L’OIT : des normes essentielles aux droits des travailleurs

InFO militante par Ariane Dupré, L’inFO militante

En 1946, l’OIT devient la première institution spécialisée des Nations unies. À gauche, Edward Phelan, son directeur général, à droite, Trygve Lie, le secrétaire général des Nations unies. Image OIT.

Créée en 1919 par le traité de paix de Versailles à l’issue de la Première Guerre mondiale, l’Organisation internationale du travail (OIT) tient toujours un rôle essentiel, permettant de faire avancer la condition des travailleurs dans le monde. Le préambule de la Constitution de l’OIT affirme qu’une paix universelle et durable ne peut être fondée que sur la base de la justice sociale. Un objectif toujours actuel. En juin 2023, lors de la 111e Conférence internationale du travail – sorte de parlement de l’organisation ―, Gilbert F. Houngbo, le directeur général de l’OIT, a appelé ainsi à appuyer davantage sur l’accélérateur de la justice sociale face aux inégalités du travail qui s’accroissent, et alors que 214 millions de travailleurs gagnent moins du seuil de pauvreté. Agence de l’ONU, l’Organisation des Nations unies, l’OIT, qui compte aujourd’hui 187 États membres, a une formation tripartite : gouvernements, syndicats (dont bien sûr FO) et employeurs y sont représentés pour élaborer un cadre de droits pour les travailleurs et lutter contre leur exploitation. Au sein de la Conférence internationale du travail, qui se réunit une fois par an en juin à Genève, les délégations tripartites des États sont chargées de bâtir des normes internationales du travail, via l’adoption de conventions et de recommandations (des principes directeurs). Les conventions ont rang de traités internationaux, ouverts à la ratification des États membres. Ratifier une convention n’a rien d’anodin car elle entraîne l’obligation juridique, donc la contrainte, pour les pays, d’en appliquer les dispositions. En un siècle, l’OIT a adopté près de deux cents normes internationales, sur des thèmes allant de la journée de huit heures à l’égalité salariale entre femmes et hommes. La France a ratifié 129 conventions, dont la dernière en 2019 sur l’interdiction de la violence et du harcèlement au travail. L’OIT est également à l’origine de conventions fondamentales s’appliquant à tous les États membres, comme l’abolition du travail des enfants ou la liberté syndicale.

Un rôle de constructeur, de vigie, de contrôleur…

L’OIT, qui rédige par ailleurs des rapports et propose des informations statistiques, dispose d’une commission de l’application des normes, chaque État membre devant présenter un rapport annuel sur l’application nationale des conventions signées. Le conseil d’administration du bureau de l’OIT peut en outre diligenter des enquêtes qui font grand bruit. L’organisation a ainsi créé quatorze commissions d’enquête concernant des allégations de non-respect grave des conventions. À plusieurs reprises, dont en 2022, l’OIT a ainsi alerté sur le cas du Myanmar, l’appelant urgemment à cesser sa répression sanglante des syndicats et le recours au travail forcé. L’organisation peut aussi être saisie par les syndicats. En 2011, à la suite d’une saisine de FO, l’OIT a ainsi épinglé la France sur le travail du dimanche dans les enseignes de bricolage. Elle estimait que l’augmentation des dérogations au repos hebdomadaire obéissait à des préoccupations économiques, sans prendre en compte l’impact social pour les salariés.

Ariane Dupré Journaliste à L’inFO militante

L’inFO militante Le bimensuel de la Confédération

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