse de préserver l’activité et les emplois, a alerté sur la situation périlleuse dans laquelle se trouvait le sous-traitant. A la demande de la direction, Scopelec a été placée en procédure de sauvegarde le 17 mars par le tribunal de commerce de Lyon. Le 22 mars, à l’appel d’une intersyndicale incluant FO, 200 salariés ont manifesté devant le siège d’Orange à Issy-les-Moulineaux pour que ce dernier prenne ses responsabilités. Le Comité interministériel de restructuration industrielle (Ciri) a aussi été saisi, mais les discussions n’ont pas permis de grandes avancées.

Orange préfère travailler avec des auto-entrepreneurs, moins chers

Le bras de fer se joue désormais sur le terrain de la justice. La direction et les CSE de Scopelec et de sa filiale Setelen ont saisi fin mars le tribunal de commerce de Paris pour rupture brutale de relation commerciale. Ils reprochent à Orange de ne pas avoir pas respecté les délais de préavis –-ce dont l’opérateur se défend— et de ne pas avoir accompagné l’entreprise dans le changement subi. Les plaignants demandent des volumes d’activité supplémentaires durant 12 à 18 mois, le temps de trouver de nouveaux clients ou d’entamer une reconversion. Si tel n’était pas le cas, ils exigent qu’Orange participe au financement du plan social.

Un millier d’emplois sont en effet directement menacés chez Scopelec par la perte des marchés, sans compter les sous-traitants. Et si la Scop ne se relève pas de ce coup dur, c’est l’ensemble des effectifs, soit 3 600 postes, qui seront supprimés redoute FO.

Orange prétend que nous avons perdu les appels d’offres pour un défaut de qualité mais nous pouvons prouver que ce n’est pas vrai, poursuit le militant FO. Je pense plutôt qu’Orange n’a plus besoin de nous. C’est la fin de l’entretien du réseau cuivre, la fibre est déployée presque partout, on a fait la majorité du boulot. Aujourd’hui Orange préfère travailler avec des auto-entrepreneurs, pour moins cher.

Une entreprise coopérative qui appartient à ses salariés

Frédéric Mazars est d’autant plus remonté qu’il explique que ces dernières années, Orange avait demandé à son « partenaire » Scopelec de grossir en rachetant des petites entreprises du secteur. Nous avons eu une hausse d’activité de 5 à 25% selon les zones. Pour des gens qui ne travailleraient pas bien, cette hausse de l’activité est étonnante !, ironise-t-il. Le délégué FO s’inquiète également pour la situation financière des sous-traitants de Scopelec, impactés par la procédure de sauvegarde qui bloque tous les paiements aux créanciers.

Les marchés perdus avec Orange devaient s’arrêter le 31 mars. Mais le tribunal de commerce de Paris a exigé du donneur d’ordre la prolongation des contrats à titre conservatoire jusqu’au 8 avril, date de l’audience en référé.

Si la situation ne se débloque pas, le syndicat FO envisage d’aller manifester devant les boutiques d’Orange pour expliquer aux clients comment l’opérateur traite ses sous-traitants. Dans les appels d’offres, les prix sont toujours à la baisse, malgré la hausse des coûts, dénonce Frédéric Mazars. En parallèle, les bénéfices d’Orange augmentent. Aujourd’hui beaucoup de sous-traitants ne veulent pas travailler pour Orange car les prix sont trop bas. L’opérateur est en train de tuer la filière télécoms. Les clients vont en payer le prix, la qualité de service va se dégrader.

Le militant rappelle aussi que l’État est l’actionnaire majoritaire d’Orange, dont (avec BPI France, NDLR) il détient 23% du capital. Malgré les grands discours sur la relocalisation, le marché est attribué à une boîte basée au Luxembourg au détriment de l’emploi local, dénonce Frédéric Mazars. Mais nous nous battrons jusqu’au bout. La Scopelec est une Scop, l’entreprise appartient à ses salariés, ne ferons tout pour la défendre.

Clarisse Josselin Journaliste à L’inFO militante

L’inFO militante Le bimensuel de la Confédération