La mixité sociale au cœur des missions du logement social

La lettre électronique @ ctualités Europe – International n°20 par Secteur International Europe

Le 27 février 2014, la Cour de Justice de l’Union Européenne a annulé l’ordonnance du président du tribunal de l’Union Européenne du 11 décembre 2006, qui avait jugé irrecevable le recours des bailleurs sociaux néerlandais contre la décision de la Commission de leur interdire les aides publiques. L’intérêt à agir des bailleurs est désormais reconnu.

Le recours introduit en 2006 par les Pays-Bas (avec d’autres États européens en soutien) visait à contester une décision de la Commission de 2005 d’invalider les aides publiques consenties aux fondations néerlandaises qui gèrent le logement social. La décision concernait, de fait, le périmètre de la mission du logement social.

Pour la Commission, les aides de l’État néerlandais étaient illicites, car incompatibles avec ce que doit être le régime du logement social. Selon cette approche, le logement social doit être réservé aux plus « démunis » et non prendre en compte une demande émanant de catégories sociales diverses, ou, pire, à toute la demande, demande sociale incluse, comme c’était le cas aux Pays-Bas.

Le périmètre de la mission du logement social tel que défini par l’État hollandais, avait donc été jugé par la Commission incompatible avec le respect du droit de la concurrence et des intérêts du secteur privé dont elle est la gardienne. Les aides dont avaient toujours bénéficié les bailleurs néerlandais jusqu’alors, censés venir compenser les coûts des obligations de service public, avaient donc été interdites, avec un effet déstructurant sur le secteur.

Cette dernière décision de la Cour du 27 février 2014 reconnait donc aux bailleurs sociaux le droit de contester le contrôle de la Commission. Afin de bien saisir sa portée et les enjeux, deux brefs rappels. Le premier concerne la diversité des modèles de financement du logement social des pays européens, témoins d’un rapport de forces plus ou moins favorable aux partisans d’un développement important du secteur. Le second fait référence à la mixité sociale, un des principes majeurs régissant l’accès au logement social.

Le respect de ce principe impose que la demande de logement social éligible puisse concerner des catégories sociales diverses. Ce choix relève des États. Point n’est besoin de démontrer que le logement social constitue un instrument de cohésion sociale et un outil indispensable de régulation du marché du logement. En France, le modèle de financement du logement social, alimenté par l’épargne et défendu par les organisations syndicales de salariés, dont FO, a réussi jusqu’à présent, à démontrer qu’il a résisté aux nombreuses crises économiques.

FO souscrit pleinement à l’application du principe de mixité sociale pour la prise en compte de la demande. Une position qui a une traduction concrète par le biais d’Action Logement (ex 1%), organisme à gestion paritaire qui contribue au financement de diverses catégories de logements sociaux.

La parole revient donc aux bailleurs. Déboutés à l’époque, les bailleurs sociaux néerlandais pourront donc demander que soit examiné au fond le pouvoir de la Commission de définir le périmètre du service social d’intérêt général que constitue le logement social.

L’enjeu est de taille : il s’agit de l’articulation du logement social avec le secteur privé et du degré de régulation du secteur du logement par les pouvoirs publics. Un enjeu qui relève directement du droit à un logement économiquement accessible pour tous et indirectement de la construction d’un droit social européen.

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P.-S.