Nada Bzioui, un esprit rebelle chez la Dame de fer

InFO militante par Fanny Darcillon, L’inFO militante

© F. BLANC

Cheffe d’équipe sur le site de la Tour Eiffel, Nada Bzioui, 50 ans, veille sur le monument le plus célèbre de France et sur ceux qui le valorisent. En février, elle a mené une grève fructueuse pour assurer l’avenir de l’entreprise.

 orsqu’elle retourne dans son Maroc natal et explique à ses interlocuteurs qu’elle exerce à la Tour Eiffel, l’annonce fait toujours son petit effet. Nada Bzioui ne s’en cache pas : elle est fière du prestige qui entoure son lieu de travail, emblématique de la France et de sa capitale. Arrivée par hasard à la Société d’exploitation de la Tour Eiffel (SETE), au détour d’un emploi à temps partiel lors de ses études en école de commerce en 1998, elle y est restée par amour du contact humain et pour la bonne ambiance qui y règne entre collègues.

Si on n’accepte pas de travailler dans la foule, dans le froid comme dans la chaleur, on ne fait pas ce métier, prévient celle qui est devenue cheffe de brigade en 2018. Parmi les 360 salariés, trois équipes d’accueil se relaient toute l’année, les week-ends comme les jours fériés : chaque personne effectue trois journées de travail, trois soirées, suivies de trois jours de repos. On voit plus l’équipe que la famille !

Pourtant issue d’un milieu peu porté sur le syndicalisme, Nada Bzioui s’engage à FO dès 2003. Des choses m’ont révoltée dans le fonctionnement de l’entreprise, raconte-t-elle. J’ai toujours été une rebelle dans l’âme. Déjà petite, il fallait toujours que je défende mes camarades. J’ai trouvé ma vocation ! Successivement élue au CHSCT, au CSE, puis représentante de l’organisation syndicale, elle est élue déléguée syndicale FO en 2022.

Des travaux de rénovation sous-évalués

Animée par la volonté de combattre l’injustice intelligemment, sans rentre-dedans systématique, dans l’intérêt collectif, elle orchestre en février dernier une longue grève à la SETE, où FO totalise 30 % des voix aux élections professionnelles. En cause, la viabilité du modèle économique du monument, dont la Ville de Paris est actionnaire à 99 % et que la SETE exploite dans le cadre d’une délégation de service public courant de 2017 à 2030.

Dès le départ, ce modèle était aberrant car il se basait sur une fréquentation à 7,4 millions de visiteurs par an, pointe Nada Bzioui. Or en 2023, ils n’étaient que 6,3 millions. En plus de cette mauvaise évaluation, le budget pour les travaux de rénovation a pour sa part été sous-dimensionné. Par ailleurs, alors que la redevance que la SETE doit à la Ville de Paris est censée augmenter, pour passer à 50 millions d’euros, les salariés ont tiré la sonnette d’alarme concernant cette hausse. Un avenant à cette délégation de service public doit être voté fin mai au Conseil de Paris. Nous demandons que cette révision soit viable et n’ait pas d’impact sur la masse salariale.

Cinq jours de grève et 100 000 entrées perdues ont permis de peser sur les négociations. On a bien avancé, se félicite la déléguée, et on a été reçus à la mairie le 1er mars : ses représentants ne sont pas fermés au dialogue. Ce qui les intéresse, c’est que les Jeux olympiques se passent bien. L’union entre les deux syndicats a permis aux salariés de défendre leur avenir et celui de la Dame de fer. Entre nous, on s’appelle le petit village gaulois, s’amuse Nada Bzioui. Il y a des bagarres, des tensions, mais quand vient une attaque extérieure, on s’unit et on sort le bouclier.

Fanny Darcillon

L’inFO militante Le bimensuel de la Confédération

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