La question de l’obtention de recettes publiques supplémentaires est désormais un débat national majeur. Rien d’étonnant. Depuis 2017, les mesures successives de baisse d’impôts ont abouti à une perte de recettes fiscales à hauteur de 62 milliards, estimait la Cour des comptes en 2024. De son côté, début juillet, un rapport sénatorial chiffrait à 211 milliards d’euros en 2023 l’ensemble des aides publiques aux entreprises. Avec entre autres des dépenses fiscales (dont crédits d’impôts) représentant un manque à gagner de 88 milliards d’euros et des allégements de cotisations sociales, à hauteur de 75 milliards d’euros. Mais les mesures pour accroître les recettes et en visant les ultra-riches et les grandes entreprises restent minimes, quand elles ne sont pas repoussées. Ainsi, la contribution fiscale supplémentaire des ménages à hauts revenus (au-delà d’un revenu fiscal de référence de 250 000 euros pour une personne seule et 500 000 pour un couple), initiée fin 2024 et prévue primitivement pour trois ans (pour un rendement annuel de moins de 2 milliards d’euros), n’est, pour l’instant, maintenue qu’en 2025. Le nouveau Premier ministre, Sébastien Lecornu, a déjà indiqué son opposition à une nouvelle forme (taxe Zucman) de surtaxation des hauts patrimoines, il écarte par ailleurs un retour de l’impôt sur la fortune. L’ISF, supprimé en 2018, consistait en une surimposition dès un patrimoine (immobilier et actifs financiers) net de 1,3 million d’euros. Affichant un rendement de près de 5 milliards d’euros, il concernait 350 000 ménages. L’IFI, qui l’a remplacé ― payé en 2024 par 186 000 ménages ―, n’impose que le patrimoine immobilier net (au-delà d’une valeur de 1,3 million d’euros). En avril dernier, la DGFIP notait que l’IFI (avec un rendement de 2,2 milliards d’euros en 2024) ne représente que 0,5 % des recettes fiscales nettes de l’État.
Fraudes : une lutte aux moyens tronqués
Les très grandes entreprises s’alarment quant à elles (tel Bernard Arnault, patron de LVMH) d’une éventuelle poursuite en 2026 de la surtaxation des bénéfices (440 entreprises aux chiffres d’affaires supérieurs à un milliard d’euros sont concernées), pour une recette de 4 à 8 milliards d’euros. L’obtention de recettes supplémentaires passe par la lutte contre les fraudes, met en avant quant à lui l’exécutif depuis des mois. Le 30 juin était promulguée une loi contre les fraudes aux aides publiques (en matière de rénovation énergétique, de formation…). Par ailleurs, un projet de loi de lutte contre la fraude fiscale (estimée entre 60 et 100 milliards par an) et sociale (estimée à 13 milliards d’euros, du fait principalement des entreprises) devrait être présenté au Parlement à la mi-octobre. Reste que ces luttes nécessitent des moyens, dont des effectifs publics. Or… en octobre dernier, un rapport de la commission des finances de l’Assemblée rappelait que « plus du quart des effectifs de la DGFIP » ont disparu en quinze ans. Et, entre 2014 et 2023, ce sont 20 % des moyens humains du contrôle fiscal qui ont été supprimés (…), et ce, alors même que la lutte contre la fraude fiscale a été érigée en priorité par les gouvernements de ces dernières années
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