Les Pimkie à l’heure d’une ultime et rude négociation

Emploi et Salaires par Valérie Forgeront

Soutien syndical aux employes de la chaine de pret a porter Pimkie le 17 janvier 2018. © Ian HANNING/REA

C’est l’ultime négociation. Depuis ce matin 28 février, la direction de Pimkie et les syndicats dont FO, discutent encore une fois des termes du Plan de Départ Volontaire (PDV). En l’absence d’accord, la direction pourrait décider unilatéralement des modalités de ce plan qui impacte près de 300 salariés. Certains partiront en effet volontairement, d’autres seront mutés, d’autres encore risquent un licenciement. Les discussions avec l’enseigne de prêt-à-porter du groupe Mulliez sont particulièrement tendues et les syndicats bataillent ferme pour améliorer ce PDV notamment le montant des primes supra-légales. Ils ont appelé depuis le 26 février à une grève de trois jours assortie de rassemblements et d’actions diverses telle une distribution de tracts lundi près du siège de la société à Villeneuve d’Ascq (Nord).

Cette réunion de négociation du mercredi 28 février est en quelque sorte celle de la dernière « chance » au plan de l’amélioration du plan de départs volontaires (PDV) présenté le 8 janvier par la direction de l’enseigne de prêt-à-porter Pimkie. Les syndicats, dont FO, et la direction de cette entreprise du groupe Mulliez (auquel appartient Auchan, les magasins Jules, Brice…) discutent donc depuis ce matin, 8h45, des modalités du plan.

Les syndicats ont jusqu’au 5 mars pour se prononcer sur le texte issu de la négociation indiquait hier 27 février une des négociatrices, Séverine Salperwyck, déléguée syndicale FO.

La direction a prévu un calendrier rythmé au pas de charge : après cette séance de négociation dont elle entend faire un ultime rendez-vous, le texte issu de la négociation devrait être présenté le 8 mars au CHSCT de Pimkie puis le 9 mars faire l’objet d’une information-consultation devant les instances (CE et CCE) avant d’être adressé à la Direccte (Direction régionale des Entreprises, de la Concurrence, de la Consommation, du Travail et de l’Emploi).

Premières fermetures au 31 mars prochain

Toutefois, si la négociation de ce jour ne débouche sur aucun texte d’accord la direction prendra une décision unilatérale rappelle avec crainte la militante FO indiquant qu’un accord est très compromis. La précédente négociation le 21 février avait échoué. Depuis plusieurs semaines, les syndicats dont FO doivent en effet batailler ferme. Et pour cause. Le plan est d’envergure et l’enseigne Pimkie voudrait bien le réaliser à moindres frais.

Après un précédent plan qui en 2009 avait supprimé 190 postes dans le secteur des dépôts, la direction de Pimkie a annoncé le 8 janvier (lors d’un comité central d’entreprise) l’organisation de départs à travers une « rupture conventionnelle collective » (RCC), le nouveau dispositif prévu par les ordonnances portant sur la réforme du Code du travail. La direction a invoqué un résultat déficitaire depuis 2015 et un chiffre d’affaires en recul de 10% en 2017.

Elle annonçait alors la fermeture sur trois ans de 37 magasins (sur 321 magasins) et la suppression de 208 emplois (83 en magasins, 125 au siège et service logistique). Dès le 31 mars prochain, il y aurait les premières fermetures de magasins indique Séverine Salperwyck.

Au moins 291 emplois impactés

Les syndicats n’ont toutefois pas signé l’accord majoritaire nécessaire à la mise en œuvre de ce dispositif. Pour obtenir un tel accord, il fallait la signature d’un ou de plusieurs syndicats affichant au total une représentativité de plus de 50% des suffrages aux élections professionnelles.

Pimkie qui compte en France 321 magasins et 1 700 salariés a alors programmé un « plan de départs volontaires » (PDV). La Direction annonçait toujours 208 emplois impactés. Or, souligne FO il y a davantage de salariés concernés que la Direction ne le prétend. Les syndicats dont FO-Pimkie chiffrent en effet cet effectif à 291. Explications.

Les 37 magasins appelés à fermer emploient 166 salariés. Chacun des contrats de travail des salariés des magasins Pimkie disposent d’une « clause de mobilité ». Selon celle-ci, les vendeurs (ses) doivent accepter une mobilité si on leur propose une mutation dans un magasin situé dans un périmètre de cinq kilomètres. Pour les adjoint(e)s ce périmètre est élargi à vingt kilomètres et pour les responsables de magasins à trente kilomètres.

Or explique Séverine Salperwyck pour 83 salariés de ces 37 magasins supprimés la clause de mobilité ne peut s’appliquer puisqu’il n’existe pas de magasin situé dans les périmètres fixés par cette clause.

Une clause de mobilité inapplicable

Pour les syndicats dont FO, ces 83 salariés sont donc concernés par les mesures PDV car s’ils n’acceptent pas un départ volontaire, à l’amiable, ils devront partir de manière contrainte. Cela relève donc de licenciements économiques lesquels doivent bénéficier des mesures du PDV (encadré dans ce cas par un PSE/plan de sauvegarde pour l’emploi).

Concernant les 83 autres salariés des 37 magasins condamnés à fermer, il y a aussi problème indique la déléguée syndicale FO. Dans le cadre de l’activation possible de la clause de mobilité (il y a bien des magasins dans le périmètre prévu par la clause) La Direction de Pimkie entend imposer à ces salariés de changer de postes en allant travailler dans des magasins qui vont alors se retrouver en sureffectifs puis les effectifs entiers de magasins seraient déplacés dans d’autres boutiques.

A Marseille par exemple souligne Séverine Salperwyck certains magasins compteraient alors trois à quatre responsables. Que veut la Direction ? Mettre les salariés, dont les déplacés, en concurrence puis faire le tri ? Détériorer leurs conditions de travail au risque de créer de graves troubles psychologiques et jusqu’à leur faire jeter l’éponge ? Et les licencier alors pour motifs personnels ?

Que les salariés aient le choix !

Lors de précédentes séances de négociations, les syndicats dont FO avaient bien sûr évoqué le cas de ces salariés. La direction proposait de concevoir un texte d’accord mais hors du cas des 208 autres salariés impactés. Elle annonçait aussi sans sourciller que ces 83 salariés ne bénéficieraient pas des mêmes mesures que les autres, notamment en matière de prime supra-légales.

Pour FO, ce projet est inadmissible. Le syndicat souhaitait demander lors de la négociation du 28 février que ces salariés aient le choix entre accepter la mobilité ou partir.

Plus largement, les syndicats négocient aujourd’hui le montant des primes supra-légales. A la veille de cette séance de négociation FO indiquait que celles-ci ne sont toujours pas à la hauteur même si les syndicats ont obtenu que la direction accorde pour ces primes 100 euros de plus par année d’ancienneté.

A la veille de cette ultime réunion de négociation, le montant des primes supra légales variaient donc selon l’ancienneté de 600 euros brut par année d’ancienneté (de zéro à deux ans d’ancienneté) à 1 000 euros par année d’ancienneté (pour vingt ans ou plus d’ancienneté) la direction accordait un montant plancher de 4 000 euros proratisé mais aussi un montant plafond de 18 000 euros.

Le refus de licenciements à bas coûts

Pour les salariés de plus de cinquante ans, elle accordait une prime de 30 000 euros bruts. Un salarié âgé de 49 ans avec plus de vingt d’ans d’ancienneté n’est donc pas concerné par ces 30 000 euros et ne percevrait donc que 18 000 euros s’indignait Séverine Salperwyck assurant qu’il fallait renégocier ces montants.

Les syndicats qui exigent par ailleurs des mesures de reclassements dans le groupe pour les salariés quittant leurs postes et contestent le caractère de « rupture amiable » des départs qui sont en réalité contraints demandent 10 000 euros brut pour tous les partants et 2 500 euros par année d’ancienneté.

Les organisations s’inquiètent aussi pour 125 autres salariés, ceux du siège et de la logistique. Dans le secteur du dépôt, la direction veut supprimer des postes au sein d’une catégorie professionnelle indique la déléguée FO. Or souligne-t-elle cela contraindrait certains salariés à muter sur place vers un poste d’une autre catégorie professionnelle. Par exemple une salariée préparatrice de commandes pourrait devenir manutentionnaire… Si une salariée refuse ce changement, elle pourrait être licenciée pour motif personnel. Les syndicats dont FO refusent ce type de licenciements à bas coût. Ce mercredi à 17h30, la séance de négociation était toujours en cours. Elle pourrait durer tard dans la soirée.

Valérie Forgeront Journaliste à L’inFO militante