Depuis un mois, les Atsem de la ville de Rennes bataillaient pour leurs conditions de travail, mais aussi pour la sécurité des enfants accueillis dans les écoles de la municipalité. Ces « agents territoriaux spécialisés des écoles maternelles », majoritairement des femmes, assistent les enseignants du premier degré dans leurs tâches. Après un mois d’une mobilisation tenace, ces agentes viennent d’obtenir fin juin le retrait du projet de suppression du pool de remplaçant dans leur service.
Il y a quelques années, on comptait 40 agents dans ce pool, pour 200 Atsem présentes dans les classes,
Conséquences, le faible vivier de remplaçant ne permet pas de répondre aux besoins lorsque se présentent des absences, par exemple pour arrêts maladie. Malgré cette situation déjà problématique, la mairie décide à la fin du mois de mai 2023 de supprimer ce pool. Il n’y a eu aucune décision : on a été averti via une lettre de service,
Un métier à la pénibilité accrue
Le mécontentement des Atsem de la métropole était déjà palpable bien avant, renforcé par l’arrivée de quelques réformes... Ainsi la pénibilité du travail de ces Atsem a augmenté depuis la loi de 2018 pour une école de la confiance, loi qui abaisse l’âge du début de la scolarisation obligatoire à 3 ans. Des petits qui n’avaient pas encore appris la propreté ont été accueillis dans les classes, et les agents se sont donc retrouvés à les changer, souvent à même le sol à cause du manque de matériel. Des positions qui peuvent causer des troubles musculo-squelettiques importants
, souligne Jérôme Jourdan.
Dans la territoriale, dans le cadre des négociations sur le temps de travail (annualisation à 1 607 heures travaillées), par l’application de la loi de Transformation de la fonction publique du 6 août 2019, beaucoup de collectivités ont dressé des listes de « métiers » avec facteurs de risques. Cela allant dans le sens d’une reconnaissance de la pénibilité, et donc d’une possible réduction du temps de travail. La municipalité de Rennes n’a pas mis les Atsem dans cette liste. Leur pénibilité est complètement niée !
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A noter encore que diverses modifications législatives ont également amené à la scolarisation des élèves en situation de handicap et à besoins particuliers dans les salles de classes. Or, sans moyens supplémentaires, cette décision d’école inclusive alourdit le travail des agents.
Un rapport de force d’un mois avec la mairie
Face à ces problématiques et sur fond de malaise grandissant chez les Atsem constatant la dégradation de leurs conditions de travail, la lettre de service de la municipalité a fait déborder le vase. Les Atsem ont donc lancé une grève le 25 mai. Deux jours par semaine, les mardis et jeudis, cela pendant un mois. Dès le début du mouvement, le rapport de force s’établit avec la municipalité. Alors que les agents doivent se déclarer en grève 48 heures avant l’action, face au constat par l’employeur public d’un nombre massif de grévistes, les écoles n’ont d’autres choix que de fermer, notamment la cantine et la garderie, pour ces jours-là. En fait, les Atsem venaient quand même travailler les mardis et jeudis. Mais, comme le message de grève avait été passé aux familles, il n’y avait pas d’enfants,
Une mobilisation très soutenue
Quelques manifestations ont également été organisées dans la ville. L’occasion pour les acteurs éducatifs de montrer leur soutien aux agents. Dans la majorité des cas, les parents ont compris le mouvement,
Les enseignants ont soutenu aussi fortement cette grève. L’UD-FO d’Ille-et-Vilaine a très vite communiqué sur ce mouvement, notamment auprès de la FNEC-FP FO et du Snudi-FO. Nous avons alerté nos délégués syndicaux du public comme du privé, explique Fabrice Lerestif, secrétaire de l’UD. Cette mobilisation concernait les enfants, et donc les parents, quel que soit leur travail.
Le 13 juin, deux mobilisations étaient prévues : celle des Atsem mais également un mouvement national des accompagnants des élèves en situation de handicap (AESH) et des assistants d’éducation (AED). Les participants à ces manifestations ont dialogué. Et les deux manifestations se sont rejointes pour ne former qu’un cortège
, se souvient-il.
FO, au combat pour les Atsem
La durée de ce mouvement laisse à comprendre le niveau d’entêtement de l’employeur public face à des Atsem ne demandant que le retrait du projet et l’ouverture de réelles discussions concernant les remplacements. Nous nous sommes heurtés à un mur,
Un temps de latence que pointe FO le représentant : ce pool de remplacement n’est pas un sujet majeur. Mais face à l’entêtement de la collectivité, il a fallu entrer en mouvement alors qu’il lui suffisait d’agir pour désamorcer la colère
, rappelle Jérôme Jourdan.
De fait, les agents ont obtenu le retrait du projet et l’ouverture de discussions à la rentrée prochaine. Un groupe de travail a été mis en place pour discuter ensemble des règles concernant les remplacements, règles qui entreront en vigueur pour septembre 2024
, précise le représentant Force Ouvrière.
Et le militant souligne la ténacité démontrée par les Atsem. Elles étaient déterminées ! Si la mairie n’avait pas reculé, elles voulaient clairement continuer le mouvement et menaçaient d’une rentrée scolaire chaotique en septembre !
Jérôme Jourdan constate aussi que le mouvement a été porté par FO, et jusqu’à la victoire. A Rennes, FO est le syndicat qui compte le plus d’adhérents chez les Atsem : trente sur 150 agents. Le secteur des Atsem n’a pas un taux de syndicalisation très fort. Cependant à la suite de cette grève, nous avons eu une dizaine d’adhésions supplémentaires !