Transfix : les salariés inquiets pour l’avenir du site varois

Emploi et Salaires par Elie Hiesse

Usine Transfix © Mario FOURMY/REA

A l’issue d’une grève de trois jours, les 330 salariés de l’usine Transfix de La Garde, dans le Var, ont obtenu la révision partielle d’un accord de juin 2017, qui faisait travailler les opérateurs « 39 heures payées 37 ». Mais l’avenir du site spécialisé dans la fabrication de transformateurs électriques reste incertain.

Trop, c’est trop. Inquiets pour l’avenir de leur usine, spécialisée dans la fabrication de transformateurs électriques, les 330 salariés de Transfix de La Garde, près de Toulon, ont complètement débrayé, du 10 au 13 février. Depuis le rachat en octobre dernier de Groupe Cahors (propriétaire de Transfix) par la holding Epsys de Grégoire Libert, le repreneur se refuse à préciser le sort qu’il réserve à l’usine gardoise.

Transfert partiel de la production en 2021

La seule annonce faite par la direction concerne le transfert, en 2021, d’une partie de la production réalisée à La Garde dans l’usine Epsys de Chambéry (Savoie), à savoir la fabrication des postes en béton dans lesquels sont intégrés les transformateurs. Par quoi sera-t-elle remplacée ? La seule fabrication des transformateurs ne sera pas suffisante pour assurer le maintien des effectifs, explique Elisabeth Vedel, déléguée syndicale FO, syndicat majoritaire sur le site.

Elle dénonce les neuf licenciements réalisés sur le site depuis la reprise. L’unique stratégie apparente de la direction est de réduire la masse salariale en prenant soin de se soustraire à l’obligation d’ouvrir un PSE (plan de sauvegarde de l’emploi, NDLR), commente-t-elle. Le PSE est obligatoire uniquement quand le licenciement concerne 10 salariés minimum sur une période de 30 jours consécutifs.

L’annonce d’une réduction drastique des investissements 2020 (nécessaires à la poursuite des contrats en 2021), sans qu’un budget soit fixé, ajoute à l’angoisse des salariés de perdre leurs emplois.

Refus de continuer à « travailler gratuitement deux heures par semaine »

Dans ce contexte, le refus de la direction de revoir l’« accord de préservation et de développement de l’emploi » (APDE), signé mi-2017 pour cinq ans, puis la faiblesse de ses propositions ont été l’étincelle qui a mis le feu aux poudres.

Depuis deux ans et demi, les opérateurs des ateliers travaillent 39 heures payées 37h, avec l’obligation d’être à leur poste un samedi par mois, sans que cette journée travaillée soit payée dans son intégralité (4 heures sont majorées à 25%, les 4 autres heures étant stockées sur un compte-temps), rappelle la déléguée syndicale FO. Quant au personnel administratif, ils travaillent 37 heures payées 35 heures. Les cadres, eux, ont perdu 2 des 10 jours de RTT.

Cet accord était censé permettre le redressement de l’entreprise et sauver les emplois. Mais les sacrifices des salariés depuis deux ans et demi n’ont eu aucun effet. Ils n’en peuvent plus. Et refusent de continuer à travailler gratuitement deux heures par semaine, martèle Elisabeth Vedel. Une réaction logique, alors que la plus grande incertitude pèse sur le maintien de leur emploi.

90% de grévistes

Le vote d’une grève illimitée a été quasi-unanime. Unis derrière l’intersyndicale réunissant tous les syndicats et les corps de métiers, plus de 90% des 330 salariés, ont participé aux trois jours de débrayage. Une mobilisation inédite par son ampleur dans la société centenaire, où les grèves sont rares : la dernière date d’une quinzaine d’années. Leur détermination a permis de faire revenir la direction à la table des négociations et d’obtenir partiellement gain de cause.

Si la direction s’est refusé à « annuler » l’accord de mi-2017, elle a accepté d’en revoir les modalités. Les deux heures par semaine non payées, en vertu de cet accord, sont réduites de moitié. Les opérateurs des ateliers vont voir réintégrer, dans le salaire de base, une heure hebdomadaire travaillée, avec effet rétroactif au 1er janvier 2020. Pour les administratifs, la récupération de l’heure va se fait en repos compensateur. La fin de l’obligation de travailler un samedi par mois a été actée : à partir du 1er avril, la direction devra faire appel au volontariat et le paiement de ce samedi travaillé sera majoré (6 heures majorées à 50%, deux étant stockées sur le compte-temps).
L’intersyndicale a également obtenu l’absence de retenue salariale pour les salariés grévistes.

Accompagnement renforcé pour les salariés licenciés

Les avancées débordent le cadre de l’accord de mi-2017. L’intersyndicale a négocié la revalorisation de 14% de la prime pour travail de nuit. Elle sera effective à compter du printemps, après avoir été entérinée dans le cadre des négociations annuelles obligatoires. L’accompagnement des deux salariés licenciés, actuellement suivis par une cellule de reclassement payée par l’entreprise, sera également renforcé.

Pas de quoi, cependant, restaurer la confiance du personnel. Les salariés ont accepté un compromis. Mais leurs craintes quant à l’avenir du site restent entières, souligne la déléguée syndicale FO.

D’autant que la direction de Transfix se refuse toujours à fixer le budget des investissements, autrement dit à apporter des garanties sur le maintien des 330 emplois au-delà de décembre 2020. Date à partir de laquelle le transfert partiel de production est prévu.

 

Elie Hiesse Journaliste à L’inFO militante