Cela fait deux ans qu’il impose son rythme sur le Tour de France. En 2012, Chris Froome était de toute évidence le plus fort du peloton en montagne. Il avait même bien pris soin d’ostensiblement le montrer en attaquant son leader au sein de l’équipe Sky, Bradley Wiggins, qui portait alors le maillot jaune, avant de s’arrêter, rappelé à l’ordre dans l’oreillette. Le Britannique, né au Kenya, avait respecté les consignes d’équipe et accepté de terminer deuxième, derrière son compatriote, sur les Champs-Élysées, mais il avait montré au monde entier qui était le plus fort. Un an plus tard, plus de Wiggins, parti conquérir – en vain – le Giro : Froome avait le champ libre. Il ne s’en est pas privé : le Tour 2013 a été une course à sens unique en sa faveur. Dès les Pyrénées il avait écoeuré la concurrence à Ax-3-Domaines, avant de creuser un peu plus son avance dans le contre-la-montre du Mont-Saint-Michel. Il ne lui restait plus qu’à gérer dans les Alpes pour gagner à Paris avec une confortable avance : 4’20’’ sur Nairo Quintana, 5’04’’ sur Joaquim Rodriguez, et 6’27’’ sur Alberto Contador...
Un an s’est écoulé et revoilà Christopher Froome sur les routes du Tour de France. Fort de ses deux performances précédentes, le coureur de la team Sky est logiquement le grandissime favori à sa propre succession sur la Grande Boucle. Mais ses adversaires veulent y croire. Il faut dire que le tableau de marche est moins impressionnant que l’an dernier. Avant de gagner le Tour, en 2013, Froome avait déjà survolé la plupart des courses par étapes qu’il avait disputées. Cela avait commencé dès février sur le Tour d’Oman, puis cela s’était poursuivi sur le Critérium international en mars, le Tour de Romandie en avril et le Critérium du Dauphiné en juin. Seul Tirreno-Adriatico lui avait échappé, pour 23 secondes seulement, devancé par Vincenzo Nibali sur une étape dantesque et au scénario improbable, marquée par un mur aux pentes à plus de 25% et une pluie diluvienne.
« Le coureur est logiquement le grandissime favori à sa propre succession »
Cette fois, la domination de Froome est bien moins évidente. Sa saison a fort bien démarré, avec un nouveau succès sur le Tour d’Oman, mais le Britannique a ensuite connu plusieurs pépins : un mal de dos qui l’a contraint à déclarer forfait pour Tirreno-Adriatico, puis une bronchite qui l’a privé de Liège-Bastogne- Liège. Entre les deux, il n’a pris « que » la sixième place du Tour de Catalogne, son pire résultat sur une course par étapes World Tour depuis deux ans. En avril il s’est néanmoins rassuré en remportant assez facilement le Tour de Romandie. Mais l’ensemble est moins impressionnant, de même, d’ailleurs, que la force collective de l’équipe Sky. Insubmersible en 2013, la formation britannique cumule les pépins et les désillusions en 2014. De quoi donner de l’espoir aux adversaires du « Kenyan blanc ».