Des IRP créées conventionnellement ont-elles le statut de salarié protégé ?

Représentants du personnel par Secteur des Affaires juridiques

Traditionnellement, la Cour de cassation considère que les institutions représentatives du personnel créées par voie conventionnelle doivent, pour ouvrir à leurs membres le bénéfice de la procédure spéciale protectrice prévue en faveur des représentants du personnel et des syndicats, être de même nature que celles prévues par le code du travail.

A l’occasion d’un arrêt rendu le 22 janvier 2020, la Cour de cassation donne une nouvelle illustration de ce principe : les membres de commissions internes à une entreprise compétentes en matière de procédure disciplinaire, dont l’existence n’est pas prévue par le code du travail, n’ouvre pas droit au bénéfice de la protection contre le licenciement (Cass., soc., 22-1-20, n°18-21206).

Pour reconnaître au salarié le bénéfice du statut protecteur, la cour d’appel relève que le salarié en question est membre syndical de la commission paritaire de recours interne instaurée par la Société Générale en application de la convention nationale de la banque et que cette commission, qui est composée paritairement d’une délégation syndicale et d’une délégation patronale, a pour objet d’examiner les recours formés en interne par les salariés concernés par une procédure de rétrogradation ou de licenciement disciplinaire. Pour les juges d’appel, cette commission interne à une entreprise constitue une institution de même nature que les commissions paritaires professionnelles, créées par accord collectif, et qui ont, aux termes de l’article L 2234-2 du code du travail, une compétence en matière de réclamations individuelles et collectives et pour lesquelles l’article L 2234-3 du même code prévoit une protection pour les membres qui la composent.

La Cour de cassation casse cet arrêt considérant que les commissions paritaires professionnelles au plan local, départemental ou régional, qui ont principalement pour mission de concourir à la mise en place d’un dialogue social interentreprises, n’ont pas la même nature que des commissions instituées au sein d’une entreprise pour examiner les recours des salariés à l’encontre des décisions de l’employeur en matière de rétrogradation, licenciement ou mise à la retraite.

Les hauts magistrats ne reconnaissent donc pas le statut de salarié protégé aux membres de la commission interne à l’entreprise compétente en matière de procédure disciplinaire.

A l’opposé, un délégué syndical titulaire ou suppléant de groupe bénéfice de la protection contre le licenciement dans la mesure où il constitue une institution de même nature que celle du délégué syndical d’entreprise (Cass. soc., 23-10-07, n°06-44438) : un accord d’entreprise avait institué des délégués syndicaux titulaires et suppléants de groupe, chargés, au niveau du groupe, de fonctions similaires à celles des délégués syndicaux d’entreprise.

En conclusion, on remarque que les juges refusent le bénéfice de la protection contre le licenciement à des membres d’institutions créées par des accords de droit privé qui ne sont pas prévues par la loi dès lors qu’ils ne relèvent pas d’une catégorie de même nature que celle prévue par la loi.

Attention, il ne faut pas confondre les institutions créées par accord de droit privé non prévues par la loi et les accords prévoyant un nombre de représentants supérieurs à celui défini par le code du travail.

Lorsque le nombre de représentants des CSE d’établissements est augmenté par accord, ceux-ci bénéficient du statut protecteur (Cass. soc., 20-12-06, n°06-60119).

Seul un accord collectif (ou un protocole préélectoral) peut augmenter le nombre d’élus ou de représentants syndicaux, ni un usage de l’entreprise ni un engagement unilatéral de l’employeur ne pouvant accroître ce nombre. La protection contre le licenciement est également acquise lorsque l’accord prévoit la mise en place d’une institution prévue par le code du travail dans un établissement ou une entreprise disposant d’un nombre de salariés inférieur au seuil exigé par la loi.

 

Remarque :
Si les salariés, membres des institutions créées par accord de droit privé non prévues par la loi, ne peuvent bénéficier de la protection contre le licenciement, ceux-ci peuvent toujours invoquer, en cas de licenciement, les dispositions de l’article L 1132-1 du code du travail qui prohibent toute discrimination en raison de l’activité syndicale et l’article L 1132-4 qui frappe de nullité tout licenciement prononcé en raison de cette activité.

 

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