Au sein des Transports Gautier, la mobilisation pour les salaires s’inscrit dans la durée

InFO militante par Chloé Bouvier, L’inFO militante

Face à l’échec des NAO, les salariés de la Société des Transports Gautier de Chambéry, de Grenoble et Libercourt se sont mobilisés pour leurs salaires. À leur côté, Force Ouvrière demande la réouverture des négociations. La fin de la grève le 2 juin ne marque pas la fin du mouvement : les travailleurs sont bien déterminés à défendre leur pouvoir d’achat en créant un rapport de force.

Certaines mobilisations ne connaissent pas les limites géographiques, la grève des salariés des Transports Gautier est de celles-ci. Débutée le 30 mai à Chambéry (Savoie), elle s’est poursuivie à Grenoble (Isère) et jusqu’à Libercourt, dans le Nord. Les revendications sont avant tout salariales, précise Pierre Didio, secrétaire général de l’UD-FO de Savoie. Une seule et même cause a mis le feu aux poudres dans ces trois sites : l’échec des négociations annuelles obligatoires (NAO).

Durant les NAO, que la direction a mise en échec par son attitude, FO demandait une revalorisation représentant 67 euros environ. Les salaires se situent autour de 1 000 euros à Chambéry indique Pierre Didio. Malgré ce niveau plus que faible des salaires, l’accord, signé unilatéralement par la direction le 24 mai, évoque une hausse de… 5 à 12 centimes ! Insupportable et d’autant plus en cette période de forte inflation. Les syndicats, dont FO, demandaient à la direction de compenser ses effets par une hausse de salaires digne de ce nom. Or, Selon les propositions de la direction, l’augmentation serait de 8 centimes pour les agents de quai, et de 5 à 12 centimes pour les conducteurs.

Un accord unilatéral pour la 2e année de suite

Cela aboutit à des salaires à peine au-dessus du Smic, s’indigne Ludovic Flamant, délégué syndical sur le site de Libercourt. La direction nous a expliqué que les augmentations salariales actées dans la convention collective nationale des transports de décembre dernier, ont épuisé l’enveloppe dédiée aux revalorisations. Ils ne veulent rien entendre. Le militant s’inquiète aussi notamment de l’utilisation de l’enveloppe - 4 700 euros au total - dédiée aux mesures salariales pour les employés de bureau. La répartition est à la charge de l’employeur, ce qui implique des risques de discriminations.

Plus globalement, la manière dont la direction a procédé laisse un goût amer aux salariés. Le 24 mai, lors de la troisième réunion des NAO, la direction a signé sans nous le procès-verbal de désaccord, dénonce le délégué syndical. C’est la deuxième année que l’accord est signé unilatéralement, sans nous ! Pour Bruno Lefebvre, secrétaire général adjoint à la fédération FO des transports et de la Logistique UNCP-FO, le refus de la direction de négocier est devenu habituel. Depuis le rachat en 2018, on a vu arriver une équipe de direction totalement extérieure au secteur du transport. Ils ont une vision strictement financière, sans se préoccuper des conditions de travail ou de rémunération. Force Ouvrière demande la réouverture des négociations salariales.

Des pressions et des sanctions

Et d’autres revendications sont en jeu, souligne Pierre Didio. Le secrétaire de l’UD-FO de Savoie évoque des problèmes sur les fiches de paie et le non-respect de la règle du dixième. En gros, les heures supplémentaires ne sont pas prises en compte pour les congés payés. Le problème pourrait-être global à STG et représenterait des sommes très importantes, puisque cela dure depuis près de trois ans. On a proposé à la direction d’échelonner ce rappel de salaires, et l’on nous a répondu que le sujet avait été transmis au service de paye.

Les chauffeurs du site de Chambéry ont également fait part de la pression qu’ils subissaient, cela se traduisant notamment par avec des sanctions, notamment des de mises à pied. Le secrétaire général de l’UD FO de Savoie cite un exemple, concret, via une situation que FO a pu constater : Un agent de maîtrise, avec 17 ans d’ancienneté, a eu une altercation avec un autre salarié dont il était le responsable hiérarchique. Ce sont des choses qui arrivent. Après convocation, ils se sont serré la main et tout est rentré dans l’ordre. Mais, les deux hommes ont reçu quelques jours plus tard une convocation pour un entretien en vue d’une sanction, pour cette altercation. L’agent de maîtrise a finalement été mis à pied durant quelques jours. Une partie de la période coïncidait avec celle de la tenue du piquet de grève. la responsable est carrément venue le voir sur le piquet de grève pour lui dire que, puisqu’il était mis en pied, il n’avait pas le droit d’être ici, s’indigne le militant.

S’organiser pour désorganiser l’entreprise

Face à ces injustices, le site de Chambéry s’est mis en grève dès le 30 mai. 100 % des conducteurs et des agents de quai étaient en grève, même les intérimaires, se réjouit Pierre Didio. Dans cette mobilisation et au sein de l’intersyndicale, FO a reçu et reçoit encore une écoute particulièrement forte de la part des salariés de la société de transports Gautier. Sur le site, 30 conducteurs sur 40 sont avec nous, détaille le secrétaire de l’UD-FO de Savoie. Sur le site de Libercourt, Ludovic Flamant compte entre 30 % et 40 % de grévistes. Mais énormément de travailleurs nous soutiennent. Seulement la plupart, pour des raisons financières, ne peuvent pas se permettre de poser ne serait-ce qu’un jour de grève. Certains de nos collègues ont pris des crédits à la consommation seulement pour payer l’essence et pouvoir venir travailler, c’est dire à quel point cette augmentation salariale, ils en ont besoin !

À Libercourt comme à Chambéry, après respectivement quatre et deux jours de mobilisation, la grève s’est arrêtée le 2 juin. Nous ne voulions pas bloquer l’activité de l’entreprise, souligne Ludovic Flamant. Seul un barrage filtrant a été établi en fin de journée, face à l’immobilisme de la direction. Cela ne signe pas la fin du mouvement. Dans le Nord, on prévoyait une autre mobilisation dès le 8 juin nous avons déposé un préavis de grève illimité, car nous voulons faire bouger les choses, lance le délégué syndical. Idem en Savoie où la mobilisation va continuer sans doute sous d’autres formes, explique Pierre Didio. On va s’organiser pour désorganiser l’entreprise, sourit le secrétaire de l’UD-FO.

Chloé Bouvier

L’inFO militante Le bimensuel de la Confédération