Article paru dans FO Magazine n°53 de mai 1971 |
Les cinq ouvrages, publiés depuis 1964, ont un point commun : ils fixent la place de la Commune de Paris dans l’évolution du mouvement ouvrier, s’efforcent de définir son influence sur l’orientation idéologique du prolétariat et d’établir sa signification dans l’histoire des idées socialistes.
On sait que les socialistes, communistes et anarchistes se disputent encore l’héritage spirituel de la Commune, qui fut d’abord un soulèvement armé du peuple parisien contre la débâcle militaire et contre la capitulation du gouvernement versaillais devant la Prusse de Bismarck.
Cette insurrection populaire eut son prolongement immédiat dans l’institution de la Commune qui voulait créer une société fondée sur la justice, la démocratie et la liberté. Ce n’était qu’une « utopie », disait-on, puisque, à peine installée, il lui fallait préparer la résistance contre les offensives et l’encerclement des armées versaillaises. Les 72 jours d’existence de la Commune ne lui ont pas permis de réaliser, d’une manière définitive, les projets sociaux révolutionnaires en faveur de la classe ouvrière, mais les quelques décrets et mesures qu’elle avait eu le temps de mettre en application, attestent un véritable esprit démocratique et son souci primordial d’améliorer la condition ouvrière, et de résoudre les problèmes sociaux urgents.
La défaite de la Commune a jeté le peuple dans une situation dramatique, mais ce mouvement révolutionnaire demeure pourtant, à travers les temps, comme un symbole du combat héroïque pour la libération et l’émancipation des hommes.
MM. Winock et J.P. Azéma ont reconstitué dans les Communards [1], les premiers jours d’enthousiasme du peuple parisien, la politique sociale et l’activité constructive, les élections, les inquiétudes, les luttes entre la Commune et le Comité Central, la vie parisienne sous la Commune, l’institution du Comité de Salut Public qui voulait gouverner avec la dictature militaire, l’investissement de Paris par les troupes des généraux Galliffet et Trochu, l’agonie et la fin tragique de la Commune.
La répression fut terrible. Elle est évoquée par Jacques Rougerie dans les Procès des Communards [2]. Plus de 36 000 prisonniers furent traduits devant 26 conseils de guerre. Ce n’était,
, remarque l’auteur.
L’ouvrage de Henri Lefebvre, La proclamation de la Commune [3], étudie le soulèvement populaire de 1871 et son aboutissement à l’institution de la Commune du 26 mars, au point de vue de la critique marxiste, avec des références abondantes de Marx et de Lénine. Ses interprétations sont très discutables, mais en revanche, il donne une description exacte de la « chaude » journée du 18 mars et de celle du 26 mars, en restituant, jour par jour, l’atmosphère exaltante et passionnée de Paris, à l’heure révolutionnaire.
La Commune de Paris, écrasée dans le sang des ouvriers, a laissé cependant pour l’avenir non seulement un souvenir historique admirable, mais un programme constructif que la démocratie républicaine réalisera plus tard : la séparation de l’Église et de l’État, l’enseignement laïc et obligatoire, la législation des syndicats et des associations ouvrières et une législation du travail. C’est dans ses « anticipations » hardies que résident l’originalité et la portée sociologique de la Commune de Paris.
Pendant la Commune, les Versaillais, les réactionnaires et les cléricaux avaient désigné les femmes révolutionnaires et les femmes du peuple comme « pétroleuses » qui, selon les calomnies les plus vives, commirent d’horribles forfaitures et incendièrent Paris. Cette accusation resta longtemps attachée aux noms des milliers de femmes engagées délibérément dans la Commune, même après les événements historiques de 1871.
Aujourd’hui, après cent ans de recul, la signification de la Commune même, pour l’histoire objective, revêt un autre sens et offre une interprétation plus véridique.
Edith Thomas qualifie de pétroleuses
[4], le jeune historien n’avait pu voir sortir de la presse ce petit volume qu’il avait préparé avec un soin minutieux. Cependant, il eut juste le temps pour faire un choix parmi les poètes de la Commune, pour les présenter et les accompagner de notices biographiques et de notes éclairantes.
Jean-Pierre Chabrol a préparé cette attrayante anthologie lyrique de la Commune qui fut réellement le creuset du monde moderne
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TB