Salaire minimum hiérarchique : FO obtient une définition précise de cette notion

Salaire par Secteur des Affaires juridiques

Traditionnellement, les conventions de branche pouvaient déterminer, d’une part, le montant du salaire minimum conventionnel, et, d’autre part, les éléments de rémunération à prendre en compte pour s’assurer que la rémunération effective des salariés atteigne au moins le niveau du salaire minimum conventionnel correspondant à leur niveau hiérarchique. A défaut de stipulations conventionnelles expresses sur les éléments de rémunération des salariés à prendre en compte pour procéder à cette comparaison, il convenait de retenir, en vertu d’une jurisprudence constante de la Cour de cassation, le salaire de base et les compléments de salaire constituant une contrepartie directe à l’exécution de la prestation de travail par les salariés. Le salaire minimum conventionnel fixé par la branche, par voie d’accord collectif, s’imposait à tout accord d’entreprise.

Depuis la dernière réforme du droit du travail datant des ordonnances de 2017, une nouvelle notion est apparue : le salaire minimum hiérarchique (SMH). Dorénavant, la convention de branche peut définir les garanties applicables en matière de salaires minima hiérarchiques, auxquelles un accord d’entreprise ne peut déroger que s’il prévoit des garanties au moins équivalentes. Autrement dit, depuis 2017, si les compléments de salaire peuvent être modifiés ou supprimés par accord d’entreprise, les salariés doivent obligatoirement bénéficier d’une rémunération effective au moins égale au montant des SMH défini dans l’accord de branche.

Qu’est-ce qu’un SMH ?

Cette notion, non définie par la loi, a fait l’objet de moults débats entre le ministère du Travail et les interlocuteurs sociaux. Le premier prônait une interprétation très restrictive du SMH en l’entendant du seul salaire de base.

Quant aux organisations syndicales, celles-ci considéraient que le SMH comprenait le salaire de base mais également les primes que les négociateurs souhaitaient y inclure. Pour les organisations syndicales, retenir une notion large du SMH s’imposait dans la mesure où il était nécessaire de respecter les équilibres résultant de la négociation collective.

Depuis plus de deux ans, le ministère du Travail procédait à des réserves systématiques - voire des exclusions - au moment de l’extension des accords de branche, dès lors que l’accord donnait une définition du salaire minimum plus large que le seul salaire de base, au risque de remettre en cause l’équilibre trouvé par les parties mais aussi de favoriser le dumping social au sein d’une même branche d’activité.

Par un arrêt en date du 7 octobre 2021, le Conseil d’État vient de mettre un terme à ce débat en donnant raison aux organisations syndicales, dont FO : faute de définition légale du SMH et dans la mesure où les travaux préparatoires de l’ordonnance du 22 septembre 2017 ne donnent pas plus d’éclaircissements, il est loisible à la convention de branche, d’une part, de définir les salaires minima hiérarchiques et, le cas échéant à ce titre de prévoir qu’ils valent soit pour les seuls salaires de base des salariés, soit pour leurs rémunérations effectives résultant de leurs salaires de base et de certains compléments de salaire, d’autre part, d’en fixer le montant par niveau hiérarchique (CE, 7-10-21, n°433053).

Si la convention de branche stipule que les SMH s’appliquent aux rémunérations effectives des salariés résultant de leurs salaires de base et de compléments de salaire qu’elle identifie, elle ne fait pas obstacle à ce que le montant de ces minima soit atteint dans une entreprise par des modalités de rémunération différentes de celles qu’elle mentionne, un accord d’entreprise pouvant réduire ou supprimer les compléments de salaire qu’elle mentionne au titre de ces minima, dès lors toutefois que sont prévus d’autres éléments de rémunération permettant aux salariés de l’entreprise de percevoir une rémunération effective au moins égale au montant des salaires minima hiérarchiques fixé par la convention.

Ainsi, les branches sont libres de déterminer, comme elles le souhaitent, le montant et la structure du SMH, celui-ci pouvant correspondre au salaire de base, mais également inclure certains compléments de salaire, comme des primes.

Dans l’affaire du 7 octobre 2021, les négociateurs de la branche du commerce de détail et de gros à prédominance alimentaire avaient fixé, par avenant, des SMH comprenant un salaire de base, mais aussi la prime de fin d’année et la rémunération du temps de pause. Par un arrêté du 5 juin 2019, la ministre du travail a étendu l’application de cet avenant à l’ensemble des entreprises de la branche, y compris à celles qui ne sont pas adhérentes à l’une des organisations ayant signé l’avenant. Elle avait néanmoins exclu du champ de cette extension certaines stipulations de l’avenant, au motif que les SMH devaient uniquement se rapporter à un salaire de base, sans les compléments de salaire.

Le Conseil d’État, par son arrêt du 7 octobre 2021, annule cet arrêté du Ministre en tant qu’il limite le champ de l’extension de l’avenant.

Dorénavant, il est clairement affirmé que la branche peut librement négocier le SMH, leurs accords seront applicables au niveau des entreprises puisqu’elles ne pourront plus y déroger dans un sens moins favorable.

Désormais, FO plaide, conformément aux vœux d’un rapport parlementaire (rapport du Sénat n°722, voir pp.101-103) sur le bilan des réformes en matière de dialogue social et de négociation collective, pour que soit précisé clairement et explicitement au niveau législatif la primauté des accords de branche en ce qui concerne la rémunération. Selon ce rapport, qui s’inscrit dans la continuité de l’arrêt du Conseil d’État, il est évident que le rôle de régulateur de la concurrence confié de manière explicite aux branches professionnelles en 2016 doit se traduire par la possibilité de conférer un caractère obligatoire à certaines primes pour leur permettre de fixer une rémunération minimale (tout en laissant aux entreprises une certaine marge de liberté quant à la composition de cette rémunération).

 

 

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