A l’occasion de la présentation des comptes de la Sécurité sociale par la Commission du même nom, Madame la Ministre a annoncé l’intégration du régime des indépendants (RSI) dans les comptes du régime général, maladie comme vieillesse.
Sur la forme, une première faute politique : le gouvernement ne manque jamais une occasion de mettre en avant le « dialogue social », pierre angulaire de la nouvelle mandature et, à l’en croire, valorisation des « partenaires sociaux ».
Cette décision a été prise sans aucune concertation. À ce propos, il est important de rappeler l’intervention de Madame Touraine qui, lors de la première conférence sociale, faisait bien la différence entre concertation et négociation. Nous n’avions pas manqué, à l’époque, de lui indiquer que la différence nous était connue depuis longtemps. Pour autant, dans concertation, il restait encore - au moins en apparence - un signe, sinon de respect, au moins de reconnaissance des interlocuteurs sociaux dont nous faisons partie.
Sur le fond, et je ne ferai allusion qu’aux régimes de retraite de base, nous assistons à la mise en place des fondations du régime universel. L’intégration des comptes du RSI dans ceux de la CNAV préfigure à l’évidence un changement de conception politique de notre système de protection sociale. Les puristes diraient que nous passons d’un régime « bismarckien » à un régime « beveridgien ». En fait, depuis de nombreuses années, le régime n’était plus financé uniquement par la cotisation : les différents mécanismes de solidarité mis en place au cours des décennies précédentes avaient amené, et c’est logique, des financements basés sur la solidarité nationale.
Mais ce qui est en cause aujourd’hui, c’est toute l’architecture de la protection sociale. Et l’origine de cette remise en cause est inacceptable : au nom de la compétitivité-coût, le Medef a obtenu la disparition d’une contribution payée par les plus grandes entreprises : la C3S. Ce nouveau cadeau déséquilibre de près de 15 % le RSI. La solution ? Facile : les salariés paieront !
Alors que la CNAV allait sortir d’un affichage déficitaire, qui peut faire semblant de croire que lui accoler un régime déficitaire ne va pas, in fine, créer les conditions ou conditionner l’opinion publique à l’idée que de nouveaux ajustements sont nécessaires ? En d’autres termes, ce gouvernement prépare une nouvelle « réforme » de la retraite. Les assurances données à ce jour, oralement, sur le fait que « tout sera compensé intégralement » ne peuvent être suffisantes pour contrer l’opposition de FO à cette manipulation. C’est, entre autres, ce que nous dirons à la conférence sociale, que ce soit ou non à l’ordre du jour, que cela plaise ou non.
C’est cela aussi l’indépendance syndicale, c’est Force Ouvrière.