Casse d’un service public en direct. Trois unités de contrôle de l’inspection du travail viennent d’être supprimées. Un arrêté du 19 mars 2024, portant répartition des unités de contrôle de l’inspection du travail
(JO du 24/3/2024), réduit de 22 à 21, en Nouvelle-Aquitaine, le nombre de ces unités au sein desquelles les agents exercent la mission de contrôle du respect du droit du travail par les entreprises ; de 29 à 28 en Auvergne-Rhône-Alpes et de 10 à 9 en Centre-Val de Loire.
Sur ces trois suppressions d’unités, deux sont techniques et sans conséquence sur les postes mais une, en Eure-et-Loir, formalise des suppressions de postes
, explique Vadim Hosejka, secrétaire général du syndicat FO du travail, de l’emploi et de la formation professionnelle (FO TEFP). L’effectif théorique de cette unité de contrôle passe de 14 à 12 agents. Dans les faits, les agents ne seront plus que cinq en 2024 au gré des départs et faute d’arriver à pourvoir les postes
, précise Vadim Hosejka. Leurs collègues se répartiront leurs tâches.
De 1 pour 8 200 à 1 pour 10 000
C’est la conséquence d’une politique de réduction des postes décidée il y a quelques années, consistant à passer d’un ratio d’un agent de contrôle pour 8 200 salariés à un pour 10 000
, rappelle le secrétaire général de FO TEFP. Autrement dit, la densité d’agents de contrôle (inspecteurs et contrôleurs du travail) baisse progressivement, de 18%. Le 19 mars, c’était donc le tour du Centre-Val de Loire de voir le nombre d’unités baisser, et le nombre de postes. Selon Vadim Hosejka, il faudrait au contraire un ratio de 1 pour 5 000 pour répondre aux besoins des salariés des entreprises.
Avec moins de postes à pourvoir, la tâche des recruteurs du ministère du Travail devrait s’en trouver facilitée. Mais il n’en est rien. Fin 2023, il manquait 368 agents sur les quelques 2 100 sections couvrant le territoire national, indique Vadim Hosejka. Pas d’agent de contrôle dans un secteur géographique signifie que les agents présents font de l’intérim et traitent en priorité les urgences, au détriment des demandes émanant des salariés et des syndicats dans les entreprises
, explique le militant. Voilà pourquoi les salariés des entreprises et leurs représentants attendent parfois des semaines, voire en vain, une intervention de l’inspection qu’ils ont sollicitée. Pour Vadim Hosejka, les sections vacantes doivent donc être pourvues en urgence
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Faible attractivité
Cette situation tient à plusieurs raisons. Il y a d’abord un problème d’attractivité du métier. A même niveau de diplôme et de responsabilités, si le métier reste intéressant, la rémunération a décroché
, explique le militant. Comment rendre attractives ces missions quand un inspecteur du travail commence sa carrière 150 euros au-dessus du Smic ? C’est pourquoi le secrétaire général de FO TEFP demande un rattrapage des primes, actuellement moins élevées à l’inspection que dans d’autres corps et, revendication centrale, une revalorisation des grilles indiciaires. Il estime également que les agents de l’inspection devraient pouvoir progresser en grade tout en restant sur le terrain, sans forcément devenir encadrants. Les vacances de postes s’expliquent aussi par une mauvaise gestion prévisionnelle de la part du ministère, qui a mal estimé les départs à la retraite
des agents de l’inspection.
Pour ne rien arranger, le nombre d’agents susceptibles de rejoindre l’inspection – à l’issue d’une formation accélérée – est plus limité qu’auparavant. Le ministère a en effet estimé que l’inspection nécessitait moins d’octroi de personnels détachés, cela après avoir constaté une baisse du nombre d’inspecteurs partant à la retraite. Pourtant, les besoins existent toujours, d’une part parce les départs d’inspecteurs ne s’expliquent pas uniquement par leur retraite, et d’autre part parce qu’il manque toujours des personnels !
, analyse Vadim Hosejka. Enfin, les unités qui en sont restées à l’ancien ratio de 1/8 200 sont pénalisées dans les recrutements.
Du mieux côté organisation du travail
Le secrétaire général de FO TEFP est en revanche un peu plus optimiste s’agissant de l’organisation du travail des inspecteurs. Il pense ainsi que leur nouveau logiciel de travail est davantage ergonomique
. Il relève également un changement de système
dans les plans d’action du ministère, qui flèchent une partie du travail des inspecteurs vers des priorités nationales : accidents du travail et maladies professionnelle, lutte contre les fraudes, réduction des inégalités, protection des travailleurs les plus vulnérables. Les priorités nationales prennent aujourd’hui mieux en compte l’intervention des agents.
A titre d’exemple, auparavant, le contrôle de l’existence d’un accord égalité professionnel était une priorité, mais l’intervention chronophage pour enquêter sur l’existence de faits de harcèlement sexuel n’était pas comptée dans les priorités. Autre exemple : des études ont mis en avant le caractère particulièrement accidentogène des chutes de hauteur ; l’accent est mis désormais sur la lutte contre ces accidents.
En revanche, de nouveaux formats de campagnes d’actions sont déployées (par exemple sur le temps partiel), mais le délai d’exécution est trop restreint
, constate Vadim Hosejka. Par ailleurs, des campagnes régionales ou départementales perdurent qui se télescopent avec les priorités nationales. Or avec aussi peu d’effectifs, les agents ne peuvent pas faire de miracles
, explique-t-il.
L’attitude ministérielle en question…
Là où le bât blesse vraiment, c’est dans les relations avec le ministère de tutelle. Fin janvier, des agriculteurs ont pendu un sanglier devant l’inspection du travail à Agen. La ministre, Catherine Vautrin, s’est contentée d’un tweet deux mois après les faits
, regrette Vadim Hosejka. Elle n’a pas non plus réagi lorsqu’une organisation d’employeurs de l’agriculture a dit qu’elle refuserait les contrôles. Selon le secrétaire général de FO TEFP, les personnels qui contrôlent les entreprises agricoles ont le sentiment de ne pas être soutenus par les pouvoirs publics, 20 ans après l’assassinat de deux agents de l’inspection du travail et de la MSA, Sylvie Trémouille et Daniel Buffière, venus contrôler une exploitation agricole
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