Mauvaise ambiance au Club Montmartre

Les articles de L’InFO militante par Sandra Déraillot, L’inFO militante

©Xavier POPY/REA

Rien ne va plus au Club Montmartre basé dans le 9e arrondissement à Paris. Départs volontaires de salariés et licenciements en nombre, burn-out et arrêts de travail à l’avenant, l’ambiance de travail dans ce club de jeux parisien est pour le moins tendue. Le tribunal vient de condamner l’entreprise pour entrave au fonctionnement du CSE. Et une expertise du risque psycho-social est attendue avec impatience par les délégués FO.

La société Club Montmartre, qui exploite une salle de jeux dans le 9e arrondissement vient d’être condamnée par le tribunal judiciaire de Paris. Le comité social et économique (CSE) de l’entreprise, avec le soutien de la FEC-FO, avait en effet assigné en référé l’employeur qui entravait son bon fonctionnement : non versement de la subvention annuelle et du budget relatif aux activités sociales et culturelles, mais aussi absence de consultation du CSE alors que trois réunions sont obligatoires chaque année. Le juge a donc enjoint à l’entreprise de verser les budgets prévus par la loi et d’organiser les consultations sous astreinte de 2000 € par jour de retard. Il la condamne également à verser la somme provisionnelle de 5000 € au comité en réparation du préjudice subi.

Mais les difficultés dans cette entreprise ne s’arrêtent pas là et la décision judiciaire n’est qu’une première victoire pour des salariés soumis à un véritable management toxique. Les ennuis ont commencé en 2020, résume Gaël Chuzeville, croupier formateur au Club Montmartre depuis 2014 et actuellement trésorier du CSE. A l’époque l’entreprise a proposé de baisser nos salaires durant six mois, de 5 à 15 % en fonction de notre niveau de rémunération, afin d’éviter que les fermetures liées à la crise sanitaire ne conduisent à des licenciements, poursuit le représentant. Les délégués syndicaux (il y avait alors deux syndicats dans l’entreprise dont FO, Ndlr) ont accepté, mais la direction a voulu ensuite imposer d’autres économies et les DS ont refusé. A partir de là, une forme de harcèlement moral s’est abattue sur les cadres.

Des départs de salariés en série...

Depuis la reprise de l’établissement en 2018 par Frédérique Ruggieri, 85 salariés (l’entreprise en compte 140) ont volontairement quitté la belle salle bleu nuit, ses hauts plafonds et ses moulures ton sur ton de la place de Clichy. Notre métier est difficile, il faut travailler la nuit, les week-ends, les jours fériés, donc il y a habituellement un certain turn-over, observe Gaël Chuzeville. Mais là c’est beaucoup plus. Sur les deux dernières années, cinq responsables des ressources humaines se sont succédés. Et tous les membres du comité de direction (qui sont des postes de travail spécifiques aux cercles de jeux) ont été renouvelés. Ces départs ont également concerné des élus du CSE, qui s’est retrouvé tellement dégarni que la direction a tenté d’y intégrer de nouveaux membres, hors élection. Ce qui est illégal. Des élections partielles doivent avoir lieu le 18 juillet pour remplacer les départs (4 titulaires et 7 suppléants).

Pour tenter d’objectiver la situation sociale, le CSE a collecté de nombreux témoignages de salariés, victimes de pressions au quotidien et de burn-out. Luisa Poupon Labruyère, secrétaire du CSE et référente harcèlement, avait d’ailleurs fait remonter plusieurs d’entre eux, anonymisés auprès de la présidence entre avril et septembre 2022. Les pressions sont fréquentes : on enlève des responsabilités aux uns, on accuse les gens de fautes qu’ils n’ont pas commises, on leur laisse entendre que s’ils nous soutiennent ils n’auront pas d’augmentation… résume Luisa Poupon-Labruyère. Moi on m’a même reprochée une insubordination face à un salarié de même niveau hiérarchique que moi.

Les témoignages constituent le socle qui permet au CSE de solliciter une expertise du risque psycho-social au Club Montmartre. L’expertise a bien sûr été refusée par la présidente, mais nous avons également fait appel à la justice et engagé une autre procédure en référé dont l’audience est programmée en septembre pour faire valoir le bien fondé de notre demande, précise Gaël Chuzeville.

...Et des licenciements à la pelle

En attendant, cinq salariés sont actuellement sous le coup d’une procédure de licenciement, tous pour des motifs différents, dont Luisa et Gaël, des salariés protégés. Comme par hasard ce sont toutes des personnes qui étaient ou avaient signalé leur volonté d’être sur la liste que FO présente à l’élection du 18 juillet, observe Gaël Chuzeville. Le CSE a également prévu de demander une expertise économique et sociale afin que les données économiques précises sur l’état de l’entreprise lui soit livrées. Avec tous les départs que nous avons subis, il est très probable que nous avons perdu des clients car les métiers du jeux sont des métiers de la relation humaine..., s’inquiète Luisa Poupon-Labruyère.

Sandra Déraillot Journaliste à L’inFO militante

L’inFO militante Le bimensuel de la Confédération