Professeurs des écoles en majorité, du secondaire, mais aussi médecins et assistantes sociales de l’Éducation nationale, personnels chargés de l’accompagnement des élèves en maternelle (Atsem) et de ceux en situation de handicap (AESH), spécialistes invités… Au fil de leurs témoignages, dans la grande salle de la confédération FO, ils ont dressé un tableau effrayant. Le tableau d’enfants fragiles, abandonnés au milieu d’un monde qui n’a plus les moyens de répondre à leurs besoins spécifiques. Le tableau d’enseignants et de personnels à bout de forces, luttant quotidiennement pour gérer l’ingérable et se défaire du manteau de culpabilité dont l’administration cherche le plus souvent à les recouvrir quand ils n’y arrivent plus. Le tableau de familles déçues et meurtries.
Comment en est-on arrivé là ? Le droit à l’éducation est garanti à chacun afin de lui permettre de développer sa personnalité, d’élever son niveau de formation initiale et continue, de s’insérer dans la vie sociale et professionnelle, d’exercer sa citoyenneté
, stipule le premier article du code de l’éducation. Pour concrétiser ce droit, des classes et des établissements spécialisés ont vu le jour au sein de l’Éducation nationale, avec un personnel spécifiquement formé et exclusivement dédié aux élèves handicapés et/ou en difficulté.
Le ministère reconnaît les difficultés, en tirera-t-il les conclusions ?
Mais la survie de ces structures spécialisées est en jeu, du fait des suppressions de postes, voire de fermetures d’établissements, comme celles de deux internats dans le Puy-de-Dôme et le Cantal.
Avec la loi Montchamp (2005) puis la loi Peillon de refondation de l’école (2013), l’inclusion systématique des enfants handicapés dans des classes ordinaires est devenue le maître mot, quels que soient la nature et le degré du handicap. Des « dispositifs » ont été mis en place au sein des classes ordinaires, sous la responsabilité de l’enseignant qui doit, en plus de cette nouvelle tâche, continuer à faire la classe aux autres élèves, avec l’aide de personnels précaires, sous-formés et sous-payés (Atsem et AESH).
Austérité oblige, ces dispositifs manquent eux-mêmes de plus en plus de moyens. Résultat, l’inclusion en milieu ordinaire est encore plus brutale et traumatisante.
Munis des témoignages recueillis dans le cadre de sa conférence, mais aussi des centaines de cas dont elle a été informée par le biais des CHSCT, la fédération FO a transmis un état des lieux édifiant au ministère où elle a été reçue le 18 juin. Le ministère a reconnu les difficultés. Il nous a semblé conscient que la situation est intenable, explosive. Des grèves éclatent sur cette question-là
, explique Clément Poullet, secrétaire fédéral de la FNEC FP, avant d’ajouter, une question reste aujourd’hui : le ministère répondra-t-il aux revendications des personnels ?
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Le ministère reviendra-t-il sur le contenu de la nouvelle certification d’enseignant spécialisé, qui ne tient plus compte des spécificités des différents handicaps ? Acceptera-t-il d’en terminer avec l’inclusion systématique dans des classes ordinaires et d’analyser les situations au cas par cas ? D’en finir avec les suppressions d’effectifs ? Tout se résume en réalité à une seule question : le gouvernement acceptera-t-il de ne plus compromettre l’avenir de l’enseignement spécialisé pour des raisons budgétaires ?