Pour le Premier ministre, M. Manuel Valls, en ce 4 octobre « le site d’Alstom de Belfort est sauvé » et ce « grâce à la mobilisation de l’État et à l’engagement de tous ».
Ce même mardi, les syndicats du groupe, dont FO organisaient une nouvelle manifestation sur le site. Les salariés étaient dans l’attente de mesures susceptibles de sauver le site et les emplois de manière pérenne.
A en croire le Premier ministre, les salariés ont de quoi être totalement rassurés à l’issue d’une réunion qui a débouché sur des annonces. Cependant, à la lumière des informations qu’ils ont reçues, ils ne le sont pas tout-à fait explique Philippe Pillot, le délégué syndical central FO d’Alstom.
A l’issue de la réunion qui se tenait dans la matinée ce mardi 4 octobre entre l’État (actionnaire à 20% d’Alstom), la direction du constructeur ferroviaire et les syndicats dont FO, les salariés sont certes apaisés quant à l’avenir immédiat du site. Reste que de grandes incertitudes demeurent "sur les perspectives au-delà de deux ans" souligne Philippe Pillot.
La réunion tripartite qui se tenait ce matin en présence du secrétaire d’État à l’Industrie, M. Christophe Sirugue était très attendue des syndicats guettant les annonces du gouvernement et de la direction d’Alstom. Des annonces censées permettre la pérennisation du site et de ses emplois.
Les commandes et investissements annoncés
Lors de cette rencontre, le gouvernement a annoncé qu’il commandait au constructeur ferroviaire -et pour 450 millions d’euros- quinze TGV à étage destinés aux lignes Intercités Bordeaux-Marseille et Montpellier-Perpignan.
Il a confirmé aussi la commande par la SNCF et pour 200 millions d’euros de six autres TGV destinés eux à la ligne Paris-Turin-Milan. Ces deux commandes induisent la fabrication de 42 motrices. Elles seront assemblées à Belfort, le site historique du groupe.
Ces deux contrats apporteront par ailleurs de l’activité aux usines de La Rochelle, Ornans et Le Creusot.
A ces deux commandes s’ajoute celle de vingt locomotives diesel dépanneuses. Elles seront fabriquées à Belfort.
Autres annonces : la direction d’Alstom investira 40 millions d’ici 2018 dont trente millions seront destinés au développement et à la production d’un nouveau genre de locomotive de manœuvre hybride ou diesel.
Cinq autres millions iront à la modernisation de l’outil industriel à travers le développement et la modernisation des ateliers de maintenance ferroviaire de Belfort.
Cela s’accompagne d’un projet de doublement des effectifs dédiés à cette activité, soit 150 salariés à terme.
Un autre investissement de cinq millions devra permettre lui une diversification de la production du site de Belfort.
La direction annonce ainsi sa volonté d’orienter cette production vers d’autres types de trains que les TGV mais aussi vers la construction de bus électriques. Ces derniers sont toutefois encore à l’état de projet. « Il faut élargir la palette de compétence du site de Belfort » explique le P-DG d’Alstom, M. Henri Poupart-Lafarge.
Les collectivités locales, dont Belfort, annoncent quant à elles qu’elles participeront pour un million d’euros au soutien du site industriel. Elles paieront ainsi l’électrification d’une voie ferrée allant jusqu’à l’atelier de maintenance. Cela permettra que le site puisse accueillir des trains en révision.
« On a réveillé les pouvoirs publics »
Cette réunion du 4 octobre a débouché aussi sur l’annonce d’un investissement de 30 millions d’euros dans les deux prochaines années par Alstom et l’État (via l’agence de l’Environnement et de la maîtrise de l’Energie/ADEME). Cet investissement sera consacré à la plate-forme de développement du TGV du futur, appelé aussi TGV à grande vitesse.
« Toutes ces annonces constituent bien sûr des points positifs » insiste Philippe Pillot se réjouissant en premier lieu que le projet annoncé le 7 septembre dernier du transfert de l’activité du site de Belfort d’ici 2018 à Reichshoffen (Alsace) soit officiellement abandonné. Ce projet mettait sur la sellette 400 des 480 emplois de l’usine de Belfort et plus de mille emplois dans la sous-traitance.
Toutefois n’oublie pas le délégué syndical central FO, « pour que ce projet soit abandonné, il a fallu réveiller les pouvoirs publics en sursaut et les contraindre à réagir ! »
Alors souligne-t-il que les syndicats et particulièrement FO « avaient tiré depuis plusieurs années déjà la sonnette d’alarme auprès des pouvoirs publics concernant la faible activité du site de Belfort et plus largement des sites français du groupe », il a fallu que la direction d’Alstom « lance cette annonce en forme d’électrochoc » pour que les pouvoir publics réagissent.
Cette réaction a été aussi largement poussée par la « mobilisation massive et immédiate des salariés d’Alstom. Si tel n’avait pas été le cas, rien n’aurait bougé ».
L’incertitude sur le TGV du futur
Les annonces faites ce jour par l’État et le groupe Alstom apaisent certes mais ne font pas taire les inquiétudes explique Philippe Pillot. En effet, ces annonces n’ont pas fait état d’un calendrier très précis concernant les commandes. Ce caractère flou renvoie aux craintes portant sur l’évolution prochaine des emplois sur le site.
« Nous craignons que tout cela acte d’une adaptation à la baisse des effectifs du site. Il y a en effet un gros risque de sous-charge d’activités d’ici quatre ans » indique Philippe Pillot. Le militant précise en effet que « le début de mise en fabrication du TGV du futur n’interviendra pas a priori avant 2021 ».
Or d’ici là en effet, la commande des 21 TGV aura été honorée explique Philippe Pillot précisant qu’actuellement « Alstom sort un TGV par mois ». Il est ainsi particulièrement important pour Belfort que la plate-forme ADEME de développement du TGV du futur « fonctionne et permette d’atteindre les objectifs fixés, cela afin d’obtenir le marché » et qu’il n’y ait pas de rupture dans les commandes.