Le Conseil d’État, dans un arrêt rendu le 8 novembre 2017, s’est prononcé sur l’épineuse question de la représentativité d’un syndicat catégoriel au niveau de la branche.
Il faut préciser, d’abord, que c’est au ministre chargé du travail qu’il revient d’arrêter la liste des organisations syndicales reconnues représentatives par branche professionnelle (article L 2122-11 du code du travail).
Conformément à cette exigence, le ministre du travail a donc pris un arrêté fixant la liste des organisations syndicales représentatives au niveau de la branche de société d’assurance.
Celui-ci, mentionne la CFE-CGC au nombre des organisations syndicales représentatives et détermine son audience. Toutefois, ce syndicat conteste cet arrêté et plus particulièrement son article 2 qui fixe la mesure de l’audience de son syndicat pour la négociation des accords collectifs inter-catégoriels de branche.
Le point de départ du contentieux réside dans la composition des collèges électoraux établis au sein de la branche de société d’assurance. Cette dernière a choisi une organisation des collèges différente de celle qui est classiquement utilisée (art. L 2324-11 du code du travail).
Cette réorganisation a été opérée de telle sorte que, dans le premier et le second collège, se trouvaient des salariés que la CFE-CGC avait vocation à représenter aux termes de ses statuts.
Si cette reconfiguration est tout à fait légale (article L 2324-12 du code du travail), elle pose cependant quelques problèmes lors de la mesure de l’audience de l’organisation syndicale catégorielle.
Comment faut-il procéder pour mesurer une telle audience ? Faut-il retenir uniquement les résultats du second collège et exclure le premier collège ou à l’inverse, faut-il apprécier l’audience au regard des premier et second collèges réunis. En outre, si l’on prend en compte les 2 collèges réunis, dans le premier collège, faut-il prendre en compte seulement des résultats obtenus par cette organisation aux élections pour lesquelles les procès-verbaux mentionnaient que ce collège comportait des salariés qu’elle avait vocation à représenter ou, à l’inverse, faut-il prendre les résultats de la totalité des élections dans ce collège ?
Le Conseil d’État est venu répondre à ces questions. Pour ce faire, il distingue la mesure de la représentativité d’un syndicat catégoriel (8%) et la mesure de l’audience permettant à ce syndicat catégoriel de peser dans des négociations inter-catégorielles.
D’une part, pour déterminer la représentativité d’un syndicat catégoriel de branche, le Conseil d’état énonce, conformément au principe de spécialité, que les seuls suffrages recueillis dans les collèges électoraux, dans lesquels un syndicat a statutairement vocation à présenter des candidats, sont applicables.
D’autre part, concernant la mesure de l’audience du syndicat catégoriel pour les négociation inter-catégorielles, le Conseil d’État affirme que lorsque le ministre chargé du travail fixe, en application des dispositions de l’article L. 2122-11 du même code, les audiences respectives des différentes organisations syndicales reconnues représentatives dans une même branche professionnelle en vue d’établir la validité de futurs accords de branche inter-catégoriels, il lui appartient de rapporter le nombre des suffrages exprimés en faveur de chacune des organisations reconnues représentatives au nombre total des suffrages exprimés en faveur de l’ensemble des organisations reconnues représentatives dans cette branche
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Pour cette raison, le Conseil d’État annule l’article 2 de l’arrêté litigieux qui ne prévoyait pas, pour la mesure de l’audience d’une organisation syndicale catégorielle, de prendre en compte la totalité des suffrages dans le premier collège.
Ce faisant, le Conseil d’État s’accorde avec la solution donnée par la Cour de cassation pour la mesure de l’audience d’une organisation syndicale catégorielle représentative au niveau de l’entreprise. En effet, dans un arrêt rendu le 31 mai 2011 (Cass. soc., 31 mai 2011, n°10-14391), elle avait affirmé qu’un syndicat représentatif catégoriel peut, avec des syndicats représentatifs inter-catégoriels, et sans avoir à établir sa représentativité au sein de toutes les catégories de personnel, négocier et signer un accord d’entreprise intéressant l’ensemble du personnel, son audience électorale rapportée à l’ensemble des collèges électoraux, devant alors être prise en compte pour apprécier les conditions de validité de cet accord
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