Le CAC40 ne connaît plus la crise, l’investissement reste en carafe

Economie par Mathieu Lapprand

Des résultats en hausse pour le CAC40 alors que la croissance reste atone et les investissements en berne, c’est le cocktail économique de l’année 2014. Un cocktail potentiellement explosif, alimenté par une redistribution économique à sens unique, de la poche du salarié vers celle de l’actionnaire.

Deux cabinets d’évaluation financière ont présenté début mars pour Le Monde et Les Échos leurs estimations des résultats du CAC40 pour l’exercice 2014. Ces résultats nets cumulés atteignent 64,4 milliards d’euros selon Ricol Lasteyrie Corporate Finance et 62,4 milliards d’euros pour le cabinet PwCS (ex-PriceWaterhouseCoopers). Cette progression des résultats de l’ordre de 33 % intervient alors que le chiffre d’affaires cumulé de ces 40 entreprises stagne (+0,1 %) à 1 222 milliards d’euros. Comment ces mastodontes économiques peuvent-ils réussir à dégager des profits supplémentaires tandis que l’activité reste quasi constante ?

Tout d’abord en limitant les investissements. Ceux-ci ont chuté de 1,5 % en 2014 selon les données préliminaires du cabinet Ricol Lasteyrie après un précédent recul en 2013, inédit alors, de 5 %. Mais également grâce à des cessions ou des baisses de dépréciations d’actifs. Ainsi le groupe LVMH a-t-il réussi à détrôner Total de son inamovible place de numéro 1 des profits du CAC40 grâce à la plus-value réalisée par le groupe avec la vente de ses participations dans Hermès.

« Plus tu es gros, plus tu gagnes et moins tu redistribues »

Mais l’augmentation des résultats d’un tiers après trois années de reculs masque des situations très contrastées selon les entreprises. Les profits de BNP Paribas ont été touchés par l’amende record que la banque a dû acquitter en 2014, alors que le reste du secteur bancaire affiche des résultats en progression. En 2014, Airbus et Safran affichent eux des résultats records.

Si les résultats du CAC40 sont variables d’une entreprise à l’autre, celles-ci ont malgré tout un point commun : l’augmentation de la rémunération du capital par le versement de dividendes. En moyenne, la hausse des dividendes par action est de 6,2 %. Comme en 2013, seul Alcatel-Lucent ne versera pas de dividendes à ses actionnaires et seul GDF Suez versera des dividendes inférieurs à ceux de 2013. Six entreprises du CAC40 augmentent les dividendes versées de plus de 15 % et huit sociétés (Carrefour, Danone, Gemalto, Publicis, Safran, Solvay, Technip, Total) augmentent les dividendes versées par rapport à 2013 alors que leurs résultats baissent.

Pour l’avenir et notamment l’exercice 2015, les analystes sont confiants : les cabinets FactSet et PrimeView tablent sur une hausse des profits de 30 % cette année. Ils pourraient atteindre 81 milliards d’euros. Des profits qui seraient soutenus par la baisse de l’euro face au dollar et les prix bas du pétrole. « Nos sociétés et notre appareil industriel vont chèrement payer ces prises de profit sans investissements », s’inquiète Pascal Pavageau, secrétaire confédéral chargé de l’économie, pour FO. « Plus tu es gros, plus tu gagnes et moins tu redistribues », conclut-il.

Mathieu Lapprand Journaliste à L’inFO militante