Chez Amcor Flexibles à Sarrebourg en Moselle, le bras-de-fer engagé par FO, organisation majoritaire à plus de 86%, face au projet de plan social annoncé en janvier, se durcit. Salariés et militants n’ont pas eu le temps de se réjouir de son retrait, annoncé par la direction le 13 mars après que l’avocat du comité social et économique (CSE) a mis en évidence une irrégularité juridique dans la procédure. Dès le lendemain, la direction a fait savoir qu’elle allait relancer une seconde procédure PSE. Laquelle concernerait toujours la suppression de 47 emplois sur un total de 229 (plus de 20% des effectifs). Selon la direction, elle devrait être notifiée mi-avril. Ce rebondissement n’entame en rien la combativité de FO : « Nous en avons encore sous la semelle », commente Hervé Juszczak, secrétaire général du syndicat. L’appel à « la grève illimitée à compter du 8 mars » reste toujours suivi sur le site qui tourne en 3X8 : « La production réalisée varie selon les jours, de 75% à 20% », explique-t-il. FO conteste toute motivation économique au plan social, « étant donné la bonne santé financière du groupe ». Le syndicat met aussi en avant les transferts de volumes qui ont été organisés par le groupe, du site mosellan vers d’autres entités françaises. Il exige l’arrêt de ces transferts ainsi qu’une étude sur le rapatriement des volumes concernés.
Ces revendications, une centaine de salariés les ont portées haut et fort, le 18 mars, au siège social du groupe Amcor à Zurich (Suisse). Deuxième mobilisation organisée par FO hors des frontières (la première a eu lieu à Bruxelles, en Belgique, en octobre, NDLR), elle a été rendue possible grâce à la solidarité locale. La soirée « 100% Vinyle » organisée le 2 mars par FO auprès des habitants de Sarrebourg a fait le plein, et permis d’affréter un deuxième bus pour Zurich. Dans la bataille qui se poursuit, FO et les salariés devraient pouvoir s’appuyer sur les élus locaux, favorables à « une nouvelle mobilisation avec la population ». « Le rapport d’expertise économique, remis début mars au CSE, montre qu’il y a des solutions alternatives à un PSE, sans départs contraints », appuie Hervé Juszczak. Le militant compte aussi sur la vigilance de l’administration du Travail, laquelle avait appelé la direction à améliorer les mesures du premier projet de PSE. Dans une lettre d’observations de 12 pages, datée du 16 février, elle jugeait insuffisantes plusieurs des mesures proposées, au regard des attendus de l’administration pour une éventuelle homologation de ce premier projet de PSE. « La direction s’en est toujours tenue au minimum, le Code du travail », dénonce le délégué syndical FO.
Chez Continental Automotive France, l’inquiétude grandit parmi les 1.500 salariés après que la direction France de l’équipementier automobile a annoncé, fin février, la suppression de 240 postes sur les sites de Rambouillet (Yvelines) et de Toulouse (Haute-Garonne). Celle-ci s’inscrit dans le plan mondial d’économies destiné à améliorer la profitabilité dans la perspective de la transition vers la mobilité électrique. Au total, 7.150 suppressions d’emplois sont prévues dans les fonctions support et Recherche-Développement (R&D), « au plus tard d’ici 2025 ». A l’initiative de FO, majoritaire à plus de 70% sur le site de Rambouillet, trois assemblées générales y ont déjà été organisées et les salariés ont débrayé le 7 mars pour dire « non » aux licenciements.
« Il est inacceptable que les salariés paient le manque d’anticipation de la direction », martèle Philippe Penin, DSC FO, qui craint pour la pérennité du site. Lequel a déjà subi une baisse drastique de ses effectifs (plus de mille suppressions de postes au total à la suite des deux PSE, conduits en 2006 et 2008). Ici, l’externalisation de 60 postes R&D - annoncée via une newsletter - s’ajouterait aux futures suppressions d’emplois. Le syndicat a contacté sous-préfecture et élus locaux pour rappeler que Continental Automotive France a touché plusieurs dizaines de millions d’aides publiques, notamment en tant que co-lauréat (au sein d’un consortium) d’un appel à projets CORAM 2022 du plan France 2030 visant le développement de nouvelles technologies. Le projet récompensé concerne le développement d’une application audio embarquée devant réaliser des autodiagnostics et rapports de maintenance du véhicule, selon le dossier de presse ministériel. « Cette situation indigne les salariés dont l’emploi est aujourd’hui menacé », appuie le militant, rappelant que Continental Automotive France a participé l’an passé au sommet « Choose France » 2023 et « laissé croire à la création de 500 emplois ».
Chez Thales Alenia Space (TAS), branche aérospatiale du groupe Thales, FO, première organisation, est vent debout face à l’hémorragie drastique de compétences qui se prépare d’ici 2025, « et met en péril l’avenir immédiat de l’entreprise ». Le 5 mars, la direction a annoncé une hausse inattendue des suppressions de postes annoncées l’an passé : elle les a quasi-quadruplés, en les portant de 317 à 1.000 en France (sur les 4.500 postes existants sur les sites de Cannes et Toulouse). Ce « redimensionnement » serait conduit par le biais essentiellement du redéploiement des salariés concernés sur d’autres activités du groupe. Un choix que TAS France motive par la baisse de l’activité dans les télécoms civiles.
« Non, il s’agissait de faire monter le cours de bourse », dénonce Benoît Lepeix, délégué syndical central de FO TAS, rappelant que « le carnet de commandes à moyen terme est plein ». « Le marché du spatial est en pleine reconfiguration, mais ces suppressions de postes ne répondent pas aux enjeux de fond et d’avenir qu’il faut traiter, pour assurer la pérennité de l’entreprise et de ses emplois. La direction met la charrue avant les bœufs pour des considérations financières. Elle va mettre en difficultés la R&D, essentielle dans notre domaine », renchérit Catherine Massines, secrétaire FO du CSE-C de TAS France qui exige « aucun départ contraint et un projet ambitieux ». FO attend la remise mi-mai du rapport d’expertise économique commandité par le CSE-C dans le cadre d’un droit d’alerte économique. « Après, prévient la militante, FO ira frapper à toutes les portes, jusqu’à celles de l’État, actionnaire majoritaire, pour faire entendre ses revendications ». Des contacts ont déjà été pris avec les élus locaux.