MaPrimeRenov’, printemps 2025 : le feuilleton sur le mode cafouillage a mis quelques semaines avant de trouver son épilogue. Début juin, le ministère chargé du Logement a ainsi d‘abord annoncé la suspension cet été – du 1er juillet au 15 septembre – du dispositif de l’État créé en 2020, s’adressant aux particuliers et consistant – par un soutien financier (pouvant aller jusqu’à 90% de la facture pour des travaux d’ampleur, sous conditions) – en une incitation à entamer des travaux de rénovation énergétique et thermique. Cela dans le but de lutter contre les passoires thermiques (plus de 91 000 rénovations en 2024) et aussi dans la visée écologique de diminution de l’utilisation des énergies fossiles, en vue de la décarbonation.
L’arrêt momentané du dispositif visait les nouvelles demandes de dossiers. Nombre de ménages aux moyens modestes ayant programmé des travaux étaient dans l’inquiétude. Suite du feuilleton : Il a été précisé ensuite que l’arrêt concernerait seulement les travaux dits d’ampleur et non les travaux isolés ni ceux concernant les copropriétés. Dernier acte : le ministère a annoncé le 17 juin qu’il n’y aurait plus d’acceptation de nouveaux dossiers pour des travaux d’ampleur, dès le 23 juin et jusqu’au 15 septembre.
La fonte de l’enveloppe budgétaire
Dès la première annonce ministérielle, les professionnels de l’immobilier et ceux du bâtiment ont montré leur colère, lançant une mobilisation ce 24 juin et menaçant d’actions en juillet. De son côté, le ministère – qui doit rencontrer de nouveau à la mi-juillet ces secteurs professionnels inquiets d’un recul du nombre de chantiers – tire lui la sonnette l’alarme : et sur le coût du dispositif, et sur les fraudes.
Le dispositif MaPrimeRenov’ (les dossiers sont instruits par l’Agence nationale de l’habitat/ANAH) est doté en 2026 d’une enveloppe publique de 3,6 milliards d’euros. Mais le dispositif est en quelque sorte victime de son succès avec 2,5 ménages aidés depuis 2020. Rien qu’en 2025, quelque 122 000 ménages en ont été bénéficiaires dont 78 000 pour des travaux simples et une aide moyenne de 4 000 euros. Et 44 000 pour une rénovation globale, avec une aide moyenne de 40 000 euros. Les demandes se sont tant multipliées depuis le début d’années, que le ministère dit craindre l’utilisation totale de l’enveloppe budgétaire annuelle d’ici septembre.
Le montant total de la fraude estimé à 50 millions d’euros
Par ailleurs, note le ministère, le coût des travaux pour les rénovations d’ampleur augmente de 7% par rapport à 2024, alors même que l’inflation est autour de 2%. Des fraudes (devis gonflés par les entreprises, mandataires et Accompagnateurs Renov’ malhonnêtes,) sont donc suspectées. Il y en avait eu plus de 44 000 détectées l’an dernier. Le montant total des fraudes est estimé à 50 millions d’euros.
Le ministère a donc décidé de revoir les règles du dispositif pour demeurer dans l’enveloppe dédiée. Il évoque la possibilité de baisser des plafonds de travaux éligibles à une aide, de stopper le bonus d’aide spécifique aux logements les plus énergivores pour un recentrage du dispositif sur les passoires thermiques. La modification s’accompagnera d’un durcissement du statut et contrôle de certains acteurs, dont les mandataires. Des cas de sociétés fantômes, des coquilles vides mais qui empochent l’argent, ont même été constatés.
Des certifications bien coûteuses
Il entend par ailleurs impliquer davantage les entreprises fournisseurs d’énergie dans le financement de travaux pour des ménages modestes, cela en accordant un bonus à ces travaux, combiné à l’augmentation du nombre possible de certifications d’économie d’énergie (CEE, créés en 2005) accordées pour ces derniers. Ces certifications financent une part de l’aide (montant que fixe le fournisseur lui-même) à la rénovation énergétique globale. Rénovation qui sera alors réalisée par une entreprise professionnelle. Cette part des CEE dans l’aide à la rénovation devrait doubler, passant de 30% à 60%. Fin 2024, un rapport de la Cour des comptes pointait toutefois un dispositif CEE, compliqué, « aux résultats incertains », « coûteux pour les ménages », et comportant des fraudes. Demandant une « réforme structurelle », la Cour soulignait notamment le coût de ces CEE : 6 milliards d’euros par an, en 2022 et 2023. Un coût, remarquait-elle, qui au final se répercute dans les prix des énergies…