Loi travail : rien de nouveau au lest

Revue de presse par Michel Pourcelot

Manifestation contre le projet de loi Travail El Khomery le 9 mars 2016 à Paris. Photographie : F. Blanc / FO Hebdo - CC BY-NC 2.0 - flickr.com/force-ouvriere

Mobilisations et tactiques gouvernementales autour du projet de la « Loi Travail » ont été décortiquées par les médias ces derniers jours. Les interprétations de la presse divergent quant aux réécritures du projet : compromis, lâchage de lest pour faire passer l’essentiel, ratés, renoncements, jeux de rôles...

Le Parisien
« Le Premier ministre a présenté ce lundi une version "corrigée" du très contesté projet de loi Travail aux partenaires sociaux. Alors que l’avant-projet de loi, dévoilé dans notre journal le 17 février, a provoqué une levée de bouclier, le chef du gouvernement y voit "un nouveau départ". Il l’assure, la "nouvelle phase de concertation" a permis "d’enrichir, d’améliorer, d’approfondir cette réforme". "Dialoguer, dans une démocratie, ce n’est ni reculer, ni s’arc-bouter", plaide le chef du gouvernement ». Effectivement, avancer de trois pas et reculer d’un, ce n’est pas reculer, c’est avancer de deux pas. Un classique.

L’Express
« Ce que certains appellent un recul du gouvernement, c’est un foutage de gueule », a estimé Hélène Cavat, étudiante en troisième année de thèse de droit social. « Les militants CGT ont également évoqué "une régression". "Il n’y a aucun recul du gouvernement. On veut le retrait de ce projet de loi, purement et simplement", a insisté le secrétaire général du syndicat à PSA Poissy, Farid Borsali, alors que FO est majoritaire sur le site. »

Le Monde
« Des modifications très inspirées par les demandes de la CFDT : "Si les annonces se manifestent dans l’écriture du projet de loi, la CFDT considère que nous avons fait avancer le texte" : Laurent Berger, secrétaire général du syndicat, ne cachait pas sa satisfaction lundi, après la présentation de la nouvelle version de l’avant-projet de loi El Khomri, amendé sous la pression des syndicats et de la rue ». Une reculade bien rapide... sur des positions connues. Laurent Berger « a même estimé que le texte était désormais "potentiellement porteur de progrès pour les jeunes et les salariés". Rien de surprenant à cela, puisque l’objectif du gouvernement était justement de retrouver le soutien des syndicats réformistes. Et pour cela, il n’avait qu’à s’inspirer de leurs revendications ». Qui inspire l’air de rien.

Libération
« En amendant le projet de loi El Khomri, le gouvernement réussit son coup : il s’est épargné de vraies négociations et donne l’impression d’avoir entendu la rue et les syndicats ». Du moins certains... Quant au coup de théâtre, il pourrait répondre à un scénario : « les experts produisent dans un premier temps un projet provocateur mais défini en tant qu’il est optimal pour répondre aux besoins de la situation : tout y est, le langage, les objectifs, les moyens (...) ; la rue se mobilise, on l’entend, on l’écoute, elle paraît triompher et, repue, s’en retourne dans ses foyers ». Et le projet de loi, lui, part à l’Assemblée : « le gouvernement pourrait accepter de perdre dans la rue pour gagner dans l’hémicycle », comme le laisseraient supposer « les déclarations très récentes d’Emmanuel Macron (...) indiquant qu’il souhaite réintroduire au Parlement certaines des dispositions supprimées par Manuel Valls ». Loin de la valse-hésitation, on est plus dans la chorégraphie, avec lâchage de lest.

Michel Pourcelot Journaliste à L’inFO militante

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