[Cinéma] Hors champs sur le grand reportage

InFO militante par Sandra Déraillot, L’inFO militante

Métier souvent caricaturé, le grand reportage perd de son attractivité. Avec Vivants, Alix Delaporte propose sans esbrouffe et avec une grande tendresse, une immersion dans ce milieu professionnel en butte aux restrictions de budget et à la course à l’audience.

L’étranger faut oublier, l’international ça marche plus et ça coûte cher. Le big boss en costume a tranché. Au grand dam des reporters de l’émission phare de son agence, Vincent, Damien, Camille et les autres, une sorte de 7 sur7 qui aurait traversé les époques. C’est dans cette ambiance que déboule Gabrielle, guide de haute montagne en quête de reconversion, venue effectuer un stage au service technique. Chargée du matériel elle suit les journalistes sur le terrain, s’intéresse au montage et se retrouve même derrière la caméra lorsque l’équipe est virée de la Fashion-week pour avoir posé des questions sur les licenciements dans le secteur de la mode.

Un métier menacé par les financiers

Alix Delaporte, la réalisatrice (multiprimée pour le long métrage Angèle et Tony en 2011), connait le milieu puisqu’elle a fait ses premiers pas de cameraman à l’agence Capa. Ce qui lui permet d’en révéler les coulisses. Elle recrée ici une équipe soudée, aux personnages attachants, qui tentent de faire avec les moyens du bord : restrictions de budgets, évolution des audiences et du paysage médiatique. Le métier n’est pas menacé par les journalistes mais par les financiers qui prennent le pouvoir dans les rédactions et pour qui les reporters de terrain deviennent un luxe inutile, résume Alix Delaporte.

Dans son film, pas d’images impressionnantes au milieu des bombes ou des tremblements de terre, pas l’arrogance de ceux qui s’enorgueillissent d’avoir couvert Haïti, le Rwanda ou la prise du Capitole. On est le plus souvent « à la rédac », en quête de contacts, d’infos ou du feu vert pour partir, à Melun comme à Bangui. Même si ce qui compte toujours le plus c’est l’envie de montrer, de révéler, d’enquêter, d’être là où les choses se passent. Les acteurs (Alice Isaaz, Roschdy Zem, Vincent Elbaz, Pascale Arbillot…) trouvent le ton juste, sans que l’un étouffe les autres. Comme leurs personnages qui, malgré les réductions d’effectifs, ne peuvent fournir de bon travail qu’en équipe.

Vivants, un film d’Alix Delaporte, 1 h 23, en salle le 14 février.

Sandra Déraillot Journaliste à L’inFO militante

L’inFO militante Le bimensuel de la Confédération