Mobilisation à partir du 2 octobre : la feuille de route déterminée du CCN

Les Dossiers de l’InFO militante par Ariane Dupré, Valérie Forgeront, L’inFO militante

Photos : S. Liédot

Un CCN de FO logiquement centré sur l’appel à la mobilisation, à partir du 2 octobre, par des grèves et des manifestations. Le Comité confédéral national des 24 et 25 septembre s’est en effet ouvert le jour même où les huit organisations, dont FO, formant l’intersyndicale étaient reçues par le nouveau Premier ministre, Sébastien Lecornu. Mais les réponses aux demandes d’abandon des politiques d’austérité, et donc d’engagement de mesures permettant d’aller vers une vraie justice fiscale et sociale, ne vinrent pas. Le Premier ministre écarte une abrogation de la réforme des retraites de 2023, ainsi que le demande FO, et même une suspension. L’intersyndicale réunie ce 24 septembre a donc décidé une nouvelle mobilisation, après celle du 18 septembre. Si la date du 2 octobre a été arrêtée, FO a souhaité lui apporter un caractère reconductible. Tant par leurs interventions à la tribune que par la résolution générale du CCN adoptée à une quasi-unanimité, les militants FO ont montré leur détermination à faire aboutir les revendications : sur les salaires, l’emploi, la santé, les retraites, les services publics, la réindustrialisation, les aides publiques, le paritarisme… Ce qui implique de parvenir, par le rapport de force, à mettre un coup d’arrêt aux mesures d’austérité qui menacent de perdurer en 2026. On se doit de réussir cette mobilisation pour gagner sur les revendications, insistait le secrétaire général, Frédéric Souillot.

C’est un CCN sur fond d’actualité brûlante, soulignait le secrétaire général de FO, Frédéric Souillot, dès l’ouverture le 24 septembre du Comité confédéral national. Et pour cause. Le même matin, une délégation FO (les secrétaires confédéraux Patricia Drevon et Pascal Lagrue) était reçue par le nouveau Premier ministre, Sébastien Lecornu, avec sept autres organisations. L’objectif de l’intersyndicale, qui avait lancé un ultimatum au Premier ministre, était d’obtenir des réponses à la revendication de mesures pour une justice sociale et fiscale. Il n’en fut rien. Le Premier ministre nous dit en somme, je suis un Premier ministre qui n’a pas de gouvernement et pas de majorité à l’Assemblée nationale. Et il voudrait qu’on lui fasse confiance ! lançait Frédéric Souillot à la tribune. Ce CCN – le dernier avant le congrès confédéral qui se tiendra du 20 au 24 avril à Dijon ― a affiché encore sa singularité dans le cadre de cette actualité brûlante. Le 24 septembre en effet, constatant l’absence de réponses du Premier ministre, l’intersyndicale s’est réunie deux fois dans la journée et a décidé d’une nouvelle mobilisation, après celle du 18 septembre qui avait rassemblé sur tout le territoire autour d’un million de manifestants. La date du 2 octobre a ainsi été choisie par l’intersyndicale pour une journée de grèves et manifestations. Le CCN de FO, dont la résolution générale a été adoptée le 25 septembre à une quasi-unanimité, a décidé d’étendre la portée de cet appel. Ainsi, pour gagner sur les revendications, à commencer par l’abrogation de la réforme des retraites et l’abandon de tout budget d’austérité, le CCN appelle toutes les structures à réunir les salariés pour discuter et décider la grève et sa reconduction, à partir du 2 octobre, dans l’action commune partout où c’est possible. Et de souligner aussi que FO a proposé à l’intersyndicale d’appeler à la grève sur plusieurs jours consécutifs (les 1er, 2 et 3 octobre), ce qui a été refusé par les autres organisations syndicales.

Un non ferme à la poursuite des politiques d’austérité

C’est donc dans ce contexte national mouvementé – et c’est sans parler du contexte international, fait d’une bataille douanière rude lancée par les États-Unis et plus gravement de guerres sanglantes qui secouent la planète ; le secrétaire général de FO a d’ailleurs adressé le 23 septembre un courrier au président de la République, lui demandant une prise de mesures concrètes face à la situation dramatique de la population de Gaza ― que s’est tenu ce CCN. Une réunion du « parlement » de FO particulièrement focalisée sur la mobilisation, expression du ras-le-bol des travailleurs, exigeant des hausses de salaires, une véritable politique de réindustrialisation et l’arrêt des plans sociaux, la conditionnalité des aides publiques aux entreprises, l’abrogation de la réforme des retraites, l’absence de gel sur les dépenses publiques (une année blanche était projetée pour 2026 par François Bayrou), le refus de toute attaque contre la Sécurité sociale (qui célèbre cette année ses 80 ans)... Alors que les axes précis des projets de textes budgétaires pour 2026 (projet de loi de finances et projet pour la Sécurité sociale) n’ont pas été présentés, la crainte est toutefois forte d’une poursuite des politiques d’austérité, ont souligné les militants, confirmant au fil de leurs interventions (cinquante) à la tribune leur refus d’une telle situation. Après l’effort de 44 milliards d’euros, ce serait finalement 20 milliards ? Et le mot abrogation de la réforme des retraites n’apparaît pas dans les propos du Premier ministre, listait avec ironie Michel Le Roch (UD de Loire-Atlantique), indiquant encore que FO ne veut pas faire simplement  bouger les lignes [sur des mesures gouvernementales sévères qui pourraient être proposées, NDLR], comme pourraient le souhaiter certaines organisations, mais que soit mis un arrêt net aux politiques d’austérité. 44 milliards ? 20 milliards ? Le problème est : à qui on va demander de payer la note ! Aux travailleurs ?, fustigeait Sébastien Busiris (FEC-FO). Les travailleurs ont assez trinqué, résumait Magalie Lardeux (UD du Maine-et-Loire). La grève reconductible est le seul moyen de faire plier Macron, Lecornu…, martelait Sébastien Vacher (UD du Jura).

Des actions sectorielles à venir

Cette volonté d’une mobilisation soutenue sera maintes fois exprimée par les militants, pointant aussi cependant les difficultés salariales qui agissent comme un frein. Beaucoup dans nos secteurs ont des salaires bas, indiquait ainsi Laurent Rescanières (FGTA-FO), rappelant l’apport de récentes négociations interprofessionnelles : fin de la limitation à trois des mandats de délégués, la retraite progressive accessible à partir de 60 ans… Valentin Rodrigues (FO Métaux) appelait ainsi à privilégier une politique contractuelle et le dialogue social. Au-delà de la mobilisation à partir du 2 octobre, l’Union interfédérale FO-Fonction publique annonçait elle l’organisation d’une mobilisation militante les 13, 14 et 15 octobre, devant l’Assemblée nationale. Au programme : tractage et explication de nos positions, indiquait Christian Grolier. On pense à organiser une semaine noire dans le transport, autour de la deuxième quinzaine d’octobre, annonçait de son côté Patrice Clos (Fédération des Transports et de la Logistique FO-UNCP), précisant que la revendication salariale est dans le secteur la  première des revendications.

Ce CCN, qui a souligné toute la détermination de l’organisation à obtenir de vraies mesures de justice sociale et fiscale, a été aussi l’occasion pour FO, à commencer par son secrétaire général, de rappeler qu’en cette année 2025 sont célébrés les 130 ans de la CGT (née à Limoges le 23 septembre 1895). Nous sommes tous ici, en tant que militants de la CGT-Force Ouvrière, les héritiers de cette organisation originelle, celle qui a mis en avant la nécessité de l’indépendance syndicale !, rappelait Frédéric Souillot.

Valérie Forgeront

 

Pour accroître encore l’audience de FO, priorité au développement syndical

Dans sa feuille de route, le CCN appelle aussi à poursuivre le développement syndical. C’est un enjeu majeur pour FO afin d’accroître encore son audience, a souligné le secrétaire général de la confédération, Frédéric Souillot. La résolution générale affirme ainsi la nécessité de poursuivre les adhésions, et cela des ouvriers aux cadres. Avec l’évolution des catégories socio-professionnelles, en effet les cadres sont un enjeu qu’il ne faut pas négliger, a appuyé Hervé Larrouquere, secrétaire général de l’UD FO des Pyrénées-Atlantiques. En matière de syndicalisation, de bonnes nouvelles ont été annoncées. Dans le Lot, où FO est déjà bien implantée, nous avons connu une hausse de 4 % de représentativité. Les équipes se sont renouvelées, avec plein d’idées neuves, s’est félicité David Lagarrigue, secrétaire de l’UD du Lot. À La Réunion, FO est passée de 12 % à 17 % de représentativité. Beaucoup de salariés nous rejoignent pour lutter contre la casse sociale, constate Jean-Paul Paquiry, le secrétaire général de l’UD.

De nouveaux outils pour les UD et les fédérations

Pour appuyer le développement, la confédération a mis en place, depuis le mois de juin, un nouveau logiciel de mesure d’audience et de représentativité (MarsFO), qui répertorie les informations sur les cycles des élections professionnelles dans les entreprises et les listes syndicales. Une initiative saluée par les militants. C’est un véritable outil pour préparer l’avenir syndical, a apprécié Ludovic Durand, secrétaire général de l’UD de Lozère. Les fédérations œuvrent également au développement. En lien avec la mise en place de ce logiciel, la FGTA-FO s’est lancée dans un plan de développement ambitieux. L’objectif, c’est de doubler le nombre d’adhérents, a souligné devant le CCN Laurent Rescanières, le secrétaire général de la fédération. FO Métaux a également annoncé le lancement d’un grand programme de développement pour la fin octobre. Car développer le nombre d’adhérents, c’est notre priorité pour construire un rapport de force. C’est par là que ça commence, a rappelé Valentin Rodriguez, secrétaire général de la fédération.

Ariane Dupré

 

FO plus que jamais en soutien aux travailleurs ultramarins

Ce CCN d’automne, dont une des séances a été présidée par Christian Vaamei, secrétaire général de l’UD FO de Wallis-et-Futuna, a illustré tout le soutien de FO aux territoires ultramarins. Ainsi, le Comité confédéral national de FO a adopté, à l’unanimité, une résolution spécifique outre-mer. Par ce texte, il exige une véritable continuité territoriale, et affirme que la République, une et indivisible, doit garantir l’égalité des droits entre les territoires hexagonaux et les territoires ultra-marins en tenant compte de leurs spécificités.

Des territoires ultramarins aux prises avec de graves difficultés. Il faut lutter contre la vie chère qui leur est imposée. L’explosion sociale est proche, a alerté le secrétaire général de FO, Frédéric Souillot. Les secrétaires d’UD ultramarins ont témoigné en effet d’une tension toujours vive face au coût de la vie. Ce que les mesures gouvernementales déjà actées ou encore le projet de loi contre la vie chère en outre-mer ne règlent en rien. Nous sommes assis sur une marmite. En Martinique, il y a de la violence dans les rues. Et elle est due à la vie chère, a appuyé Éric Bellemare, secrétaire général de l’UD FO de la Martinique. Le militant a ainsi expliqué que le plan gouvernemental de 2024 annulant la TVA sur 6 000 produits de base a été très insuffisant : La vie chère ne concerne pas uniquement l’alimentation. Exemple : un médicament comme le doliprane coûte 2,18 euros dans l’Hexagone, mais c’est entre 3 et 5 euros en Martinique. À savoir aussi que la spéculation sur le foncier pose des problèmes aux Martiniquais pour se loger. Quant au chômage, il repart à la hausse.

L’urgence des hausses de salaires

La situation est tendue aussi à La Réunion, où les transporteurs sont en grève, tout comme les salariés de l’usine sucrière de Tereos de Bois-Rouge, qui revendiquent des hausses de salaires. Une revendication salariale patente d’ailleurs sur tout le territoire, indiquait Jean-Paul Paquiry, secrétaire général de l’UD FO de La Réunion, soulignant aussi : Nous voulons plus de moyens pour les services publics, notamment pour notre hôpital qui souffre terriblement. Quant aux mesures d’austérité appliquées à la fonction publique, le militant rappelait encore : Les personnels de la fonction publique refusent la baisse de leur traitement lorsqu’ils sont en arrêt maladie, et la baisse de l’indemnité vie chère lorsqu’ils sont en congé pour longue maladie. La vie chère à La Réunion ne s’arrête pas lorsqu’on est malade ! Alors que le salaire moyen par tête (SMPT) est inférieur de 590 euros à celui de la métropole, il y a urgence à ce que toutes les conventions collectives nationales soient étendues pour permettre de combler ce type d’écart de salaire. Assis sur une réduction massive des dépenses publiques, l’axe budgétaire pour 2026 qu’avait présenté cet été François Bayrou, désormais ex-Premier ministre, a rencontré une vive opposition des militants FO d’outre-mer.  Il était question de diminuer de 20 % l’enveloppe de la mission outre-mer, laquelle est de 3 milliards d’euros en 2025. Une telle baisse signifierait moins de services publics pour les outre-mer, s’est indigné Patrick Galenon, secrétaire général de l’UD FO de Polynésie.

Ariane Dupré

Ariane Dupré Journaliste à L’inFO militante

Valérie Forgeront Journaliste à L’inFO militante

L’inFO militante Le bimensuel de la Confédération