En mandatant un cabinet pour une expertise économique, nous aurons juste réussi à retarder, de deux mois, le passage en activité réduite
, commente Tony Conrazier, délégué syndical FO chez Eminence (groupe Delta Galil), l’un des derniers fabricants français de sous-vêtements masculins, basé dans le Gard. Malgré un avis négatif du CSE (comité social et économique), l’administration du Travail a validé la demande de la direction de passer en activité partielle, à 50%, le site Eminence de Sauve dès le 2 mai, pour une durée de trois mois. La grève le 15 avril de la quasi-totalité des 61 salariés de l’atelier de confection n’a pas infléchi la décision.
Salaires amputés
La direction prête à sacrifier 60 salariés pour plus de profit
, Salariés en colère
: au matin du 15 avril, de grandes banderoles barraient les grilles du site, ouvert il y a plus de trente ans. Dès 10h, presque tous les salariés – en grande majorité des femmes – manifestaient devant l’établissement, qui produit surtout des caleçons sous la marque Le Slip Français ou des tee-shirts blancs. Avec l’activité partielle, les salariés payés au Smic ne toucheront plus que 72% de leur salaire net
, rappelle le militant FO. Une majorité ont refusé la proposition de la direction d’éviter l’activité partielle en allant travailler sur le second site industriel gardois d’Eminence, à Aimargues (spécialisé dans la coupe). Si un système de navette gratuite était proposé, les trajets demeuraient très contraignants. Aller-retour, cela fait 1 heure 30 de transport
, précise Tony Conrazier.
La direction motive sa décision par une baisse globale de demande de produits fabriqués en France
. La baisse serait chiffrée à 68% entre 2021 et 2025 sur les marques en propre d’Eminence. À Sauve, a pesé la baisse des commandes passées par Le Slip Français. Pour FO, si la baisse d’activité est réelle, le passage en activité réduite traduit aussi une volonté d’Eminence – connu pour avoir largement délocalisé afin de maintenir une production en France – de réorganiser sa chaîne de production. Le site gardois ne serait pas menacé, soutient la direction. Mais on sent une volonté d’y réduire l’effectif
, pointe le militant FO.