Une indemnisation n’est plus vraiment entraînée par le manquement d’une obligation de l’employeur. La Cour de cassation vient d’en décider ainsi en matière de formation, estimant que le salarié aurait dû amener la justification du préjudice subi. (Cass. soc., 3-5-18, n°16-26796).
5,26 millions
C’est le nombre de comptes personnels de formation (CPF) qui étaient ouverts au 1er janvier 2018, selon le ministère du Travail.
Engagé en 1995 en qualité de pompiste à temps plein, un salarié se voit préconiser par la médecine du travail un temps de travail moindre en 2008, puis est déclaré inapte à tout poste dans l’entreprise le 2 novembre 2011, avant d’être licencié pour inaptitude par un courrier du 29 novembre 2011. Contestant le bien-fondé de son licenciement, il saisit les prud’hommes. En septembre 2016, en appel, il est débouté de sa demande de condamnation de son employeur au paiement de dommages-intérêts pour défaut à l’obligation de formation. Il n’en a en effet eu aucune en seize ans. La cour d’appel motive son refus en soulignant que le salarié n’indique pas les postes auxquels il aurait pu prétendre ou les formations demandées qui lui ont été refusées et que ses droits au DIF (Droit individuel à la formation) lui ont été régulièrement notifiés.
L’impératif de justification
La Cour de cassation, le 3 mai 2018, n’a pas suivi la cour d’appel sur ces motifs, mais en revanche le salarié n’a pu, comme en appel, voir aboutir sa demande de condamnation de son employeur à lui payer la somme de 5 000 euros au titre des dommages-intérêts pour défaut de l’obligation de formation. La raison : il a fait une demande forfaitaire sans expliciter
le préjudice qu’il a subi, en indiquant notamment les postes auxquels il aurait pu prétendre ou les formations qu’il a demandées et qui lui ont été refusées, de telle sorte que, dans la mesure où ses droits au DIF lui ont été régulièrement notifiés, explique la Cour de cassation, reprenant les termes de la cour d’appel, il ne justifie pas d’un préjudice particulier qui mérite d’être réparé
. Même s’il est resté seize ans sans formation, c’est au salarié de prouver et d’établir précisément le préjudice causé. Bref, la charge de la preuve lui incombe même si le manquement à l’obligation de formation est évident.
La réforme gouvernementale du compte personnel de formation (CPF, successeur du DIF depuis 2015), qui devrait permettre à chaque actif de disposer
de 500 euros par an sur son CPF, voire 800 euros pour les personnes les moins qualifiées, a conduit FO à souligner, en mars, le danger d’une monétisation
qui risque de faire perdre des droits aux salariés.