Les salariés devront-ils encore défendre leur salaire différé ?

Rapport par Valérie Forgeront

Un rapport propose notamment d’alléger les cotisations salariales sur les bas salaires afin de doper le pouvoir d’achat... FO conteste ce principe.

Traitant de la fiscalité des ménages, le rapport du groupe de travail parlementaire conduit par le député Dominique Lefebvre et l’inspecteur général des finances, François Auvigne, a été remis le 11 avril au Premier ministre. Ce rapport ne propose pas une réforme fiscale radicale, mais en revanche des modifications ciblées qui visent à « agir dès maintenant en faveur des ménages modestes ». Le rapport propose ainsi de réviser le bas du barème de l’impôt sur le revenu afin « d’atténuer des effets de seuil qui induisent des ressauts d’imposition injustifiés » pour les ménages modestes. Cela les conduit en effet à ne plus pouvoir bénéficier du même niveau de prestations sociales, par exemple. Dans une lettre adressée aux auteurs, la confédération FO indique qu’elle « partage le constat du caractère complexe du système socio-fiscal pour le bas du barème de l’impôt sur le revenu ». Il n’en va pas de même pour la proposition consistant à alléger les cotisations salariales sur les bas salaires, afin de dégager du pouvoir d’achat aux salariés modestes. Selon le rapport, cet allégement pourrait être viable jusqu’à 1,3 Smic. Dans le cadre d’un effort budgétaire de 2,1 milliards d’euros, la mesure pourrait viser un allégement de 3,5% du salaire brut. Elle impacterait alors 9 mil­lions de salariés. FO a fait part de son « hostilité » à cette mesure qui toucherait une fois de plus une partie du salaire différé. Mais le 8 avril, le Premier ministre a annoncé que les cotisations salariales des salariés percevant jusqu’à 1,3 Smic diminueront dès le 1er janvier 2015. Pour M. Valls, cette baisse de cotisations équivaut à « 500 euros par an de salaire net supplémentaire. C’est presque la moitié d’un treizième mois pour un salarié payé au Smic ». La confédération FO s’indignait : « Plutôt que de faire simple en augmentant le Smic, le gouvernement allège les cotisations sociales, ce qui fragilisera encore la Sécurité sociale. »

DES SALAIRES SURTOUT TROP FAIBLES

Le rapport propose aussi le renforcement du revenu de solidarité active (RSA) d’activité et de la prime pour l’emploi (PPE). « La PPE et le RSA d’activité sont centrés sur le soutien aux revenus d’activité et partagent des objectifs proches d’incitation au maintien ou à la reprise d’activité pour le RSA d’activité, et à l’activité non réduite pour la PPE. » La PPE est un crédit d’impôt sur le revenu, assis sur les revenus d’activité compris entre environ 0,3 et 1,25 Smic. En 2012, 6,3 millions de contribuables en ont bénéficié, avec une prime moyenne de 36 euros par mois. Ce n’est pas assez incitatif ni redistributif, estime le rapport. La PPE a créé un manque à gagner de 2,9 milliards d’euros sur le budget de l’État en 2012. Le RSA d’activité, créé en 2009 et versé, lui, entre 0 et 1,15 Smic, concernait 700 000 foyers en 2012. Malgré le nombre croissant de bénéficiaires, ce RSA d’activité – 176 euros par mois en moyenne – n’est pas demandé par un tiers des bénéficiaires potentiels. Pour FO, la faiblesse du pouvoir d’achat renvoie surtout « au poids de la fiscalité sur la consommation » (la TVA), combiné à « la faiblesse des salaires ». Plus largement, résume FO, les difficultés résident « dans la mauvaise qualité des emplois ». Ainsi, « institutionnaliser un complément salarial tel le RSA d’activité revient à subventionner la pauvreté salariale », cela sans contraindre les entreprises à créer de vrais emplois en CDI.

Valérie Forgeront Journaliste à L’inFO militante

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